Ranobe Hors-Série : interview de Tobikawa Bunko
À l’occasion du retour de notre chronique Ranobe, nous démarrons en fanfare avec un numéro hors-série ! Nous vous avons concocté une interview de Séverin Serres-Cambot, PDG d’une toute jeune maison d’édition française qui édite principalement dans le Light Novel : Tobikawa Bunko !
Journal du Japon : Bonjour et merci de nous accorder un peu de votre temps pour répondre à nos questions ! Pouvez-vous nous en dire plus sur la maison d’édition Tobikawa Bunko ? Sa signification, sa création, son histoire ?
Séverin SERRES-CAMBOT : Depuis mon enfance, je suis fasciné par la culture japonaise (les light novels, mangas, animés, cosplay). Nulle part ailleurs dans le monde, on peut marcher dans la rue et voir des personnes en cosplay en train de faire de la pub pour leurs librairies ou autres magasins. J’ai toujours adoré les Japonais pour leur style de vie et leur culture. Cela fait des années que je rêvais de créer enfin une maison d’édition pour faire découvrir des light novels aux Français. Les mangas sont populaires en France depuis la sortie de Dragon Ball au début des années 90, mais les light novels étaient inconnus. J’ai créé Tobikawa Bunko en 2023 dans le but de sortir des light novels en version française. Aux États-Unis, des centaines de titres sont sortis, alors qu’en France on les compte qu’en dizaine. Je voulais faire en sorte que cela change et que l’on rattrape notre retard.
Pour la signification de Tobikawa Bunko, j’ai cherché un nom accrocheur qui attire l’attention et qui diffère des autres maisons françaises. Bunko fait référence au format du même nom qui signifie « une publication en petit format (A6) vendu à un prix réduit« .
Combien de personnes composent votre équipe ?
Je suis PDG de Tobikawa Bunko et j’ai 2 traducteurs.
Pouvez-nous nous en dire plus sur vos affinités avec le Japon ? Mais aussi avec le LN ?
Je suis moi-même auteur de light novel depuis 1992. Après que mes livres aient été retirés de la vente à la suite d’une grave agression en rapport avec mon métier d’écrivain, mes light novels sortiront à nouveau en France et au Japon. En France, plus un seul de mes light novels n’était sorti depuis 1997.
Pouvez-vous nous en dire plus sur votre ligne éditoriale ?
Je sélectionne les titres qui m’intéressent, ensuite je définis le format du livre, puis le prix avec l’accord des éditeurs japonais. Les manuscrits que je reçois sont relus au moins trois fois avant que je décide de les publier. Pour moi, il est essentiel que les lecteurs apprécient le travail qui a été effectué à chaque étape de création. J’ai appris de mes erreurs au tout début de l’aventure. J’avais connu quelques couacs qui m’ont porté préjudice. Je tiens à faire en sorte que ce genre de problème n’arrivent pas à nouveau. C’est d’ailleurs pour cette raison qu’à l’avenir les livres sortiront de manière plus espacée.
Vous rendez vous sur place, au Japon, pour dénicher des titres ? Comment choisissez-vous les titres du catalogue ?
Non, je ne me rends pas au Japon. Je vais sur les sites internet des maisons d’édition pour dénicher des titres et je fais des recherches pour savoir si la saga connaît le succès au Japon. Ensuite, je vais sur Amazon Japon et sur d’autres sites de vente que l’on trouve essentiellement au Japon et je regarde les avis. En général, les avis des Japonais sont beaucoup plus sévères quand il s’agit de light novel. Moi-même, je suis souvent cette tendance vis-à-vis des critiques.
Je fais très attention au avis des Japonais. Ensuite, je regarde si la saga est sortie en série animée. Voir une saga à la télé peut être un plus pour la sélection d’un titre, surtout s’il est inconnu en Occident. Aussi, cela m’arrive de sélectionner des niches, c’est-à-dire des titres qui sont à peine sortis au Japon. En général, ce sont des light novels qui n’ont que deux, trois ou quatre tomes sortis au Japon. C’est un pari à prendre, mais cela permet de faire découvrir aux Français un titre que peut-être d’autres maisons d’édition ne prendraient pas le risque de sortir en France.
Quelles sont les étapes du processus d’édition chez Tobikawa Bunko?
- Je contacte les maisons d’édition par mail moi-même ou avec un interprète.
- Une fois les droits des livres obtenus, la maison d’édition m’envoie les fichiers.
- Je les transmets à mes traducteurs.
- En parallèle, je travaille sur la couverture et les différentes illustrations pour retranscrire les titres et les textes en français.
- Ensuite, je fais la mise en page.
- Je relis au moins trois fois le livre pour être sûr qu’il n’y a pas d’erreur ni de faute d’orthographe.
- La mise en page et la relecture terminées, j’envoie le fichier à la maison d’édition japonaise pour validation.
- Une fois que tout est validé, je mets en vente le livre le jour même ou en précommande. Tout dépend de si j’ai du retard ou non sur les dates de sortie prévues initialement.
Quel regard portez-vous sur le marché du light novel qui semble avoir du mal à décoller en France ?
C’est dommage car les LN sont des romans qui ont un réel potentiel commercial. Le problème en France, c’est que les maisons d’édition décident de les sortir comme s’il s’agissait de romans occidentaux. Certes, les charges en France sont plus élevées qu’au Japon, mais cela ne justifie pas les prix français.
Je vous donne un exemple. Au Japon, il y a deux formats auxquels ces livres sortent. Le premier est de 128 x 188 mm vendu en moyenne 1 480 ¥ (environ 9,53 €) et le second, qui est de loin le plus répandu est le format A6 vendu en moyenne 759 ¥ (environ 4,89 €). Les livres que je sors en format numérique font le même format que la version japonaise. C’est pour cette raison que lorsque j’ai sorti la version française du light novel La rédemption d’Adel, la Sainte Épéiste tome 1, les gens furent étonnés du prix de vente de la version numérique (4,99 €). C’est simplement que je me suis appuyé sur le prix et le format japonais. Je n’ai pas pu le mettre au prix japonais (683 ¥ soit environ 4,40 €) à cause des charges, mais je m’en suis rapproché. Il faut savoir qu’un light novel est essentiellement lu par des adolescents. Si vous montrez à un jeune ado deux light novels, un à 13,90 € et le second à 5,90 €, il choisira toujours celui à 5,90 € car financièrement, c’est plus intéressant. C’est là le gros défaut des light novels en France : le prix est trop élevé. Quand j’ai sorti Dans un autre monde avec mon smartphone tome 1 en format papier, la maison d’édition m’a imposé le format A5 et le prix de vente à 13,90 €, ce que je trouve très élevé par rapport au prix japonais (1 485 ¥ soit environ 9,56 €). Pour le tome 2, je compte bien sortir le livre sous un autre format (le même que le japonais) que je pourrais vendre 9,90 € en France.
Y-a-t-il une licence qui vous tient ou tenait particulièrement à cœur et que vous aimeriez, auriez aimé ou dont vous avez aimé vous occuper ?
Dans un autre monde avec mon smartphone est de loin l’une de mes sagas préférées. Cela faisait des années que je rêvais de l’obtenir. Je possède la version anglaise et mon rêve était de voir cette saga en version française. C’est pourquoi, quand j’ai créé ma maison d’édition, c’est la première saga que j’ai réussi à obtenir. Ensuite, il y a une saga que je trouve extraordinaire et que j’aurais aimé obtenir, c’est Sword Art Online. C’est l’une des meilleures sagas de light novels de ces 20 dernières années.
Quels sont vos futurs projets ?
Il y aura bientôt en vente :
En Light Novels (Format numérique uniquement) :
– Magan to Dangan wo Tsukatte Isekai wo Buchinuku! tome 1, 2, 3
– Itsudemo Jitaku ni Kaerareru Ore Wa, Isekai de Gyoushounin wo Hajimemashita tome 1
– Dan Katsu (ゲーム世界転生〈ダン活〉) tome 1, 2, 3, 4, et 5 format papier et numérique.
– 最強スキル《弱点看破》tome 1
En Manga (Format numérique uniquement) :
– Tout en pouvant rentrer chez moi quand je veux, je suis devenu marchand dans un autre monde ( いつでも自宅 ) –
– Holy Knight’s Dark Road (「聖なる騎士の暗黒道」)
– Death Ball ( デスボール )
– The Master of Ragnarok & Blesser of Einherjar ( 百錬の覇王 )
– The Demon King Tamer’s Strongest Domination ( 魔王使いの最強支配 )
– Revenge Magia ( 魔術破りのリベンジ・マギア )
Quels sont vos objectifs pour cette rentrée et fin d’année ?
Deux nouvelles sagas sortiront d’ici la fin de l’année.
– Réincarné en pomme (林檎転生)
– Un jeune homme rêveur et réaliste (夢見る男子は現実主義者)
Nous vous laissons le mot de la fin !
Je tenais à vous remercier pour l’attention que vous portez à ma maison d’édition. Tobikawa Bunko est une jeune entreprise qui a du mal à se faire connaître. Les ventes des livres sont là pour le prouver. Alors vous ne pouvez pas imaginer le bonheur que cela m’a procuré quand vous m’avez contacté. Je tenais à vous remercier d’avance pour parler de mes livres qui sont publiés actuellement et qui le seront à l’avenir.
Nous tenons à remercier encore une fois les éditions Tobikawa Bunko pour cet entretien ! Vous pouvez retrouver son actualité sur leur site internet ou encore les suivre sur Instagram, Facebook et X.