Lectures du Japon : chroniques de mangas inédits en France !
C’est toujours un plaisir de lancer une nouvelle rubrique. Comme vous le savez l’équipe de Journal du Japon est toujours curieuse des titres publiés au Japon mais pas encore en France, que ce soit pour vous proposer des études de marché ou de suivre des récompenses prestigieuses comme les Taisho Awards.
C’est dans cet esprit que nous rencontrions il y a peu Kevin Chapiron, fondateur de la librairie en ligne Giant Books, spécialisé dans des titres japonais encore inédits en France. Séduit, nous lui avons proposé de nous présenter régulièrement quelques nouveaux mangas encore inédits en France, qu’il propose dans sa boutique : voici les lectures du Japon !
Collection d’histoires courtes : Radiateur de plage – Kogani ÔSHIRO
Kogani ÔSHIRO est un mangaka japonais qui a débuté sa carrière en 2015 à travers des participations au Comiket (plus grande convention de dōjinshi du monde) et des commandes de couverture pour des magazines ou des romans de Ai MONOSUGAI. Au cours de l’année 2021 et 2022, il fait paraître des histoires courtes dans le magazine Cinra et chez l’éditeur Leed, qui seront par la suite réunis chez ce même éditeur dans le recueil dont il est question aujourd’hui.
Collection d’histoire courte : Radiateur de plage est un opuscule qui met en scène des personnages confrontés aux événements de la vie, qui sont bien souvent des obstacles qu’il faut surmonter, dépasser. On les comprend très souvent et on ressent une grande proximité avec eux, car nous avons vécu ce qu’ils ont vécu. Une rupture amoureuse, le décès d’un être proche, la peur d’être parents ; nous avons tous eu au moins la proximité d’un de ces bouleversements. Mais la particularité de l’auteur est d’ajouter un peu de fantastique, de magie, dans ces histoires. Que ce soit un radiateur qui possède la capacité de parler, un homme devenu invisible ou bien un métier imaginaire, ces petites touches réenchantent le monde dans lequel prennent place ces récits.
Enfin, ce josei a été récompensé en étant élu 1er dans la catégorie manga pour femme du magazine Kono Manga ga Sugoi de l’année 2024, proposés au éditions Takarajimasha. Actuellement, Kogani ÔSHIRO travaille sur deux séries, à savoir Midori-chan (みどりちゃん) et ano ne (あのね)chez l’éditeur Michikusa Comics ainsi que Shūkai suru watashi-tachi (周回するわたしたち), ensemble de sept histoires courtes, au sein du magazine japonais Cinra. Du fait de sa charge de travail actuel, il a indiqué ne plancher sur aucune autre production dans l’immédiat.
Collection d’histoires courtes : radiateur de plage est disponible sur le site de Giant Books.
Kyokutou chimeratica – Vol.1. – par Daisuke ITABASHI
En 2023 paraît l’histoire courte La lance du chasseur (番槍の狩人) dans le Weekly Young Jump de l’éditeur Shueisha. Suite au succès de ce one-shot, l’autrice se voit accorder une sérialisation et nous voyons alors naître alors Kyokutou chimeratica (極東キメラティカ).
Avant cette série, la mangaka avait écrit le manga La veuve alpiniste (未亡人登山) qui met en scène une jeune femme qui, après avoir perdu celui qu’elle aimait, souhaite essayer cette passion qui l’animait. Série en deux tomes parue entre 2018 et 2019 chez l’éditeur Shôgakukan, l’autrice ne fera paraître aucune autre oeuvre jusqu’au one-shot.
Concernant Kyokutou Chimeratica, nous sommes face à une oeuvre qui va être très importante pour la Shueisha dans les années à venir. Ce qui marque, ce sont les designs des créatures. Inventives, elles sont le résultat de l’absorption de plusieurs formes de vies. Les possibilités sont très vastes et on souhaite vite découvrir de nouvelles chimères. À cela s’ajoute que le personnage de Yuri sort des sentiers battus. Nous avons une personne qui souhaite juste une vie reposante , relaxante et animée seulement par les repas chauds et le sommeil… malgré ces qualités indéniables de chasseuse.
Elle se retrouve donc embarquée de force dans un périple qui ne lui convient pas et auquel elle devra s’adapter. Elle va mettre en mouvement des forces qui la dépasse du fait de son lien particulier avec la première chimère humaine jamais découverte. Enfin, les scènes d’actions sont incroyablement dynamiques et cela est permis à la fois par la diversité des ennemis, que ce soit par leur formes ou bien par leur caractéristiques, mais aussi par l’utilisation des pleines pages et de l’agencement des cases qui permet d’avoir toujours une sensation de mouvement.
Kyokutou chimeratica est disponible sur le site de Giant Books.
Daikai Gaea-Tima – Vol.1 – Par Kent
Avant de devenir mangaka, Kent a travaillé comme « concept artist » pour la société de création de figurine Prime1Studio. Fondée en 2012 à Tokyo, la société est connue à travers le monde pour ces statues de très haut de gamme qui s’apparente souvent à des objets de collections.
Mais il quitte celle-ci pour travailler à temps plein en tant que mangaka, ce qui lui permet de voir sa première série, Colorless, paraître chez l’éditeur Leed en 2019. Celle-ci paraîtra en Franche chez l’éditeur Shiba édition et prendra fin en 2023 avec le septième tome. Entre temps, il fait paraître une histoire courte chez l’éditeur Kodansha intitulée Destronaut, qui met en scène un bretteur hors pair envoyé sur la Lune pour récupérer des données sensibles alors que le corps expéditionnaire précédent s’est vu détruit par une forme de vie inconnue. Enfin, il est aussi illustrateur du light novel Soreoreno (ソレオレノ), écrit par Shin KITAGAWA et publié chez l’éditeur Shôgakukan depuis 2022 et comptant deux tomes.
En 2023, toujours chez Shôgakukan, paraît donc Daikai Gaea-Tima (大怪獣ゲァーチマ.) Succès immédiat et déjà réimprimé plusieurs fois par l’éditeur, ce titre l’histoire nous met face à une immense créature marine qui apparaît soudainement au Japon et détruit une petite ville côtière dans laquelle habitait Miyako.
Mais, des années plus tard, cet événement est perçu comme une bénédiction par les habitants de la ville nouvellement rebâtie. Effectivement, la mort de la créature a fait apparaître des espèces de poissons inconnus et d’une taille relativement élevée, apportant la prospérité au village. Ainsi, Miyako qui a connu l’horreur, réalise aujourd’hui des petites statuettes de la créature, prénommée Gaea-Tima par les habitants.
Ainsi, en nous présentant cette monstrueuse créature comme une divinité, comme une entité que les habitants vénèrent et apprécient même, le mangaka prend en contre-pied ce que nous connaissons habituellement des récits de kaiju. À cela s’ajoute que Gaea-Tima n’apparaît pas d’une façon naturelle et que le lien qu’il semble posséder avec Miyako est l’une des principales énigmes du manga. L’auteur va nous installer dans un univers où la recherche sur les kaiju est avant tout une aventure scientifique et où les différentes créatures que Gaea-Tima va devoir affronter semble être bien plus que ce qu’elles paraissent.
Daikai Gaea-Tima est un manga qui possède plusieurs facettes. C’est un titre qui possède d’incroyables scènes de combats entre les monstres, inspirés dans leur mise en scène par les plus grands films de Kaiju. C’est aussi un manga qui parle des kaiju à travers un prisme scientifique et dans un monde où tous ne sont pas perçus comme une menace. Enfin, c’est un manga dont l’histoire reste encore très mystérieuse et à la fin du premier tome : nous ne ressortons de la lecture qu’avec des questions et une envie très forte de connaître la suite.
Daikai Gaea-Tima est disponible sur le site de Giant Books.
Shepherd House Hotel – Vol.1 – Par Kazuki MORI et Hamaguri
La première oeuvre de Kazuki MORI paraît en septembre 2021 dans le Young Jump Comics. Histoire courte d’une vingtaine de pages, le récit met en scène deux lycéennes qui ont survécu à une attaque de zombie. Il fait aussi paraître, en indépendant, le doujinshi Blue Glow Line. De près de 48 pages, cette histoire nous présente trois hommes immortels qui se retrouvent dans un café la nuit afin d’échanger sur leur vie.
Les dessins de Shepherd House Hotel qui nous intéresse aujourd’hui sont réalisés par l’artiste Hamaguri, qui officie aussi pour le manga Trump de l’auteur Kenichi SUEMITSU. Shepherd House Hotel, édité par la Shueisha depuis 2022 est son premier manga qui paraît sous la forme d’une série.
Il met en scène des personnes chargés d’aider les âmes des défunts à trouver la paix afin qu’il puisse quitter le monde terrestre. Tout cela est rendu possible par l’existence de lieux à travers le monde qui sont dotés d’une grande puissance spirituelle et qui permet de communiquer avec les esprits. Nous suivons la vie quotidienne au sein d’une de ces structures, un hôtel situé en Alberta, Canada. Honda, le réceptionniste de l’hôtel et Moona, un fantôme, s’occupent des clients que les « berges » leur amènent.
Chaque esprit possède des regrets, des envies et des demandes qui lui sont propres et là où, pour certains, il s’agit seulement de les aider à réaliser ce qu’ils souhaitent, d’autres se verront dévorer par ce qu’ils ont commis. À cela s’ajoute qu’au fur et à mesure des rencontres et nous en apprendrons plus sur les personnes qui travaille dans cet hôtel : ils sont liés à ce lieu à travers une tragédie survenue il y a 15 ans. Nous découvrirons aussi qu’il existe un groupe qui dirige ces structures et que leurs désirs peuvent entrer en conflit avec ceux de Honda et de Moona.
Ainsi s’entremêlent de nombreux récits qui donnent toujours plus d’épaisseur à la fois au personnage mais aussi aux événements qui se produisent. Kazuki MORI est parvenu à réaliser une œuvre très touchante où on parvient à comprendre les motivations de chacun et où l’on se reconnaît dans de nombreuses âmes égarés. Shepherd House Hotel est une belle œuvre et elle résonnera avec de nombreux lecteurs.
Shepherd House Hotel est disponible sur le site de Giant Books.
Et voici pour ce premier quatuor de chroniques inédites. Cette nouvelle rubrique vous plait ? Dites-le-nous en commentaire et retrouvez nos autres recommandations dans notre rubrique #lecturesdujapon.