[Cultissime] Lancement du nouveau Capitaine Flam chez Kana
Après la table ronde sur le manga à la française au Festival Cultissime, à l’occasion du lancement de Capitaine Flam – L’Empereur Éternel, retour sur la rencontre avec Alexis Tallone et Jérôme Alquié, auteurs de BD Kana Classics réunis sur scène pour parler de cette collection d’adaptations de séries animées cultes en bande dessinée franco-belge. Au programme : la genèse de Kana Classics, les trucs et astuces pour adapter en format BD et faire revivre la nostalgie des années 80 et d’autres surprises… Bonne lecture !
La genèse de la collection Kana Classics avec Albator
Valentin Paquot : Bonjour à tous. Jérôme, peux-tu s’il-te-plaît te présenter succinctement ainsi que tes projets Kana Classics accomplis ?
Jérôme Alquié : Bonjour à tous. Kana Classics est une collection qui remet un coup de projecteur sur des séries d’animation qui ont bercé l’enfance de personnes que je vois dans la salle… et un petit peu moins d’autres. Ça a commencé en 1978 avec l’arrivée de Goldorak, en 1980 avec Albator, d’autres dessins animés aussi, avec Recré A2 présenté par Dorothée et après le Club Dorothée. J’ai la chance de pouvoir travailler sur deux licences qui sont très chères à mon cœur, Capitaine Albator pour ceux qui l’ont connu en janvier 1988 et une autre série, Les Chevaliers du Zodiaque, arrivée le 6 avril 1988.
Valentin Paquot : Il y a aussi Goldorak dans cette collection dont on ne parlera pas aujourd’hui parce qu’on est méchants (Rires). L’autre invité, Alexis Tallone, travaille sur Capitaine Flam et s’occupe des dessins [NDLR : avec Sylvain Runberg au scénario]. On a la bande-annonce à vous montrer sur les écrans.
Valentin Paquot : Jérôme, tu as parlé tout à l’heure d’œuvres qui sont devenues des classiques. On est au festival Cultissime donc on peut dire que ce sont des œuvres cultes avant de devenir des classiques. J’aimerais qu’on aborde Albator. Est-ce que tu peux nous dire pourquoi, pour toi, Albator est entré dans la postérité et dans le cœur de tout le monde ?
Jérôme Alquié : Je suis né en 1975. La première série Albator, le corsaire de l’espace est sortie en 1978 au Japon [NDLR : en 1980 en France] et je ne l’ai pas vraiment connu à la télévision car j’avais seulement 5 ans. Je ne comprenais pas très bien ce qui se passait à l’écran : ce gars en noir me faisait un peu peur, il tirait sur des filles qui sortaient des arbres… Et c’est bien plus tard que je l’ai recroisé. J’avais une petite vingtaine d’années et je me suis rendu compte que non seulement c’était un excellent anime pour les enfants mais aussi une œuvre beaucoup plus profonde que ce qui n’y paraît, beaucoup moins manichéenne que pas mal de séries des années 70 et 80.
Quand j’ai sorti l’album [NDLR : Capitaine Albator – Mémoires de l’Arcadia], on m’a invité dans des émissions sociopolitiques pour parler d’Albator. C’était la crise des gilets jaunes à ce moment-là et on me faisait venir pour parler d’Albator, le gilet jaune de l’espace en quelque sorte. C’est un gars qui essaye de réveiller les consciences, qui fait des actes de piraterie, qui essaye de faire comprendre que le gouvernement est corrompu.
Et c’était assez rigolo, avec le recul, de se dire que Leiji Matsumoto, le créateur d’Albator ou Captain Harlock comme on l’appelle au Japon, était vraiment un visionnaire. Il y a beaucoup de messages, comme l’écologie par exemple, dans Albator qui font écho à ce qui se passe encore aujourd’hui. Ces femmes qui sortaient des arbres que je ne comprenais pas très bien, c’est évidemment une métaphore de la nature qui cherche à reprendre ses droits car l’humain a fait n’importe quoi sur sa planète. Il y avait plein de messages comme ça que je ne comprenais pas et que j’ai pris dans la figure à mes 20 ans et qui m’a fait tomber amoureux du personnage Albator et de la série.
On était dans les années 90 et donc on n’avait pas Internet ou très peu : c’était les balbutiements d’Internet. Il fallait donc prendre son bâton de pèlerin pour faire tous les vidéoclubs de la région et trouver les cassettes vidéo. À chaque fois que je voyais un épisode, il y avait 25 questions qui naissaient et j’essayais de trouver des artbooks, des articles, des BD, tout ce qui pouvait exister. Et en fait, cette frustration, cette quête pour trouver les réponses que je cherchais, cela entrainait de nouvelles questions. Quelques réponses, mais encore plus de questions. Et ça m’a permis de découvrir vraiment toute la richesse de l’univers créé par Leiji Matsumoto qu’on appelle le Leijiverse. Il y a évidemment Albator, Gun Frontier, Galaxy Express qui est extrêmement poétique mais aussi d’autres séries super intéressantes comme Yamato. Et en découvrant tout ça, j’ai évidemment été passionné d’Albator, mais aussi de tout son univers.
Et pouvoir un jour apporter, avec beaucoup d’humilité, une petite pierre à ce qu’il a créé, je reconnais qu’en tant qu’artiste c’était un rêve de gosse. C’était vraiment un rêve de travailler sur Albator. En 2013, j’ai rencontré la directrice de Kana, Christel Hoolans, qui voulait faire un projet sur Les Chevaliers du Zodiaque et qui en l’occurrence ne s’est pas fait. Elle me demande alors si je n’ai pas autre chose dans mes tiroirs. Je lui propose Albator. Elle me dit : « Super, montre-moi ! ». À ce moment-là, je n’avais rien en fait. J’ai sorti mes papiers et j’ai dessiné tout le week-end pour que le lendemain matin, elle ait sur son bureau le fameux dossier qui n’existait pas. Et elle me répond que c’est chouette car elle partait au Japon dans deux semaines et que dans deux semaines et demie, elle mangeait avec Leiji Matsumoto. Elle me demande : « Est-ce que tu veux qu’on lui présente ? ». Moi : « alors attends, je vais réfléchir. Ouais, vas-y, vas-y, présente.«
Et du coup, elle a rencontré Matsumoto qui a une grande ouverture d’esprit sur toutes les cultures, y compris l’Europe et en particulier la France. Il avait d’ailleurs collaboré avec le groupe Daft Punk pour Interstella 5555, moyen métrage animé pour l’album Discovery. Matsumoto a adoré et a accepté le projet. Et c’est ainsi que la collection Kana Classics a démarré avec Albator.
Des séries animées cultes pour faire revivre la nostalgie des années 80
Valentin Paquot : Alexis, pour toi, pourquoi Capitaine Flam est devenu une œuvre culte ?
Alexis Tallone : C’est culte car la série nous accompagne depuis l’enfance et crée un système de valeur sur l’individu. Et c’est comme ça que, multiplié par beaucoup d’individus, on rentre dans le culte et qu’on célèbre Capitaine Flam.
Valentin Paquot : C’est marrant parce qu’on a parlé tout à l’heure d’Albator, Saint Seiya, Goldorak et de Capitaine Flam. On n’a pas de crescendo d’œuvres cultes mais on en a qui restent dans l’actualité. Saint Seiya, aujourd’hui, il y a encore des spin-off. Jérôme, toi tu as réussi à faire un deuxième rêve de gosse. Tu es l’homme qui réalise tous les rêves de gosse. Dans Saint Seiya, qu’est-ce qui t’avait marqué et qui fait que tu la portes encore aujourd’hui dans ton cœur ?
Jérôme Alquié : Saint Seiya, je suis tombé dessus le fameux 6 avril 1988. Je passe devant la télé, je vois des colonnes grecques. Je me dis que ça ressemble à Ulysse 31 qui est dans ma short list [NDLR : séries que Jérôme Alquié aimeraient adapter aux côtés de Saint Seiya et Albator]. Et ça a l’air extrêmement bien. Je regarde et non, ce n’est pas Ulysse mais un gars qui ouvre une armure en forme de Pégase. Très étonnant. J’ai regardé l’épisode, j’ai bien aimé. Puis le deuxième, le troisième et arrivent les quatrième et cinquième épisodes. Ceux qui connaissent bien les Chevaliers du Zodiaque savent que c’est le combat entre Seiyar (nom à cette époque de Seiya) et Shiryu, chevalier du Dragon. Et là, c’est quelque chose d’absolument épique. Le tatouage du dragon qui disparaît du dos de Shiryu et Seiyar qui comprend que pour sauver son adversaire il faut qu’il se relève et qu’il le refrappe dans le dos. Dans cet épisode-là, il y a une puissance et une intensité absolument incroyable. Et à partir de là, je n’ai pas raté un seul épisode de toute mon enfance et je regardais tous les mercredis après-midi l’épisode des Chevaliers du Zodiaque.
Et au-delà du plaisir en tant que fan, ces valeurs de courage et d’abnégation nous marquent. On était un groupe de potes en plus, dans la cour de récré et chacun avait un peu son rôle : il y avait celui qui était protecteur, celui qui était plutôt tête brûlée, etc. On s’identifiait donc assez facilement aux personnages. En attendant la diffusion de l’épisode suivant, on s’imaginait ce qui allait se passer la semaine suivante. C’était très frustrant mais c’était à la base de notre passion. Moi, j’étais comme un fou. Je me levais, je faisais les gestes, la constellation de Pégase et les météores. Évidemment, tout le monde me prenait pour un fou à la maison. Je le fais toujours quand j’écris mes storyboards. Je bouge, je fais des trucs. J’essaie de me débrouiller pour que je sois seul à ce moment-là. Parfois, j’ai les enfants qui descendent et qui me demandent si ça va. Je retrouve cette passion qui m’animait quand j’étais petit.
Et pour revenir à la collection Kana Classics, c’est vrai que notre objectif est en effet de transmettre les valeurs qu’on a reçu à travers ces animés cultes mais aussi de faire revivre le temps d’une lecture cette madeleine de Proust, cette étincelle qu’on avait en regardant les animes le mercredi après-midi.
Valentin Paquot : Voilà, c’est dit, un album de BD coûte moins cher qu’un pot de crème anti-rides ! Est-ce que vous pouvez nous raconter maintenant vos différentes étapes de travail ?
Alexis Tallone : Pour commencer, il faut s’immerger à nouveau dans la série. À l’annonce de Capitaine Flam, il faut une semaine avant de redescendre. Pendant cette semaine-là, on ne dort plus. On sort tous les livres, les DVD, les disques, les romans. Je me remets dedans. Je vais ingurgiter à fond. Je vais mettre aussi ce qui est lié à Edmond Hamilton. Je vais mettre aussi du Star Wars. Je vais commencer comme ça à étendre un peu tout ce qui est lié à l’univers de Capitaine Flam.
Valentin Paquot : On rappelle que le dessin animé Capitaine Flam est une adaptation de romans.
Alexis Tallone : Oui, c’est une série de romans des années 1940 écrite par Edmond Hamilton, l’un des scénaristes de Superman aussi. En fait, c’est une création américaine, qui au lieu de devenir un comics est devenu un roman, parce qu’à l’époque de son écriture, il y a eu une crise du papier lors de la Seconde Guerre mondiale. C’est ainsi resté au stade de romans et de nouvelles parce qu’à l’après-guerre, d’autres héros et d’autres sujets sont arrivés.
Et puis Hamilton, c’est resté celui chez qui on piochait les idées. De toute façon lui-même était passé à autre chose, à Superman et d’autres séries, chez DC Comics. Un petit groupe de fans du roman existe. Enfin traduits en français, on peut trouver sur Amazon par exemple les volumes de Capitaine Futur.
Valentin Paquot : Vous vous documentez. Vous réalisez un travail graphique et de recherche pour vous approprier les personnages…
Alexis Tallone : C’est ça. Après, je commence à faire des croquis. D’abord, je les représente comme ils étaient dans l’animé. Je vois avec Sylvain Runberg [NDLR : le scénariste], on regarde avec Timothée Guédon [NDLR : éditeur chez Kana] et on compare. Je commence à faire des mises en scène, des moments d’action, des petites scènes comme ça, qui n’ont rien à voir avec le scénario écrit, mais bon, voilà, on voit comment ça fonctionne.
Tout le monde a en tête le générique. Nous nous sommes dit : « on va travailler ça et on verra où ça nous amènera« . Et puis les croquis arrivent… là on commence à mélanger la culture américaine et japonaise. J’ai fait toute ma culture avec un mélange des deux, la culture américaine des années 1970 avec John Buscema, Gil Kane…
Contrairement aux autres licences sur lesquelles je travaille habituellement, où il y a un cahier des charges très précis, Timothée Guédon m’a dit que je pouvais me lâcher et qu’ils voulaient donner une nouvelle empreinte à Capitaine Flam. Tout en respectant, bien sûr, la série originale de son auteur. Et ça donne ce que certains d’entre-vous ont déjà entre les mains [NDLR : Alexis Tallone ainsi que Jérôme Alquié dédicaçaient leurs albums et il y avait du monde tout le week-end].
Saint Seiya – Time Odyssey : une véritable collaboration avec Masami Kurumada
Valentin Paquot : Et toi, Jérôme Alquié ? C’était assez facile car tu avais déjà tout pré-documenté…
Jérôme Alquié : La réimmersion, en effet, il n’y en a pas eu pour moi parce que je ne suis jamais remonté à la surface. Ce n’était donc pas difficile. Mais quand on travaille sur une licence, on a souvent un cahier des charges. Je ne vais pas parler de contraintes, mais de cadre donné par les ayants droit japonais et les auteurs, pour Albator ou Saint Seiya. Leiji Matsumoto et Masami Kurumada nous ont dit clairement ce que l’on pouvait faire et ce qui était interdit.
Pour Albator, on pouvait raconter une histoire inédite – ça tombait très bien parce que c’est ce que nous voulions faire. Il fallait aussi respecter la relation entre les personnages et qu’une histoire d’amitié ne devienne pas une histoire d’amour par exemple. Comme ce n’était pas ce qui était prévu, cela tombait bien et j’ai eu finalement beaucoup de liberté sur Albator.
Pour les Chevaliers du Zodiaque, c’est plus compliqué parce que la licence est en quelque sorte un enfant de parents divorcés. D’un côté, il y a Masami Kurumada, l’auteur qui possède les droits sur son manga. Mais aussi l’anime, qu’on a connu au Club Dorothée, les Chevaliers du Zodiaque qui est une version un peu relookée pour faire de l’animation, et qui, elle, appartient à Toei Animation pour les éléments inédits par rapport au manga. Comme le contrat est signé avec Masami Kurumada, il fallait faire attention de ne pas déborder du cadre de Masami Kurumada et rester sur le manga.
Dans Saint Seiya – Time Odyssey, nous avons voulu raconté une histoire qui puisse s’étaler dans le temps. Si on demande aux fans quels arcs ils ont préférés, pour certains, c’est les Chevaliers Noirs ou le passage des 12 maisons dans l’arc du Sanctuaire et pour d’autres, c’est l’arc de Poséidon ou d’Hadès… Nous ne voulions pas créer une histoire qui soit juste positionnée à un endroit de la saga, mais à différents moments, pour que l’on puisse voir toutes les formes d’armure. Et c’est comme ça que s’est imposé le méchant de l’histoire [NDLR : Chronos, personnification du temps] qui nous permet de faire des bonds dans le temps par rapport à l’œuvre originale.
Le pitch du projet que nous avons présenté au Japon était une série d’albums qui ne seront ni des préquels, ni des séquelles, mais des interquels, à différents moments de l’histoire originale. Le tome 1 se passe pendant les Chevaliers d’Argent. Le tome 2 se déroule après la bataille des 12 maisons contre les Chevaliers d’Or. Le tome 3, qui va sortir le 25 octobre, c’est après la bataille de Poséidon et avant Hadès, etc.
Et c’était aussi l’occasion de venir éclairer d’un jour nouveau certains faits ou certains personnages qui n’avaient pas été exploités, ou pas beaucoup, dans l’œuvre originale de maître Kurumada… soit parce qu’il avait décidé de ne pas s’en occuper, soit parce qu’il n’avait pas le temps et qu’il était parti sur autre chose. Nous rajoutons ainsi un coup de projecteur et nous étendons un peu le lore de Saint Seiya. Et tout ça, bien évidemment, avec l’accord et la validation du maître.
Ce n’est pas juste une signature en bas de la page du contrat mais bien une véritable collaboration. Nous envoyons les éléments et le scénario, nous avons des retours. Nous envoyons ensuite le storyboard, c’est-à-dire les brouillons rapides des pages, nous avons un retour. Pour les dialogues, idem et c’est souvent là où nous avons le plus de d’échanges d’ailleurs. La planche finale est aussi validée. Et toutes ces étapes sont en effet bien vérifiées par deux entités au Japon : maître Kurumada mais aussi l’éditeur Akita Shoten [NDLR : la série Saint Seiya – Time Odyssey est également publiée au Japon dans le magazine Champion Red de Akita Shoten].
Limites et règles d’une bonne adaptation en BD
Valentin Paquot : On parle d’œuvres cultes qu’il faut respecter, l’enfant qui est en vous et le lecteur. Est-ce que vous vous êtes mis des limites en terme de respect de l’univers et des personnages ? Johann Landore peut-elle ne pas être blonde dans cette version ? Peut-on lui changer sa coupe de cheveux ? Comment est-ce que vous avez abordé ces limites ?
Alexis Tallone : En fait, à la base, je suis fan déjà de ce sur quoi je travaille. Étant fan, je sais moi-même ce que je ne voudrais pas voir. Comme on me demandait d’adapter ou réadapter, la limite que je me suis fixée pour Capitaine Flam, c’est le roman. Mis à part que Johann n’est pas redevenue brune comme dans le roman. Elle a repris le caractère qu’elle avait à l’origine. Le personnage de l’agent intersidéral a été écrit par un auteur qui a travaillé sur Superman et l’univers Batman. On a plus une Black Widow qu’une Catwoman. C’est une femme de caractère, très forte. Physiquement, c’est une athlète et un flic intergalactique qui ne va pas s’émouvoir facilement. C’est une sorte de super-héroïne aussi. Je n’allais pas aller plus loin que ce que Edmond Hamilton lui-même décrivait.
Avec la liberté d’interpréter que j’avais, je me suis dit que j’allais prendre chez Edmond Hamilton ce que je trouve épatant pour quelqu’un qui ne l’a plus revu et qui aujourd’hui est adulte, ainsi que toute la partie nostalgie du dessin animé de l’époque. Voilà la frontière que je me suis mise et j’ai fait le yo-yo entre les deux. Mala, par exemple, a pris cette apparence beaucoup moins trapue. C’est un être synthétique qui se sent déjà supérieur, qui peut être très froid à certains moments. Pour faire enrager Crag, un androïde de métal, Mala fume un cigare, parce qu’il sait très bien que Crag ne peut pas le faire. Voilà le genre de petites références que j’ai pu placer.
Valentin Paquot : Vous en avez parlé, tous les deux : le public a connu ces licences avec le dessin animé, avant de connaître le manga pour Saint Seiya et les romans pour Capitaine Flam. Comment est-ce qu’on passe d’un médium à un autre ? Quelle est la plus grosse difficulté à surmonter dans le format BD, sans le mouvement, sans la musique ?
Jérôme Alquié : Alors déjà, il y a une question dans ta question qui est de savoir pourquoi nous avons choisi ce format. Et c’est fondamental parce que cela s’est joué au tout début sur Albator. Quand nous avons discuté d’adaptation, nous avions en face de nous des Japonais qui instinctivement avaient envie que l’on fasse du manga. Parce que pour eux, c’était facile après de pouvoir le sortir chez eux, et puis c’est un format qui leur parle plus que n’importe quel autre. Et nous avons tenu tête. Le choix de la BD franco-belge les a un peu affolés au départ. Nous leur avons expliqué qu’il y avait plusieurs raisons. D’abord, une raison artistique déjà, en tout cas en ce qui me concerne. Le style et les codes du manga sont parfaitement maîtrisés au Japon mais pas par moi. Je maîtrise peut-être un peu plus ce qu’il se passe en animation, mais les codes du manga, je ne les connaissais pas.
Et je leur ai dit : « vous savez, des gars comme moi, vous en avez à tous les coins de rue au Japon. Je ne vais rien vous apporter si je fais un manga : ce serait une pale copie de ce que vous êtes capable de faire. Par contre, faites-moi confiance, je connais les codes de la BD franco-belge et la mise en page en couleur d’un grand format. Je sais gérer la couleur que vous n’avez pas dans les mangas. Parce qu’au-delà de l’aspect artistique, de cette valeur ajoutée que je peux vous ramener, sachez qu’on vise, avec la collection Classics, un public qui a connu ces séries-là (Albator, Capitaine Flam, Les Chevaliers du Zodiaque) dans les années 1980 à la télévision (et pas en manga). À cette époque, il n’y avait pas de manga en France. Et donc pour raviver leurs souvenirs, il faut passer par la couleur et c’est donc ce format de BD franco-beige, que tout le monde lisait dans les années 1980, qu’il faut utiliser dans cette collection ».
C’était un bras de fer avec le Japon. Ils ont accepté un peu en reculant, jusqu’à ce qu’on envoie les premières planches et qu’ils disent : « Ah oui, d’accord, c’est vraiment super beau. Continuez comme ça ». La première réponse de Leiji Matsumoto a été : « Je vois vraiment toute la passion qui est la vôtre à travers vos images et la particularité de la BD franco-belge que lui connaissait ». D’ailleurs, il avait une grande d’ouverture d’esprit : il connaissait très bien les comics et la BD franco-belge. Il a ajouté : « Super, continuez comme ça et faites-vous plaisir en dessinant comme ça parce que cela se transmettra sans problème à votre public ».
Jérôme Alquié : Je profite du passage de la bande-annonce pour remercier infiniment Richard Barbois, la voix française de Harrison Ford, Buzz l’Éclair, le Génie dans Aladdin entre autres. À ses tout débuts de comédien de doublage, il jouait Albator dans la série Albator 1978 avec une voix beaucoup plus claire. La particularité de la collection Classics est de, bien sûr, remettre en avant des anime japonais, mais qui sont teintés de la passion des fans qui les écrivent et qui vont les lire, qui sont des fans français. Je voulais vraiment qu’on sente le côté français à l’intérieur du projet. Quand on a pensé à la création de la bande-annonce pour Albator, on n’imaginait pas quelqu’un d’autre que Richard Barbois pour faire la voix. Je l’ai appelé et il était super touché qu’on pense à lui pour un personnage qu’il avait incarné 40 ans avant.
Valentin Paquot : Tu as parlé tout à l’heure que les projets Kana Classics étaient aussi des moments de passation. C’est important, et c’est comme ça qu’une œuvre culte le reste en continuant de vivre de génération en génération. Les mœurs ont changé et le rythme narratif est plus rapide aujourd’hui que dans les années 70 et 80. Comment est-ce que vous avez adapté ces nouvelles contraintes de consommation ? Comment cela a impacté vos projets ? Qu’est-ce que vous avez enlevé ? Qu’est-ce que vous avez changé ? Alexis, si tu veux commencer sur l’exemple de Johann, plus proche du roman que de l’anime…
Alexis Tallone : Oui, voilà, déjà on ne représente plus les femmes comme on les représentait dans les années 70. Et encore, il y a de ça, mais là on était dans une série qui était destinée aux enfants et qui devait les ramener au roman. Donc c’est encore autre chose, parce que les femmes dans les séries des années 70 et 80 étaient quand même assez libres. Même si on retrouvait encore un peu de clichés, des femmes de caractère fortes et indépendantes émergeaient. Mais c’était surtout la représentation que Sylvain et moi, nous nous faisons des femmes. C’est-à-dire que, pour moi, ça n’enlève rien à la féminité d’une femme ou au fait qu’elle puisse être attirante si elle est puissante, forte, indépendante. Au contraire, ça me pousse à vouloir lui plaire encore plus, et donc à me dépasser encore plus pour lui plaire. Donc voilà comment je voyais Johann, une femme dont il faut être digne, surtout avec le background calme.
Valentin Paquot : Jérôme, si on reprend Albator, c’est un rythme de narration très éthéré, très japonais. Dans un format de BD franco-belge, il y a beaucoup moins de pages, on ne peut pas se permettre de faire passer le temps de la même manière… et de toute façon, on n’a pas la même notion de temps en tournant des pages. Comment as-tu géré cette approche, parce qu’on ressent le temps sans jamais s’ennuyer en lisant Albator ?
Jérôme Alquié : La difficulté quand tu fais une BD tirée d’un animé, c’est que tu perds l’ouïe parce qu’il n’y a plus la musique et tu perds le rythme qu’un réalisateur te donne en te mettant des images à la vitesse à laquelle il a choisi de te les faire afficher. Toi, tu lis, tu écris ta BD, mais tu es quand même à la merci de la vitesse de lecture du lecteur. La grosse difficulté est donc de gérer les moments de silence. Dans Albator 78, ce que je trouve vraiment particulier, beaucoup plus que pour Les Chevalier du Zodiaque d’ailleurs, ce sont ces moments de silence et de calme où Albator se retrouve seul, dans sa cabine ou avec Miimé qui joue de la harpe. On entend les craquements des boiseries de l’Arcadia…
Ces moments-là sont très difficiles à reconstruire en BD parce que, je ne sais pas comment vous lisez des BD mais moi, j’ai tendance à rester une heure sur les dessins. Par exemple, quand ma femme lit des BD, s’il n’y a pas de bulle, elle tourne la page. Et ça m’énerve car du coup, ça va trop vite et vous ne restez pas assez de temps. Si on a dessiné ces images, même s’il n’y a pas de bulle, c’est parce qu’il faut prendre le temps de les regarder avant de passer à la suite. C’est toute la difficulté qu’il y a, donc. Mais c’est vrai que Albator est beaucoup plus contemplatif que Saint Seiya. Il faut donc tricher un peu de temps en temps. On ajoute des bulles là où on pourrait s’en passer, ne serait-ce que pour obliger le lecteur à rester plus de temps sur cette case-là.
Et pour Les Chevaliers du Zodiaque, c’est autre chose parce qu’il y a beaucoup plus d’action ce qui demande plus de cases. Le nombre de cases est important dans une BD et il ne faut pas qu’il y en ait trop par page, ni pas assez non plus. Quand on fait une BD franco-belge, on ne fait pas un manga, et si tu veux faire 3 cases par page, tu fais du manga. Tu peux, de temps en temps, faire une super double planche, avec une grosse image, parce que c’est le climax, le boss de fin… Mais de manière générale, une page de BD franco-belge, c’est plutôt entre 5-6 cases à, maximum, une dizaine de cases. Je me rends compte que si je fais ça pour Saint Seiya, ça ne marche pas parce qu’il y a de l’action et que les mouvements sont gourmands en termes de dessin et de cases. Pour comprendre au moins la manière dont les personnages bougent, il faut des cases. C’est donc une autre approche par rapport à Albator.
Je préfère d’ailleurs dessiner du Albator contemplatif que de dessiner 25 images d’un poing qui part vers l’arrière, qui va vers l’avant et qui fait des étincelles et des météores qui partent… Les cases, de manière générale, sont plus impactantes, je trouve, sur Albator, parce que c’est du contemplatif et que je peux me faire plaisir à cadrer mon personnage à 2/3 d’un côté, 1/3 de l’autre, caser mon décor au loin, plutôt que des toutes petites cases d’action pour permettre au lecteur d’avoir cette fluidité-là. En revanche, elles sont nécessaires, parce que justement quand vous lisez, vous devez voir l’animation et la fluidité du mouvement, qui va d’ailleurs souvent se terminer sur la case suivante, voire sur la page d’après. L’idée en faisant ces BD, c’est d’apporter aux fans un 43e épisode d’Albator [NDLR : Albator 78, la première série animée compte 42 épisodes] ou un 146e épisode des Chevaliers du Zodiaque, cette madeleine de Proust qui fonctionne avec la BD.
Valentin Paquot : Alexis Tallone, tu joues beaucoup avec les angles de caméra, les changements de plans, en trichant parfois un peu avec des perspectives. C’était aussi pour guider le lecteur et rythmer la lecture ?
Alexis Tallone : C’est un peu ce qu’on apprend quand on est storybordeur. Je l’étais pour la télévision ou pour le ciné, avec Patrice Garcia. Sur une BD, on n’a pas la musique et ni les images qui bougent. Le storyboard doit donc donner une certaine musicalité. Et en étant suffisamment dynamique sur le découpage séquentiel, on a l’impression de voir bouger les personnages et on leur donne vie. On déplace la caméra tout le temps sur Capitaine Flam, qui d’ailleurs à la base devait faire 80 pages et qui en fait 160 à la fin. On a eu vraiment cette liberté où Timothée Guédon, le directeur artistique nous disait de nous lâcher.
Sylvain Runberg, le scénariste, faisait un découpage séquentiel et je disais : « Ouais mais là, si on donne justement un temps de silence comme le disait Jérôme, qu’après on démarre et qu’on l’envoie et qu’on fait ensuite une contre-poursuite, on va y gagner en impact ». Je leur faisais un storyboard et finalement, ça rajoutait 15 pages. Et ça s’est fait comme ça jusqu’à 160. À la fin, ils m’ont donc dit : « Vas-y, fais comme toi tu penses et après, on voit comment on peut arranger ça ». Et du coup, j’ai pu traiter la BD comme si je préparais un film d’animation pour que ça vive un maximum.
Analyse de planches
Valentin Paquot : Décortiquons ensemble deux planches pour montrer tout le travail, toute l’énergie mise dans ce magnifique album. Vous voyez sur les écrans cette planche qui a fini par devenir la couverture de l’album. Alexis, cette planche est incroyablement riche : vous comprenez pourquoi il faut passer une demi-heure par planche en lisant un album de BD. Quand est-ce que c’est devenu la couverture ?
Alexis Tallone : Vers la fin de l’album. On faisait beaucoup de réunions et j’avais fait quelques croquis sans savoir vers où aller. Lors d’un réunion, Christel Hoolans [NDLR : directrice générale de Dargaud-Lombard] a fait remarquer que, lorsque nous présenter le projet aux ayants droit allemands ou japonais, ils sont tous marqués par la planche 24. Elle propose alors : « Pourquoi ne pas la garder en couverture ? C’est celle qui a le plus d’impact. Pourquoi chercher plus loin alors qu’on a la couverture sous les yeux ? ».
Valentin Paquot : En tant que lecteur, quand je suis arrivé sur cette planche, j’ai été surpris par le jeu de regards. On a le capitaine Curtis qui ne regarde pas le lecteur avec un regard en biais. Pareil pour Crag et Mala. Le professeur Simon Wright n’a pas d’yeux donc c’est pas grave. Comment et pourquoi as-tu choisi qu’aucun des personnages ne fixe le lecteur ?
Alexis Tallone : Le capitaine Curtis et ses compagnons sont appelés quand il n’y a plus aucun espoir. Au-delà d’être un athlète et d’avoir toutes les qualités humaines possibles, c’est un génie et il réfléchit et analyse la situation pour résoudre le problème et savoir son origine. N’y a-t-il pas de la corruption chez les politiques qui aurait favorisé ça ? Curtis a ce regard pesant. On a le reflet de la Terre en bas, dans le coin. En gros, il veille sur ce qui se passe sur Terre. Sans vivre lui-même sur Terre, ses parents en viennent et il sait qu’il se passe plein de choses. Pendant que ses frères arrivent – oui Crag et Mala sont techniquement ses frères car ce sont des êtres intelligents et autonomes créés par ses parents et il a été élevé par ses grands-frères, qui, eux, sont beaucoup plus détendus. Lui, il est déjà sur la mission.
Valentin Paquot : Ils le rejoignent. Ça renforce le fait que Curtis ait un coup d’avance.
Alexis Tallone : On remarque que sur les planches précédentes, ils sont en train de jouer aux échecs, et de se brancher comme des frères le font habituellement. Et il les coupe. Il leur dit de venir dans la cabine, qu’ils descendent sur Terre car le Président les appelle.
Valentin Paquot : Est-ce que tu as imaginé la position des 3 personnages (Curtis, Crag et Mala) de manière séparée ou est-ce que c’était un ensemble qui se répondait ?
Alexis Tallone : Quand je fais mon croquis, j’avais l’ensemble où j’avais dessiné l’ambiance que je voulais donner et comment je positionnais les personnages. Et c’est même la première planche que j’ai faite. J’avais déjà le script. J’étais impatient et je voulais vraiment tout mettre dans celle-là. Je l’ai fait je ne sais pas combien de fois au crayon. J’ai repris chacun des personnages. Je voulais que chacun, vu que c’est la première fois dans l’album où ils apparaissent en tant que super-héros, ait un aura et l’impact le plus fort possible. En tournant la page, il fallait qu’on se dise que ce n’est pas la Team Rocket !
Valentin Paquot : C’est pour cette raison que tu as décalé la lumière qui n’est pas sur le capitaine, mais qui vient du sas pour que leurs ombres convergent.
Alexis Tallone : Curtis est dans l’ombre et plus en avant. Les autres sont éclairés par la lumière de la salle du séjour.
Valentin Paquot : On a passé que 3 minutes sur cette planche et on pourrait en passer 50. On va passer à la planche suivante, une de Saint Seiya. Cette planche est incroyable et l’album m’est presque tombé des mains. C’est l’équilibre, la limite maximale de l’intensité pour la lisibilité. Pour se situer dans l’histoire, est-ce que tu peux rappeler qui sont les 3 divinités de la première case en haut ?
Jérôme Alquié : Le personnage principal de cette histoire, c’est le Chevalier du Phénix que vous voyez avec une armure bizarrement un peu grisonnante parce qu’elle est devenue inerte dans le monde de l’Erèbe où il évolue. Dans les 2 pages d’avant, c’est la découverte du monde avec l’apparition des 3 personnages. Dans la planche, on vient les présenter d’un peu plus près. Ce sont les Moires d’où les fils qui sortent de leurs mains. Il y a Clotho, la fileuse qui tisse le fil de la vie ; Lachésis au centre qui est celle qui le déroule ; et Atropos à droite avec sa lame sur son avant-bras dont le but est de couper le fil pour marquer la fin de la vie.
Valentin Paquot : Déjà juste sur cette case, on voit leur air menaçant renforcé avec la tête de mort au fond. Les fils qui montent montrent qu’elle ne maîtrise pas seulement la vie de ce personnage mais de tout le monde. Juste après, dans la petite case, on voit que les Moires sont au-dessus de Ikki et le toisent.
Jérôme Alquié : Typiquement, sur le sur le bandeau de gauche, tu te dois de faire un Ikki dans la position un peu éloigné parce que la prise de vue c’est qu’on vient de présenter les Moires donc on se retourne et même si on est les Moires, qu’est-ce qu’on voit, même si dans la pratique, on est un peu derrière elles, entre leurs jambes, il y a cette notion de « nous te sommes supérieures » et l’image d’après d’Ikki est forcément dans la même position que le petit Ikki dans la case précédente. C’est le calme avant la tempête, avant la première attaque de Clotho. Ce que j’aime beaucoup, si on peut descendre, c’est jouer avec le bord des cases.
Valentin Paquot : On peut voir que la bulle superposée sur les deux cadres indique la synchronicité. Sur le changement de caméra, on est vraiment dans un instantané : c’est la même scène, le même moment que tu montres sous deux angles.
Jérôme Alquié : Oui, j’ai tendance à beaucoup utiliser cet artifice : peut-être trop… J’ai facilement tendance à faire sortir la bulles des cases pour la faire terminer sur la case d’après. On m’avait dit que quand on lit une BD, au tout début, on lit d’abord les textes et l’œil voit les images rapidement. Pour avoir une fluidité dans la lecture, il faut donc que la ligne que vous tracez avec toutes vos bulles passent par les choses les plus importantes dans les images. Par exemple, si vous avez des personnages qui courent de la droite vers la gauche alors que la case d’après est à droite, ça cloche. L’œil bloque sur le sens contraire. Tout ce qui peut aider à la fluidité de lecture est donc très important.
Ce que j’aime beaucoup travailler aussi ce sont les bords de cases. Regardez en bas. On a évidemment la case la plus importante qui doit envoyer du bois, avec Ikki qui porte son attaque. Il y a beaucoup de lignes radiales, des lignes de vitesse qui se créent et pointent de l’endroit d’où vient Ikki. Pour que cette image marche encore mieux, les cases qu’il y a autour, il ne faut pas qu’elles soient droites, des rectangles classiques. On peut augmenter cette puissance et cette vitesse de l’image si le bord des cases épousent, dans leurs cassures, les lignes de vitesse. C’est une astuce de mise en page très simple qui rend l’image beaucoup plus dynamique et pendant la lecture, cela va très vite, de la 1ère à la 5e image.
Valentin Paquot : Justement sur cette image de l’impact de l’attaque, tu as même choisi de désaxer un petit peu la caméra : c’est la seule qui n’est pas horizontale. Là aussi c’est pour renforcer la puissance de cet impact ?
Jérôme Alquié : Absolument.
Valentin Paquot : Voilà donc ça c’était vraiment juste 2 planches. Il y en a 160 sur l’album de Capitaine Flam. On a déjà 2 tomes de Saint Seiya et le 3e arrive très bientôt. C’est un véritable travail d’orfèvre. Je vous invite à les décortiquer lors de votre lecture. On en prend vraiment plein les yeux. Il nous reste 1 minute 30 : le temps pour une ou deux questions.
Question du public : Tout à l’heure, vous avez parlé d’Ulysse 31, c’était pour savoir si la série faisait partie de votre liste d’œuvres à adapter en BD ?
Jérôme Alquié : J’ai une liste au père Noël un peu longue mais oui, Ulysse 31 en fait partie. Alexis et moi, on a été bercés avec. Ulysse 31 a été le premier contact que j’ai eu avec la mythologie grecque. C’était la grande époque de la SF et du space opera. J’ai adoré retrouver de la mythologie grecque propulsée au 31e siècle avec des vaisseaux spatiaux. J’étais comme un fou pendant la diffusion des 5 minutes tous les soirs avant le JT de 20h.
Et donc oui, Ulysse 31 fait partie des licences que j’aimerais énormément pouvoir remettre au goût du jour. J’ai eu la chance de travailler sur les coffrets DVD, les illustrations pour un coffret de musique… Forcément, c’est l’une des premières licences dans ma short list. Il y a aussi une autre licence qui manifestement avance plutôt bien mais dont je ne peux pas dévoiler le nom. En fait, c’est 2 licences : ce sera un crossover. Vous pouvez essayer d’imaginer dans tout ce que vous connaissez comme série télé qu’est-ce qu’il y a eu avec un animateur sur les 2.
Valentin Paquot : Juste pour rappeler que sur Ulysse 31 les droits ont été bloqués pendant un moment suite à une querelle entre les 2 créateurs : Jean Chalopin et Nina Wolmark. Cela peut parfois prendre du temps pour plein de raisons qui nous dépassent. Comme le cas de Robotech pendant des décennies.
Alexis Tallone : J’ai travaillé avec Bernard Deyriès sur un projet Lupin VIII mais cela a été avorté avec la mort de Monkey Punch. Je suis graphic designer chez Prime Prod de la décoration Goldorak et de l’affiche de l’événement qui a eu lieu sur Goldorak au musée des arts japonais à Paris. On prépare des choses en lien avec Ulysse 31 mais pas en BD.
Félicitations aux lecteurs et aux lectrices qui sont allés jusqu’au bout de cette rencontre avec Alexis Tallone et Jérôme Alquié. On espère que cette retranscription vous a donné envie de lire les différentes BD de la collection Kana Classics. Que cela soit Capitaine Albator, Saint Seiya, Goldorak et Capitaine Flam dorénavant, vous devriez trouver votre madeleine de Proust des années 80 !
Pour en savoir plus sur Kana et les évolutions du marché du manga, (re)découvrez notre interview de Cristel Hoolans, directrice générale de Dargaud-Lombard :