Nintendo World Championships : Retour dans les années 90 avec la Switch !

Dans les années 1970-80, les jeux vidéo n’avaient pas la notoriété actuelle ni une bonne réputation. Internet n’était pas encore démocratisé dans tous les foyers et les jeux proposant un mode multijoueur n’étaient pas légion. Quand c’était le cas, les joueurs devaient être présents devant la même console et disposer de plusieurs manettes, si bien sûr les parents voulaient bien acheter le nécessaire ou si l’on en avait le budget. Les astuces et soluces étaient obtenues dans des magazines spécialisés, en discutant avec des copains ou auprès d’opérateurs consacrés à ce domaine. Avec Nintendo World Championships : Nes Edition, le 10e art rend hommage à cette époque, celle où les développeurs disposaient de moyens limités et les joueurs d’une incroyable inventivité pour contourner les règles établies. Mais pour mieux comprendre l’engouement autour des tournois de jeux vidéo, recontextualisation ce premier tournoi Nintendo et développons le concept de speedrunning.

Comprendre les joueurs des années 1970-80

Avant de connaître leur notoriété actuelle, les jeux vidéo n’étaient pas vus d’un bon œil. Plusieurs étiquettes collaient aux machines comme aux personnes s’y intéressant : infantile, masculin, violent, obsédant, abrutissant, ou encore sous-culture. Le public cible des éditeurs était surtout la gente masculine, et dans un premier temps les adultes. La technologie était associée à des appareils compliqués à prendre en main et à en comprendre les composants, tel l’ordinateur. Pourtant, l’intérêt grandissant des jeunes joueurs et d’un public toujours plus large démontra que les jeux vidéo pouvaient s’adresser à la famille. Des développeurs indépendants et des fans astucieux parvinrent à concevoir leurs propres univers ou à détourner les codages d’autres jeux.

Bien que des journalistes et des psychologues reconnaissaient des bienfaits aux jeux vidéo, ils étaient minoritaires dans le champ médiatique. Dès l’arrivée des bornes d’arcade, leur consommation était perçue comme détournant les joueurs du monde réel, aussi bien des relations humaines que du système scolaire. Les personnes travaillant dans le milieu du jeu vidéo, dans leur conception ou leur vente, étaient mal vus s’ils y prenaient du plaisir… pourtant, des magazines et des émissions TV réussirent à captiver ce public, mais plus ou moins efficacement selon le regard qu’ils portaient eux-mêmes sur leur audience.

Dans cet environnement, être geek revenait à être mis à l’écart (seul ou avec un groupe marginalisé). On préférait ne pas se vanter et ne rien laisser transparaître, ou on assumait ses goûts au risque de brimades, ce qui renforçait l’idée que les joueurs s’isolaient et se coupaient du reste du monde ou qu’ils transposaient leurs univers imaginaires partout autour d’eux (vêtements, chambres, langage…). Un autre défaut était alors reproché aux joueurs : négligés, comme quoi il étaient trop absorbés par leurs jeux pour se préoccuper de leur apparence physique (notamment l’hygiène) ou de leurs relations sociales (études, mariage, travail…).

Les moyens de communication limités empêchaient les fans de jeux vidéo de partager leur passion plus loin que leur entourage proche et les consoles de l’époque les obligeaient à se réunir physiquement pour y jouer ensemble ou au moins partager le même écran. Ainsi les annonces d’évènements consacrés à leur passion incomprise ne laissaient pas les joueurs indifférents ni les médias, curieux quant à ce « phénomène de mode » ratissant de nombreux intéressés. Les tournois permettaient à des fans d’une même région de se rencontrer autour de leur sujet de prédilection. Être entouré d’autres passionnés leur permettant surtout de s’exprimer sans craindre de diffamation. Bien que les jeux vidéo continuent de subir des brimades, ils ont aujourd’hui gagné plus de reconnaissance permettant de créer des liens entre les fans de divers continents et entre les générations de joueurs.

Histoire des tournois Nintendo

Pour le 100e anniversaire de Nintendo, la compagnie avait organisé au Canada sa première série de championnats à échelle nationale en 1989 et 1990. Rebaptisé de Nintendo Challenge Championships à Nintendo World Championships, le tournoi eut cependant lieu uniquement aux Etats-Unis. Des joueurs se sont affrontés en mars dans chacun des 29 états pour en démarquer leurs champions. Il existait trois catégories distinctes : 11 ans et moins, 12-17 ans, puis 18 ans et plus.

Les finalistes se rencontrèrent pour la finale en décembre au Universal Studio Hollywood (Los Angeles, Californie). Les concurrents devaient alors utiliser une cartouche spéciale contenant trois mini-jeux personnalisés adaptés pour la Nintendo Entertainment System (NES). Les jeux les plus populaires furent alors sélectionnés : Super Mario Bros. (1985), Rad Racer (1987) et Tetris (1989). D’autres tournois Nintendo eurent lieu, tels le Nintendo Campus Challenge (1991 & 1992) auprès de facultés américaines ou le Nintendo Powerfest’94 (1994) pour mettre en avant cette fois-ci la Super NES. C’est en 2015 puis en 2017 que se reproduiront officiellement les Nintendo World Championships.

En quoi consistaient les épreuves de chaque tournoi ? Avancer le plus rapidement et le plus efficacement possible dans chaque jeu pour grapiller le plus de secondes possible. Chaque saut de Mario devait être précis. Le moindre virage dans Rad Racer devait être négocié avec justesse. Toutes les pièces de Tetris devaient s’assembler avec ingéniosité. Les joueurs devaient être précis dans leurs actions et ne pas laisser le moindre imprévu les perturber. La concentration et le parfait contrôle de leur manette était de rigueur !

Pour celav il fallait connaître toutes les mécaniques de chaque jeu sur le bout des doigts, tels les mouvements des ennemis, l’emplacement des plateformes, les cachettes des bonus comme des malus, les touches des manettes et les capacités de notre personnage. Le soucis du détail était très rigoureux, qu’il s’agisse de la distance parcourue par un saut de Mario selon le temps de pression sur la flèche directionnelle ou de prévoir ses déplacements de blocs de Tetris plusieurs tours en avance ! Les joueurs les plus expérimentés pouvaient terminer un niveau ou tout un jeu en un temps record voire en se donnant des challenges pour rajouter de la difficulté puis partager ses exploits à large échelle.

La course à la prouesse inégalable

Le speedrunning consiste simplement à finir un jeu (ou de parvenir à une étape précise) le plus rapidement possible. Dans le jeu Nintendo World Championships : Nes Edition, il s’agit de remplir une mission dans un jeu donné en étant chronométrée. Des niveaux de difficulté par épreuve et des notations quant au temps écoulé permettent aux joueurs de s’auto-évaluer. Il va falloir, par exemple, atteindre un item en hauteur avec Samus (Metroid), obtenir un pouvoir en gobant un ennemi avec Kirby, avancer dans les pièces d’un donjon avec Link (Zelda) ou encore viser une cible précise avec l’arc de Pit (Kid Icarus)

Il est tout à fait possible de débloquer des nouvelles missions toujours plus complexes sans réussir les plus faciles. La possibilité de refaire chaque épreuve autant de fois qu’on le souhaite laisse le droit aux erreurs et aux expérimentations. Le jeu invite les challengers à revoir la meilleure performance passée pour étudier ses propres stratégies et surtout à se familiariser avec les possibilités physiques de leurs personnages. Il est possible de se mesurer contre ses amis ou sa famille en local jusqu’à 8 joueurs ! Ou en ligne face à des joueurs du monde entier pour mesurer sa propre performance.

Les personnes n’étant pas familières avec le rétrogaming découvriront les commandes alors limitées des consoles des années 1980-90, ce qui nous fait mieux rendre compte des évolutions techniques apportées par chaque nouvelle génération. Pourtant, beaucoup de speedrunners continuent de s’essayer à de vieux jeux pour y découvrir toujours plus de secrets et d’astuces ! Les joueurs avides de parties pimentées n’hésitent pas à se donner des contraintes, qu’il s’agisse de jouer les yeux bandés ou en n’exploitant pas certains objets.

Pourquoi se donner pour mission de compliquer son avancement ? Pour réinterpréter le scénario initial de ses jeux préférés, ce qui permet aux joueurs de s’y adonner sans s’en lasser, même après plusieurs parties cumulées en peu de temps. Ils peuvent aussi ainsi tester leur maîtrise exacte des codes programmés et des bugs pouvant les aider dans leurs aventures. Les challengers chevronnés ne cessent de découvrir et de partager leurs découvertes, parfois non-prévues par les créateurs eux-mêmes, ce qui permet des communautés de speedrunners, des forums d’échanges, des lives Twitch et des tournois rassemblant autour de ces disciplines très exigeantes.

Grâce à Nintendo World Championships : Nes Edition, les joueurs peuvent s’initier puis se perfectionner dans des extraits de jeux nostalgiques. Des options sont mises en place pour l’aider dans sa quête de temps rentabilisé. Mais le jeu veut surtout permettre aux joueurs de s’affronter autour des mêmes challenges entre amis, en famille ou en ligne, ainsi ils peuvent mesurer leurs niveaux et discuter entre eux quant à leurs améliorations. Les speedrunning poussent les joueurs patients et méticuleux à connaître leurs propres limites physiques et psychiques pour exceller dans leur domaine. Il n’est pas seulement question d’avoir des réflexes surhumains, des analyses poussées ni des prévisions exactes. Selon les jeux, il peut être aussi question de probabilités ne pouvant être prédites et d’imprévus ne pouvant être quantifiés ! C’est alors la chance qui vient récompenser les joueurs les plus émérites. Ainsi les challenges techniques et les tournois fédérateurs ont toujours permis aux fans de jeux vidéo de s’améliorer et de surtout s’amuser ensemble.

Marie jenck

Bien que touche à tout, je tend à me spécialiser dans les articles consacrés à la cuisine japonaises ou aux jeux vidéos. Si j'ai l'occasion de mettre en avant la licence Pokémon, l'amour des japonais pour la Normandie (et vice-versa) ou des sujets insolites ; comptez sur moi pour vous régaler en articles passionnants de gens passionnés.

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