Éditeurs de manga : quel est votre préféré ?
Après l’essor du manga depuis la fin de la pandémie, on ne compte plus le nombre d’éditeurs de manga sur le territoire français : des petits et des gros, des spécialistes et des généralistes, des labels de grandes maisons ou des indépendants. Chacun a son catalogue, sa façon de faire des mangas, de communiquer… et chacun a donc ses lecteurs !
Mais qu’est-ce qui fait un bon éditeur finalement ? Comme la question peut paraître subjective, 4 de nos rédacteurs se sont penchés sur la question : quels sont tes deux éditeurs de manga favoris, sur le marché français ?
Voici leurs réponses !
Ki-oon éditions : toujours un manga d’avance
C’est en 2008 que je rencontre pour la première fois Ahmed Agne et Cécile Pournin, fondateurs des éditions Ki-oon, à l’occasion de Japan Expo et que je découvre leur catalogue, entre des titres de fantasy et les œuvres de Tetsuya TSUTSUI. A l’époque et avant tout le monde, l’éditeur mise sur le seinen même si, rapidement, il ne se résume plus à cela : la qualité de leurs mangas était (et demeure) irréprochable, du papier à la traduction. C’était d’ailleurs l’une des raisons qui les avait poussé à devenir éditeur après des années 90 et 2000 où certaines maisons faisaient passer la quantité avant la qualité. Quinze années plus tard, Ki-oon est devenu un leader du marché manga français, et ce n’est pas par hasard : toujours avec un train d’avance dans leur communication et jamais à court d’idées, on leur doit les premières grandes opérations de communication dans le métro, au cinéma, à l’Olympia même il y a quelques jours !
Mais ce marketing ne serait rien – ou du moins juste un écran de fumée – si le plaisir du lecteur n’était pas au rendez-vous, avec des titres marquants comme Bride Stories, Amanchu, Wolfsmund, Beastars, Cesare, Les chefs d’oeuvre de Lovecraft, Frieren, Le requiem du roi des roses, Erased, leur collection Latitudes dans son ensemble, les titres de Yuji IWAHARA et Daruma MATSUURA (+1 sur la politique d’auteur d’ailleurs) ou encore les récents best-sellers que sont My Hero Academia et Jujutsu Kaisen… Ki-oon a aussi été précurseur sur les titres indépendants avec son tremplin mais a débuté ce concept bien avant même, avec Tetsuya TSUTSUI.
Des titres toujours très bien édités et très bien traduits – parce que les traducteurs ne sont pas payés au lance-pierre, entre autres – des choix éditoriaux toujours intéressants, des mangas toujours plaisant à lire, et une équipe toujours au top. Ki-oon éditions, peut-être le meilleur éditeur de manga en France ? Aaaah, difficile à dire, mais on n’en est certainement pas loin ! (Paul)
Glénat : de la nostalgie et de la SF !
Avec les éditions Glénat, c’est une longue histoire d’amour et de nostalgie. C’est avec eux que beaucoup de fans de mangas de ma génération ont découvert les mangas dont la mythique édition pastel de Dragon Ball qui ne faisait pas forcément honneur à l’art de Akira TORIYAMA (Dr Slump) mais qui a eu au moins le mérite de faire découvrir l’œuvre qui s’inspire librement du classique chinois La Pérégrination vers l’Ouest.
Glénat, c’est aussi un bon catalogue de mangas de science-fiction avec en mangaka coup de cœur Tsutomu NIHEI dont les œuvres (Blame!, Abara et Biomega) ont en ce moment droit à de belles éditions Deluxe. Entre Knights of Sidonia (2009), série en 15 tomes que l’on aimerait (re)découvrir en grand format et Aposimz la planète des marionnettes (2016), série en 9 tomes, difficile de dire quelle œuvre de NIHEI est notre préférée. Toujours du côté de la SF, c’est aussi la courte série en 4 tomes, Terrarium de la mangaka Yûna HIRASAWA. Rien que les magnifiques couvertures devraient vous convaincre de craquer pour la poésie de ce seinen ! C’est aussi un plaisir de retrouver à la traduction Yohan Leclerc. (David)
Nobi Nobi : tout pour la jeunesse
Comme beaucoup de personnes de ma génération, j’ai grandi avec des mangas et des animés qui n’étaient pas toujours de mon âge. Une aubaine pour sentir avec délice le goût de l’interdit, un cauchemar pour les parents. Des années plus tard, devenue bibliothécaire, l’un de mes premiers défis a été de mettre des mangas entre les mains des enfants. Des livres vraiment à leur portée. C’est là qu’intervient Nobi Nobi, d’abord avec de jolis albums pour enfants. J’étais une grande fan de leurs livres de contes aux illustrations mangas, je me damnerai pour les retrouver !
Puis les mangas sont arrivés. D’un coup, les recommandations étaient plus faciles ! Je trouvais très drôle que les collégiens empruntent discrètement Les Classiques en mangas parce que c’était moins long à lire que le livre original. J’aime l’idée de lectures bienveillantes, un peu doudou mais aussi pleines d’aventures sans que cela ne tombe dans le sanglant ou le déprimant. Mon chouchou ultime en la matière c’est Iruma à l’écoule des démons, qui m’a fait voir un shônen différent, avec des enjeux mais sans que la violence ne soit la réponse à tout. J’aime aussi la nostalgie de la réédition avec des titres comme Shugo Chara que les parents pourront transmettre à leurs enfants. Bref j’adore Nobi Nobi ! (Albine)
Cornélius : l’œuvre de Shigeru Mizuki
Amoureux des beaux livres et des yôkai, les éditions Cornélius proposent, entre autre, les œuvres de Shigeru Mizuki, le maître des yôkai. Impossible de passer à côté des albums Mononoke et Yôkai, « encyclopédies » des plus beaux spécimens du mangaka dénichés dans les campagnes et le folklore japonais ainsi que Yôkaidô mettant à l’honneur le grand maître d’ukiyo-e Utagawa Hiroshige et ses 53 stations du Tôkaidô, reliant Edo à Kyoto.
Pour découvrir la vie du spécialiste du manga d’horreur et des monstres et esprits japonais, on ne peut que vous conseiller de lire NonNonBâ, one shot presque autobiographique où la « mémé » initie au monde des yôkai le jeune Gege (« bouseux », « repoussant »), surnom de Shigeru Mizuki, sans oublier bien entendu l’autobiographie en 3 tomes, La Vie de Mizuki. C’est aussi Kitaro le repoussant (11 tomes), Mon copain le kappa (3 tomes), 3, rue des Mystères (2 tomes), le one shot Micmac aux enfers mais aussi des mangas historiques avec les one shots Opération mort et Hitler. (David)
Kana : un catalogue toujours alléchant
Les éditions Kana sont arrivées en France avec des grandes licences dans les années 2000 comme Saint Seiya, Yuyu Haksuho, Slam Dunk et leur collection Big Kana a également apporté des pépites comme I am a Hero ou March comes in like a lion sans oublier l’immense œuvre de Naoki URASAWA. En plus de 20 ans d’éditions, Kana a eu des coups de mous sur le plan commercial mais a su se remettre en question et j’avoue que depuis quelques années, je me régale avec leur choix de titres matures, dans leur collection Life, et pas seulement : No Guns Life, Boy’s Abyss, Otaku Otaku, &And, Entre les lignes, Kowloon, Love Fragance, les œuvres de Jun MAYUZUKI ou d’Inio ASANO, Darwin’s Incident.
Les éditions Kana c’est donc à la fois des licences historiques, des grands noms du manga (et je n’ai pas parlé de KAMIMURA d’ailleurs, honte à moi), un amour du manga (il suffit de lire les interviews de Christel Hoolans, la directrice éditoriale, pour le ressentir), et un segment josei/seinen qui parvient toujours à me proposer des titres dont je n’avais jamais entendu parler mais qui, pourtant, vont me passionner. L’éditeur est également à l’affût des titres primés et, ça tombe bien, eux comme moi sont des grands amateurs des Taisho Awards, nous sommes donc logiquement fait pour nous entendre. Enfin j’allais mettre un bémol pour leur collection de création originales, côté manfra donc, MAIS leur collection nostalgie avec Goldorak ou Saint Seiya notamment ou encore leur tout dernier titre d’un jeune auteur, Silence, va peut-être me faire changer d’avis. Comme quoi un titre estampillé Kana, ça mérite toujours toujours notre attention, il y a souvent de bonnes surprises ! (Paul)
Le lézard noir : Une maison d’édition pleine de surprises
Fondée en 2004, le Lézard Noir propose un panel de mangas en grand format, mais aussi de livres jeunesse (dont les Moomins) et de livres d’art. Quand on pense au Lézard Noir et mangas, nous pouvons vite se référer à La cantine de minuit de Yarô ABE, qui a été très appréciée et même par mon entourage qui pourtant jusque là n’était pas convaincu par les mangas. C’est justement par cette série d’histoires courtes si attachantes et faciles à lire que j’ai commencé à m’intéresser de près au catalogue de cette belle maison d’édition, et j’ai été servie!
Entre ceux et celles qui aiment les histoires d’amour et de quête du bonheur qui sortent de l’ordinaire mais qui peuvent en parler à certains, vous rirez des (et avec) les trois héroïnes trentenaires et célibataires de Tokyo Tarareba girls d’Akiko HIGASHIMURA. Changeons de registre avec les mangas de Keigo SHINZÔ, en particulier Tokyo Alien bros (trois tomes) qui permet de découvrir le Japon d’aujourd’hui sous un autre regard.
Enfin, même si le choix est rude, si je ne devais en citer qu’un je choisirai Daruchan de HARUNA Lemon (Remon). Ici, l’héroïne est aussi une extra-terrestre, mais fait tout pour cacher son identité pour pouvoir s’intégrer dans notre monde. (Noémie)
Kurokawa : Une variété de shônen
Créée en 2005, Kurokawa est un label d’Univers Poche et publie de nombreux titres qui, selon moi, valent la peine d’être connus!
Honnêtement, je ne suis pas une grande lectrice de shônen.. et pourtant de nombreux titres de Kurokawa m’ont séduite dès leur premier tomes!
Prenons par exemple le célèbre titre Fullmetal Alchemist de Hiromu ARAKAWA ! Ce fut une claque pour beaucoup d’entre nous, et je me souviens de mes années lycée à analyser point par point de nombreuses scènes, quitte à me faire des nœuds au cerveau. Kurokawa eut par la suite l’excellente idée d’éditer sa sublime Perfect édition et de re travailler la traduction. N’hésitez pas de votre côté à vous amuser à comparer l’ancienne et la nouvelle version! Et si vous en redemandez encore après ces lectures, beaucoup d’autres titres de cette mangaka sont disponibles chez eux !
En dehors d’Hiromu ARAKAWA, le succès est grandissant pour Spy x family de Tatsuya ENDO avec seulement onze tomes publiés en France. Dès le premier volume, ce fut un coup de coeur je ris devant chaque page et surtout, je suis curieuse à l’idée de découvrir la fin ! (Noémie)
NaBan : du patrimoine et de l’audace
J’ai une petite fascination pour les maisons d’édition qui se lancent. Enfin qui se lancent… NaBan va bientôt fêter ses cinq ans et si je les trouvais discrets au début, je constate avec plaisir qu’ils s’installent tranquillement dans le paysage pourtant bien encombré de l’édition de mangas.
J’étais contente de les voir reprendre Old Boy et Give my regards to Black Jack (anciennement Say Hello to…) mais je les avais déjà lu. Ce qui m’a fait tomber pour NaBan c’est Demande à Modigliani de Ikue AIZAWA. C’était très différent de ce que j’avais lu jusqu’alors, une façon originale de parler de création artistique. J’ai été touchée et j’ai commencé à regarder le catalogue en entier.
J’apprécie leur diversité, mais aussi leur audace. Sortir des titres fondateurs pour l’histoire du manga, ça a l’air d’aller de soi, surtout quand on baigne dedans depuis longtemps comme moi, mais c’est en même temps une sacrée prise de risques. Voir débarquer Destination Terra puis Arion, quel agréable choc ! Et ils en parlent avec tellement de passion sur leurs réseaux sociaux, difficile pour moi de ne pas craquer, je suis faible quand on me montre les coulisses et les petites galères du métier d’éditeur.
NaBan fait des mangas pour tout le monde, curieux ou passionnés et c’est sans doute pour ça que je les apprécie autant. (Albine)
Ainsi ce finit cette liste des éditeurs, forcément subjective même si certaines des qualités de chacune de ses maisons n’en reste pas moins indéniable. Mais, vous, chers lecteurs, entre leur catalogue, leur façon de communiquer et la qualité de leur manga : quels sont vos éditeurs favoris et pourquoi ? Dites-le-nous en commentaire !
Pour moi il manque bien sur Akata et son catalogue exceptionnel de Shojo/Josei sur cette liste, on est pour moi sur l’éditeur le plus créatif et original en France après peut-être Ki-oon, gros coup de coeur pour eux.
Bonjour,
Paul OZOUF, rédac chef et co-auteur du papier. Merci de nous avoir lu et de nous donner votre avis 🙂
Akata a parfois été cité c’est vrai, pour ses titres (originaux oui, mais créatif vous entendez quoi par là ?) et son engagement global sur le segment shôjo. Mais en réduisant à deux éditeurs par rédacteur, il arrivait après, pour d’autres raisons que son catalogue en général.