Japan Expo 2024 : l’heure du bilan
Du 11 au 14 juillet 2024, le plus grand salon d’Europe dédié au Japon, sa culture et ses loisirs était de retour Parc des Expositions de Paris Nord Villepinte. Une partie de l’équipe de Journal du Japon s’est rendue sur place et voici leurs impressions dans ce bilan de Japan Expo 2024 !
Tatiana : un salon qui se cherche
Après une pause à cause du Covid-19, le salon a bien du mal à trouver une nouvelle dynamique. Ainsi, il se concentre sur ce qui a toujours fonctionné sans prendre de risque. Le pouvoir d’achat en baisse, les jeux olympiques, la pluie n’ont pas aidé pour la venue des artistes japonais encore frileux.
Du côté des invités J-music, ils sont pour la plupart venus plusieurs fois ces dernières années. C’est bien de remplir des scènes durant quatre jours, mais peut-être faudrait-il investir dans quelques grands noms pour créer l’événement plutôt qu’un simple remplissage. Les deux grosses têtes d’affiches sont Psychic fever from Exil tribe et Tetsuya Komuro. Les premiers même s’ils ont buzzé sur TikTok sont encore peu connus. Quant au « King de la J-pop », il est surtout connu des vieux de ma génération. Leurs prestations ont été réjouissantes et nous ont offert un panel exaltant de deux générations de la J-music.
Les invités japonais se sont fait discrets. Ils n’ont pas fait toujours l’unanimité auprès des amateurs de manga car pas aussi prestigieux que ce que nous avait habitué Japan Expo. Malgré tout, ils se sont pliés aux exercices des conventions avec des dédicaces et des conférences. Pour cette édition seulement cinq artistes japonais. Nous avons pu rencontrer : Yûgo Kobayashi, le dessinateur d’Ao Ashi (Mangetsu) ; Tetsuhiro Hirakawa, le mangaka de Nine Peaks (Ki-oon) ; Fe, la dessinatrice de Love of Kill (Vega-Dupuis) ; ainsi qu’OWAL, la mangaka Boys’ love (Les fantaisies du roi – Editions Hana) ; et pour finir la trop discrète Yui Kikuta (Bibliophile princess – Nobi Nobi). Ce n’est pas mieux pour l’animation. Seule petite surprise, la venue de deux seiyuu : Natsuki Hanae et Saori Hayami. Aniplex a eu une excellente idée de les faire venir.
Cette édition de Japan Expo a été l’occasion pour moi d’animer ma première scène avec la conférence de Fe. Cela a été une expérience enrichissante surtout qu’il s’agit d’une autrice chère à mon cœur.
Ils peuvent remercier les éditeurs de manga qui se sont pliés en quatre pour proposer des tas de petits cadeaux lors de l’achat d’un ou plusieurs mangas. Ils proposent aussi des jeux sur les stands en rapport avec leurs séries, toujours amusants et pertinents. La fréquentation, en baisse cette année, a permis aux allées d’être plus respirables que d’habitude. Un mal pour un bien en quelque sorte.
Je suis en revanche assez déçue par l’exposition Tokyo Revengers assez vide à part les fac-similés des planches et quelques photo call. Il y avait bien trop d’espace dans cette exposition, tout ce qui manquait à celle du stand de l’anime Demon Slayer.
Aussi surprenant que cela puisse paraître, j’ai aimé cette édition 2024 : des artistes accessibles, des grands et des petits noms, une programmation éclectique, des stands bien fournis… Peut-être sommes-nous tous trop blasés et qu’on doit simplement juste profiter des bons moments. En revanche, du côté des professionnels, les retours sont assez négatifs. Ils font grise mine à cause de la baisse de fréquentation du salon. Mais une chose est sûre, on se donne rendez-vous l’année prochaine.
Léo : le Japon de la pop culture et des traditions (presque) sur le même pied d’égalité
Depuis des années, la plupart des conventions « Japon » se succèdent partout en France en valorisant à foison et à raison l’univers du manga et de l’animé mais oublient (trop souvent) que le Pays du Soleil Levant ne se résume pas qu’à des clichés. La troisième puissance regorge de traditions fortes qui mériteraient d’être mises en avant par ceux qui prétendent aimer la culture nippone.
Pour cette 23e édition, les organisateurs de Japan Expo se sont démarqués de leurs confrères en faisant cohabiter les activités traditionnelles et pop-culture de manière presque égale. J’ai été très agréablement surpris que les sports japonais et les arts martiaux soient présents en nombre dans le contexte des Jeux Olympiques. Les visiteurs ont eu l’occasion de s’initier à l’aikibudo, au base-ball ou encore au tenshin. Quelque soit les disciplines, beaucoup de personnes ont montré de l’intérêt et les professeurs ont eu à cœur de transmettre leurs passions.
Le saké (à consommer avec modération) a également été mis à l’honneur avec un certains nombres de brasseurs désireux de faire découvrir une variété non négligeable, des plus classiques aux plus fruités, il y en avait pour toutes les sensibilités. J’ai également eu là plaisir de revoir nouveau les représentants japonais de Fujiyoshida et de Saitama qui ont toujours autant d’énergie à exposer les atouts de leur région. Comme d’habitude, de très belles représentations avec des instruments traditionnels comme le shamisen à l’espace Wabi Sabi sont là pour nous faire oublier le bruit ambiant de la convention.
Cependant, ces bons moments ne m’ont pas empêchés de repérer quelques points plus ou moins fâcheux. Premièrement, je me suis interrogé sur l’utilité d’installer une file d’attente au pop-up store de Nintendo. En ayant parcouru d’autres boutiques populaires (Glénat, Celio….), qui n’avaient pas instaurés ce type de mesure, l’affluence était aussi conséquente que chez le géant japonais du jeu vidéo. La file d’attente pouvait atteindre une heure, digne de l’attraction Space Mountain à Disneyland Paris. Enfin, le porte-monnaie des visiteurs a dû faire face aux prix assez élevés des produits dérivés. Comptez environ 9€ pour un stylo de l’univers Mario Bros ou environ 35€ pour un t-shirt Nintendo.
Pour finir, certains stands de nourriture faisaient visiblement parti des nominés dans le concours « Lépine des produits/services les plus cher » . Afin de donner un exemple concret, un stand qui se trouvait au niveau du village Cosplay proposait un donburi à 18€ ou encore des takoyaki à 14€. Sans compter bien sur les boissons et les desserts où l’addition dépasserait largement les 30€. Les prix paraissent disproportionnés comparé à ceux pratiqués dans des restaurants japonais à Paris ou Londres. Une chose est sûre plusieurs porte monnaies auront souffert pendant ces quatre jours !
Le juste équilibre entre le traditionnel et le contemporain a été trouvé mais peut encore être perfectible !
David : un vendredi plus calme et un vent de fraîcheur à Wabi Sabi
Avec seulement 200 000 visiteurs contre 250 000 en 2023, cette 23e édition de Japan Expo avait des allures peu ordinaires. On était pas habitué à pouvoir circuler dans les allées et profiter de stands avec moins de monde : on y prendrait presque goût… Entre les Jeux Olympiques, l’inflation et la perte de pouvoir d’achat, c’est pas les raisons qui manquent pour expliquer cette baisse de fréquentation. La programmation n’a pas arrangé les choses non plus. L’édition 2024 a manqué clairement d’impacts et de têtes d’affiches.
Les stands des éditeurs étaient magnifiques comme chaque année et les animations sur ces derniers continuent de prendre toujours plus d’ampleur. Ce sont ainsi pas mal de petits souvenirs à ramener qui font plaisir aux fans de mangas et d’animés. Un petit tour sur le stand d’Ynnis éditions pour compléter ma collection Ma Petite Bibliothèque Ghibli. Et on file chez Vega-Dupuis pour quelques achats, Superbeasts (le tome 1 et l’artbook) et le tome 1 de Piravit, le dernier fantôme pour ensuite le faire dédicacer par Kenron Toqueen. Quelle belle surprise de voir Myaku-Myaku, la mascotte officielle de l’Exposition universelle d’Osaka 2025 déambuler dans l’allée centrale, près du Quartier Manga, et s’arrêter pour des photos. Son objectif : faire davantage connaître l’exposition universelle 2025 qui aura lieu à Osaka avec comme thème « concevoir la société du futur, imaginer notre vie de demain » en visant à sauver, inspirer et connecter des vies.
L’attraction de l’année était le pop up store Nintendo, loin de valoir son temps passé en fil d’attente (30 minutes pour ma part). La boutique éphémère était vraiment petite (pour la taille du catalogue de big N) et il n’y avait pas grand-chose finalement et pas de mugs à mon grand désespoir ! Je suis quand même reparti avec quelques pin’s Zelda et Pikmin ainsi qu’avec une peluche Tom Nook d’Animal Crossing.
Beaucoup de festivaliers étaient étonnés de trouver pour la première fois à Japan Expo un stand Moomin. Nés en Finlande en 1945 par Tove Jansson, les Moomins sont en fait très populaires en Asie, y compris au Japon, grâce à deux séries animées (Moomin et Shin Moomin) au début des années 70 et une adaptation plus fidèle à l’original Les Moomins au début des années 90. C’était assez calme et les hippopotames parlent moins que Babar par exemple. Une remise en contexte et une présentation permettraient de mieux connaître ces trolls finlandais en France…
Quelques photos du stand de Moomin ©David Maingot pour Journal du Japon
Du côté des expositions, celle fêtant les 70 ans de Godzilla était un peu décevante et pas vraiment à la hauteur du Roi des monstres. Il s’agissait d’une simple présentation des différents films et quelques vitrines. Cela manquait de spectaculaire et de mise en scène : un comble pour un tokusatsu (film d’effets spéciaux littéralement) ! Mention spéciale au dérouleur de papier toilette Godzilla qui démontre la tonne de goodies à la gloire du kaijû septuagénaire… Le photocall était triste et pas forcément réussi. C’est dommage car je pense qu’il y avait vraiment matière à rendre l’exposition plus vivante et intéressante !
Quelques photos de l’exposition Godzilla, 70 ans du Roi des Monstres ©David Maingot pour Journal du Japon
Sans faire le bilan de Wabi Sabi qui arrivera courant août, un vent salvateur de fraîcheur a soufflé sur le pavillon traditionnel. Cette année, il n’y avait pas le projet Tokyo Teshigoto, des dizaines d’artisans traditionnels de la capitale mais on pouvait découvrir une nouvelle région et 15 nouveaux artisans avec le projet Fukushima Kawaii Kogei. En quelques mots, il y avait pas mal d’exposants qui venaient pour la première fois avec de belles choses tout en restant à la portée de toutes les bourses. Il y avait moins de calligraphie et c’est tant mieux : marre de voir les mêmes stands proposer d’écrire les noms en kanji…
Dans l’équipe, on a tous remarqué la fréquentation en baisse (pour ne pas nous déplaire). Cette année, les allées étaient respirables et il était plus facile d’apprécier les déplacements entre les stands, les animations sans (trop) attendre. On a été assez déçu par les expositions qui manquaient de place, d’éléments à exposer ou tout simplement d’une faible mise en scène pour celle qui fêtait pourtant les 70 ans de Godzilla. Encore merci à tous les éditeurs qui proposent toujours plus de cadeaux et de jeux pertinents ! Le salon n’a pas encore repris toutes ses couleurs et vivement 2025 pour voir si la prochaine édition effacera enfin les traces du Covid-19…