Japan Expo 2024 : le renouveau des artisans sur Wabi Sabi

À Japan Expo, tout festivalier se doit de visiter l’espace Wabi Sabi. Comme chaque année, c’est avec plaisir que nous déambulons dans les allées de la zone traditionnelle, à la découverte ou redécouverte de l’artisanat japonais. Pour cette 23e édition de Japan Expo et la 14e année de présence de Wabi Sabi au salon, il y a eu pas mal de changement… qui ne sont pas pour nous déplaire !

Décoration en hauteur, à l’entrée du pavillon Wabi Sabi avec à droite l’affiche de la 14e édition sur le thème « Indigo » ©Japan Promotion

Voir la vie en bleu avec l’indigo

Cette année, le thème était l’indigo. D’habitude, ce thème n’est pas forcément respecté à la lettre mais, pour cette édition, il y avait une belle sélection de produits teints à l’indigo ou autres couleurs obtenues avec des pigments naturels. Voici 5 entreprises en lien avec l’indigo.

L’atelier de teinture Chizu Blue

Chizu Blue est une coopérative créée en 2005 et gérée par des femmes fabriquant des produits teints à l’indigo de manière traditionnelle et à la main. Dans leur atelier lumineux, au cœur des montagnes de la ville de Chizu (Tottori), elles cultivent des plantes d’indigo à partir de graines. Elles séparent les feuilles et les tiges d’indigo pour fabriquer la teinture et teindre le tissu à la main. Elles vendent des vêtements (blouses, chemises, pantalons, robes…), des accessoires (écharpes, sacs, chapeaux) mais aussi des tenugui et furoshiki avec différents motifs.

©David Maingot pour Journal du Japon

TSUMUGI, du papier transformé en fil de papier puis en tissu

TSUMUGI recycle les emballages en papier de Kit Kat par exemple, ou encore le bois éclairci inutilisé provenant de l’entretien forestier en fil de papier. Il était possible d’essayer la teinture à l’indigo et de repartir avec sa réalisation : un mouchoir teint avec le pochoir de son choix. Des sacs et des tenugui étaient aussi en vente sur le stand.

SUDAKU, le cuir teinté à l’indigo

SUDAKU est la boutique d’un maroquinier située à Kyoto, le long de la rivière Kamo. L’atelier de cuir effectue des commandes personnalisées et des réparations de produits en cuir, mais vend aussi des créations originales comme le sac banane triangulaire pouvant contenir une bouteille de vin. Sur le stand, on pouvait aussi acheter des boucles d’oreilles avec des chutes de cuir et des portefeuilles notamment.

SAK, des cravates et broches recyclées

SAK recycle et réinvente les kimonos traditionnels japonais en fabriquant avec la soie des pièces uniques, des cravates et des broches aussi bien vintage que modernes, alliant esthétiques japonaise et occidentale. Pour le festival et respecter le thème de cette année, la tie designer UHI a lancé une collection de cravates BORO en utilisant du tissu vintage teint à l’indigo. À Journal du Japon, on salue l’effort de se démarquer et d’associer kimono japonais avec univers masculin, sa cible principale… même s’il y avait aussi des cravates et des broches pour les femmes.

©David Maingot pour Journal du Japon

Kahon, une famille d’ours au naturel

Kahon est une marque familiale qui réunit trois générations créant des coussins en forme d’ours. On trouvait aussi des boucles d’oreilles en fleurs artificielles teints avec des colorants extraits de plantes naturelles comme le café, les oignons et l’indigo plus traditionnel. Le nez de la peluche est en poils d’alpaga. La tête et l’intérieur sont en laine et chaque peluche est unique en son genre.

Fukushima Kawaii Kogei, l’artisanat de Fukushima bien représenté

L’accident nucléaire survenu le 11 mars 2011 à Fukushima a frappé de plein fouet tout le département. Avec le projet Fukushima Kawaii Kogei, deux hommes ont lancé un défi à 15 artistes et artisans de la région : produire de nouveaux objets mignons et adorables sur le thème du kawaii.

Carte de Fukushima avec la localisation des différents artistes et artisans de Fukushima Kawaii Kogei organisé par Fukushima Central Television
Sebastian Masuda (à gauche), le conseiller créatif et Toshiaki Kawamata (à droite), le producteur général de Fukushima Kawaii Kogei

De 2000 à 2015, le producteur général Toshiaki KAWAMATA a produit de nombreuses expositions d’art et design japonais au Japon et dans le monde (Milan, Londres, Paris, New York). Depuis 2017, il supervise le projet de production d’art traditionnel créatif à Fukushima. Directeur artistique du clip PONPONPON de Kyary Pamyu Pamyu et producteur du Kawaii Monster Café, Sebastian MASUDA a fait connaître la culture kawaii à travers tout le globe. Le conseiller créatif est nommé ambassadeur culturel par l’agence pour les affaires culturelles du Japon en 2017.

©David Maingot pour Journal du Japon

Les akabeko du studio Hitarito, objets d’art traditionnel de la ville de Yanaizu (Aizu), avaient fait le déplacement jusqu’à Paris. Aka signifie rouge en japonais et beko vache dans le dialecte régional du Tôhoku.

La légende raconte que ces « vaches rouges » protègent des catastrophes et des maladies. Il y a de cela 400 ans, le temple Enzo-ji à Yanaizu s’effondra à la suite d’un tremblement de terre. Pour aider à la reconstruction du temple, les villes en amont de la rivière Tadami offrirent du bois en abondance. Cependant, pour les habitants et leur bétail, il semblait impossible de transporter tous ces matériaux sur la colline. Une grosse vache rouge apparut et des vaches portèrent rapidement le bois de la rivière au temple à reconstruire.

Pour Japan Expo, il y avait donc les motifs classiques (rouge et blanc)… Et pour coller au thème et les rendre kawaii, la robe des vaches était aussi disponible en rose et blanc. Petite et en papier mâché, c’était parfait pour repartir avec un objet typique de la région !

La laque utilisée au Japon depuis plus de 10 000 ans au Japon, remontant à la période Jômon, était aussi de la partie. Fondée en 2010, la marque NODATE produit des ustensiles du quotidien, pour se ressourcer dans la nature ou en camping.

L’atelier Ikariya qui perpétue la tradition depuis 13 générations à Namie (à Shirakawa depuis la catastrophe de 2011) présentait la poterie Ôbori Sôma. Il y avait des assiettes sous la forme d’une dorade, symbole de prospérité dans la cuisine traditionnelle japonaise.

©David Maingot pour Journal du Japon

HARAPPA est l’héritier de la manufacture textile Harayama fondée en 1899. Elle produit la toile traditionnelle d’Aizu connue pour sa durabilité. De la teinte des fils à la couture, en passant par le tissage, le coton d’Aizu est depuis plus de 4 siècles dans le quotidien des habitants de la région. La manufacture et marque s’efforce de conserver ce savoir-faire tout en concevant de nouveaux produits s’adaptant à notre train de vie moderne.

L’atelier KAGURA KOUBOU Hashimoto produit et restaure des masques employés lors de fêtes traditionnelles. Sur le stand, il y avait des articles de maroquinerie de la marque TOKU employant des techniques comme la laque et les feuilles d’or.

On peut observer sur la photo de droite les tasses à thé noires de l’atelier de poterie Ôbori Sôma Matsunaga fondé en 1910 et qui s’est relocalisé à Nishigô. Il compte bien faire perdurer son héritage pour les 100 prochaines années au moins.

Impossible de ne pas craquer pour les daruma, ces figurines porte-bonheur faites à la main en papier à Shirakawa, par Shirakawa Daruma Sohonpo, et appréciées depuis plus de 3 siècles.

TESORO. accessory donne une nouvelle vie aux fragments de poteries Aizu Hongô, jarankake, qui ont presque 100 ans. Sortis de terre, les morceaux sont reliés entre eux avec la méthode traditionnelle de réparation de porcelaine kintsugi pour créer des bijoux élégants.

EQmade crée des décorations d’intérieur en mélangeant les cordes sacrées shimenawa des sanctuaires shintô, les fleurs et le mizuhiki, l’art japonais de nouer des fils fins de papier dans le but d’apporter paix et prospérité. Urushi art labo NUKU est un atelier de Fukushima qui récolte la résine de laque l’été pour créer ensuite des produits comme des baguettes ou des bols. L’établissement NUNOBUN, de longue date à Aizu-Wakamatsu, produit depuis 4 générations des laques d’Aizu c’est-à-dire l’une des trois grandes laques du Japon. Il y avait aussi les tatamis japonais traditionnels de KUBOKI TATAMI, marque spécialisée fondée en 1740.

Obori Soma ware Tokichiro Kline, l’atelier du potier Tôkichiro 10e du nom, exposait quelques poteries. Il avait été sélectionné pour l’exposition d’art japonais Nitten et le projet de soutien aux artisans organisé par la société Lexus. Originellement, l’atelier était situé à Namie mais à la suite du grand séisme, il s’est installé à Iwaki. Depuis cette année, l’artisan produit dans ces deux ateliers grâce à son retour à Namie.

Dans la ville de Kôriyama se trouve un village d’artisans de figurines en papier mâché de plus de 300 ans appelé Dekoyashiki. Pour Japan Expo, l’atelier Daikokuya était présent et présentait des broches représentant les douze signes du zodiaque chinois ainsi que des bijoux.

SAIEI ORIMONO est fière de fabriquer l’étoffe la plus fine du monde depuis mars 2012 avec la commercialisation de Fairy Feather (« plume de fée« ). La région de Kawamata dispose en effet d’un grand savoir-faire dans le tissage de soie fine. De grandes marques de luxe européennes sont d’ailleurs des clients de la société qui a créé sa propre marque SAIEI SILK.

©David Maingot pour Journal du Japon

De beaux bijoux à offrir ou s’offrir

-RaluMother- fabrique différents accessoires en résine, de la broche jusqu’à la figurine. Le point commun de toutes les créations : le motif de fleur de cerisier. La créatrice est en effet originaire de Himeji dont le château de la ville est particulièrement apprécié lors du Hanami, lorsque les cerisiers sont en fleurs.

Warabi proposait divers colliers et boucles d’oreilles. Il y a avait des grues porte-bonheur mais aussi des bijoux rappelant la mer et les eaux turquoises avec des animaux marins comme des tortues ou des dauphins par exemple, incrustés à l’intérieur. Ça donnerait envie de prendre l’avion et de faire de la plongée à Okinawa, non ?

La créatrice de Big Land apprécie la nature et utilise pour créer des accessoires des matériaux naturels comme des pierres et des cornes de buffle abandonnées. Sur son stand, on pouvait ressentir les multiples destinations de voyage qui l’ont inspirée… aux États-Unis notamment avec une ambiance western avec les fers-à-cheval et les cornes.

©David Maingot pour Journal du Japon

Si vous aimez les pierres colorées du monde entier, les bijoux de WOL devraient vous plaire. À travers ses créations, principalement des boucles d’oreilles, l’artisane souhaite faire ressortir tout le charme et l’énergie des pierres naturelles. Pour Japan Expo, une série de bijoux en lien avec la japanimation avait été élaborée : les boucles d’oreilles du magicien Hauru du Château ambulant et celles de Frieren par exemple se sont vendues comme de petits pains !

©David Maingot pour Journal du Japon

Funaki Wood Works crée des bijoux naturels, à la fois simples et complexes, en utilisant les techniques du kumikozaiku, art japonais qui consiste à tailler le bois pour que les pièces s’emboîtent les unes avec les autres sans clous. L’artisane cherche à ramener l’artisanat de l’habitat traditionnel japonais dans la vie quotidienne des Japonais mais aussi des visiteurs à Japan Expo qui ont pu découvrir une merveille de technicité et d’élégance !

Des accessoires pour la coiffure et des kimonos transformés

Atelier Hally recycle des kimonos pour les transformer en sacs, chemises et d’autres créations avec les motifs élégants des anciens vêtements traditionnels japonais qui dorment aujourd’hui malheureusement dans des placards. L’artisane couturière prend aussi des commandes pour créer l’objet de vos rêves.

©David Maingot pour Journal du Japon

Les épingles à cheveux de la marque kudk sont soigneusement cousues point par point par l’artisane Kudo Kana formée à l’AFEDAP, école de joaillerie à Paris. Un magnifique bijou en motif fleuri ou en grue, symbole de chance et de longévité, pour une coiffure unique et personnalisée lors d’une cérémonie de mariage !

Sur le stand de cuore, on pouvait admirer et acheter des fleurs plus vraies que nature (hortensias, tournesol, lycoris) en ornements pour cheveux mais aussi comme décorations d’intérieur. Leurs couleurs et leur transparence sont mises en valeur selon la lumière : un beau spectacle pour les yeux ! Des commandes spéciales pour les cérémonies de mariage sont ouvertes aussi.

©David Maingot pour Journal du Japon

Nous remercions toute l’équipe de Japan Promotion ainsi que les différents stands du pavillon Wabi Sabi pour leurs explications, leur temps et leur disponibilité. Le temps passe vite dans l’espace traditionnel japonais et comme chaque année, on ne peut pas vous montrer tout le monde mais une chose est sûre, tous les ans, les artisans sont toujours heureux d’expliquer leur artisanat et les techniques qu’ils mettent des années à maîtriser. Même si le pouvoir d’achat est attaqué à cause de l’inflation, il est toujours possible de repartir avec un petit souvenir pas trop cher. Il y a vraiment pour toutes les bourses. A l’année prochaine pour de nouvelles découvertes !

David Maingot

Responsable Culture à JDJ et passionné de la culture et de l'histoire du Japon, je rédige des articles en lien avec ces thèmes principalement.

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