Koré Yamazaki de retour en France pour Ghost & Witch

Ghost & Witch – la quête du divin a bénéficié à un très beau lancement en France. La mangaka Koré Yamazaki est de retour en France pour présenter son nouveau manga. Dix ans après notre première rencontre à Japan Expo, la mangaka était en tournée dans toute la France pour dédicacer son tout nouveau titre. Il est disponible chez Komikku, comme ses ouvrages précédents. Si vous avez aimé The Ancient Magus Bride, vous ne pouvez que tomber amoureux de Ghost & Witch – la quête du divin.

En attendant de le découvrir, nous vous invitons à profiter de notre échange avec l’autrice !

planche en couleur
© Koré Yamazaki 2023 / Bushiroad works Inc.

De The Ancient Magus Bride à Ghost & Witch

Journal du Japon : Bonjour et merci à nouveau pour votre temps. Nous vous avions interviewé en 2015 lors de votre venue à JAPAN EXPO, qu’est-ce qui a changé depuis 10 ans pour vous et votre série The Ancient Magus Bride ?

Koré Yamazaki : Oui, c’est vrai que 10 ans c’est long. Mais, j’ai l’impression qu’il n’y a pas eu tant de changement que ça et mon envie de raconter des histoires aux gens est toujours aussi présente !

Pour votre série principale du coup vous avez encore beaucoup de choses en tête pour continuer car il y a déjà un vingtaine de tomes !

Je suis pas sûre de pouvoir tout dessiner tant que je suis encore en vie !
La question est : Est-ce moi qui vais mourir avant ? Ou est-ce The Ancient Magus Bride (Rires).

Je vous souhaite de finir avant !

Oui, je ferai tout pour que l’histoire se termine. Je ne veux pas que ça se termine de façon bancale. C’est une histoire qui est censée avoir une vraie fin.

Dans quelle direction faites-vous vos recherches sur les mythes et légendes ? Dans votre manga vous en abordez beaucoup de différents… Mélangez-vous les folklores ?

C’est vrai que, ce qui m’intéresse en particulier, ce sont les contes irlandais. À la différence des autres pays d’Europe, il y a beaucoup d’histoires anciennes irlandaises et de contes qui sont arrivés jusqu’à nous. Et même s’il y a de moins en moins de personnes qui sont là pour les transmettre par rapport aux autres pays d’Europe, c’est quand même un pays qui a su garder énormément d’histoires folkloriques. Et, comme toutes ces histoires sont encore là, j’ai pu les intégrer et les utiliser; notamment dans Ghost and Witch. Ça m’aide beaucoup que ces histoires soient encore présentes. 
Au Japon, j’ai un ami qui est conteur d’histoires celtiques et plus précisément de contes irlandais. Les histoires qu’il raconte m’aident aussi beaucoup.

Couverture de Ghost & Witch

Comment faites-vous pour ne pas vous perdre dans les différents personnages, clans et histoires de votre manga ? Avez-vous des cahiers ou des fichiers sur votre ordinateur pour ne jamais vous emmêler les pinceaux au bout de 20 tomes, et ainsi garder une certaine cohérence ?

Pas tant que ça. J’ai vraiment les grandes lignes du récit en tête. J’ai aussi le tempérament de chaque personnage qui est dans ma tête. Alors, certes, il m’arrive de rechercher dans les tomes précédents telle réplique qu’a dit tel personnage. Mais sinon, je suis pas trop du genre à prendre des notes ou à faire ce genre de choses. 

Les personnages évoluent simplement au fil du temps…

Je ne dirais pas vraiment que ce sont des tempéraments qui changent mais peut-être des personnages qui se construisent au fur et à mesure. Par exemple, il arrive que vers le début de l’histoire tel personnage dise telle réplique et que sur le moment je me dis : « mais en fait pourquoi ce personnage a-t-il dit ça ?« 

Et puis avec le temps, je me rends compte que : “Mais oui, mais bien sûr, c’est parce que il a peut-être tel type de tempérament et qu’il a grandi dans tel type d’environnement !” Il a dit ça donc ça m’arrive de comprendre après le coup. Vous savez, quand je dessine des mangas, il y a vraiment une conversation entre les personnages et moi et où je me dis : “Ah bah je comprends en fait, tu étais comme ça ?” Je pense donc que, oui, la construction se fait naturellement, sans qu’il n’y ait de problème de cohérence.

Dans vos postfaces vous parlez de votre vie personnelle, est-ce que vous aimez partager un peu avec vos fans sur internet ?

Je parle moins de partage que du plaisir d’acquérir des informations, des connaissances. Ensuite, je veux les transmettre. Être mangaka, c’est un métier où l’on va aussi partager ses pensées, sa vie. Ça fait partie de mon travail d’amuser le lecteur grâce à ça. Je l’intègre aussi de cette manière.

Avez-vous déjà une idée de la fin de la série ? Dans le dernier tome vous commencez un nouvel arc, est-ce le dernier ?

En fait, j’ai encore plein de choses à raconter donc si les lecteurs ont envie d’avoir de nouveaux arcs, j’en ai plein à proposer !
En revanche, il faut que la fin soit bien définie. Comme je disais tout à l’heure, une histoire se doit de se terminer. Donc je veillerai à ce qu’il y ait une conclusion à mes différentes séries disponibles actuellement. 

planche du manga dans une rue en Irlande
© Koré Yamazaki 2023 / Bushiroad works Inc.

Vos héroïnes sont toujours des personnages qui ont beaucoup souffert au début de vos histoires. Pourquoi commencer par un passé douloureux et dans quoi puisez-vous vos idées à ce sujet ?

Des personnages ayant, au début de l’histoire, vécu beaucoup de choses douloureuses permet ensuite d’animer l’histoire. Je ne dis pas pour autant que c’est quelque chose de facile ou de confortable. Au départ c’est une histoire qui est destinée au public japonais. Et j’ai l’impression que les Japonais aiment beaucoup les personnages qui ont souffert.

De plus, on s’identifie aux héros et aux héroïnes. On aime beaucoup cet instant où les efforts des personnages sont récompensés, ou que les efforts qu’ils vont faire vont aider d’autres personnages. Ça va permettre de développer leur vie. C’est vrai que les Japonais, et même moi à titre personnel, j’aime beaucoup quand les histoires prennent ce genre de direction.

C’est une des raisons pour lesquelles je fais des mangas de fantasy. Les humains souffrent tous. On a tous des difficultés dans nos vies, c’est donc normal d’avoir envie que nos efforts soient récompensés. Autant le lecteur que les personnages ressentent cette souffrance et le lecteur va vraiment se demander : “Comment le personnage va trouver le salut ?

En voyant les personnages trouver le salut, les lecteurs eux-mêmes peuvent à leur tour se sentir soulagés.

Pourquoi je fais de la fantasy ? Le fait d’envelopper cette souffrance dans un univers de fantasy, ça permet aux lecteurs de voir les choses de manière objective. Parce que si ces personnages souffrent et que je les dessine dans un contexte plus réaliste, c’est trop dur émotionnellement pour le lecteur. Mais lorsque l’on est dans un récit de fantasy en tant que lecteur, on peut voir les choses avec un regard extérieur. Et, même, on arrive à voir sa propre souffrance de manière plus objective. C’est aussi pour cela que c’est important pour moi d’avoir des personnages qui, dès le début de l’histoire, sont dans une situation de souffrance.

Voyage en Irlande

Votre nouveau manga, Ghost & Witch, qui vient de sortir en France, se déroule en Irlande. Pour le préparer avez-vous fait des repérages sur place ? Si oui qu’avez-vous visité où apprécier en Irlande ?

Oui, en 2019 donc juste avant le COVID. Je suis allée pendant un mois et demi au Royaume-Uni, en Irlande. J’ai fait un grand tour et j’ai fait du home stay, donc je mangeais chez l’habitant. 

Je me déplaçais seule, j’allais où je voulais. Je prenais toutes sortes de photos. Après je vous avoue que je suis plus à l’aise avec du texte qu’au dessin, donc j’ai tendance à garder sous forme de texte les paysages que je voyais. J’ai beaucoup échangé avec ma famille d’accueil. Notamment avec le père et la mère de la famille à qui j’ai pu poser plein de questions. Nous avons visité toutes sortes d’endroits.

planche du manga
© Koré Yamazaki 2023 / Bushiroad works Inc.

Qu’est-ce que vous aimez dans le folklore irlandais ? Est-ce qu’il ne serait pas quelque part assez proche du folklore japonais ?

Je pense, en effet. C’est vrai que dans les contes du folklore japonais il y a différents genres : ceux avec des animaux, ceux avec des êtres humains, etc. Mais oui, à titre personnel, j’ai l’impression qu’il y a beaucoup de similitudes. D’ailleurs il existe des recherches sur le sujet. Il y a des publications qui vont comparer des contes japonais et des contes irlandais.

En revanche, c’est vrai que dans le folklore japonais, il y a beaucoup d’histoires comiques ou des histoires qui font peur. Alors qu’en Irlande, j’ai l’impression qu’il n’y a pas beaucoup d’histoires comiques, mais plutôt des choses qui font peur.

Vous dessinez deux séries en même temps. Est-ce que c’est compliqué à gérer au niveau planning ?

Oui, c’est très dur effectivement. Mais le fait que ce soit deux séries avec différents lieux mais dans un même monde, ça facilite un petit peu les choses. J’aime beaucoup y réfléchir et ça m’amuse beaucoup. J’y prends énormément de plaisir. En revanche, c’est vrai que la question du planning, elle est vraiment très compliquée… Je n’ai quasiment aucune capacité à organiser mon planning. Donc c’est en grande partie mon éditeur qui s’occupe de tout ça. 

Nous vous remercions pour cette interview… Pour terminer avez-vous un message pour vos lecteurs ?

Je pense que les personnes qui vont lire cette interview sont surtout des lecteurs Français et Européens, Ghost & Witch étant une série qui se déroule en Europe. J’espère que ça leur rappellera des choses et que ça les amusera. J’espère qu’ils verront ça comme une étrange histoire conçue par une autrice Japonaise mais qui se passe en Europe.

Merci pour cette interview.

Nous tenons également à remercier Miyako Slocombe pour son interprétation et Komikku pour l’organisation de cette interview de Ghost & Witch.

Koré Yamazaki sur X
Komikku sur X

Tatiana Chedebois

Tatiana Chedebois, plus connue sous le nom de plume "Tanja", écrit sur la J-music, les mangas et les anime depuis plus de 25 ans. Tombée très tôt amoureuse du Japon, elle est rédactrice depuis 1997 dans différents fanzines, magazines (Japan Vibes, Rock one), webzines (JaME, Journal du Japon) ainsi que sur son blog (Last Eve). Avec son groupe de visual kei français elle fait en 2004 la première partie de Blood premier groupe de vk à venir en France. En 2019, elle cocrée le podcast du BL Café pour parler de Boys' love aux plus grand nombre. Puis en 2022, elle intègre la team du Cri du mochi pour parler manga et anime généraliste sur Twitch.

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