« Flowers for Vincent »… et des fleurs pour Cherriuki
Ce mois-ci, la série en 2 tomes de l’artiste australienne Cherriuki rejoint les rayons mangas. L’éditeur Nouvelle Hydre nous présente en avant-première une romance envoutante entre une lycéenne et un mystérieux fleuriste. L’univers pastel de Flowers for Vincent ravira les amateurs de shôjo dans le catalogue de la maison d’édition française. Avant d’entrer dans son histoire florale emplie de douceur et de poésie, nous sommes allés à la rencontre de la jeune mangaka.
Découverte : les travaux de Cherriuki
Le pinceau délicat de l’artiste donne vie à des personnages sensibles aux visages très expressifs. Telles des sorcières malicieuses à grand chapeau pointu, des sirènes songeuses portant des couronnes fleuries, et des princesses rêveuses à la chevelure argentée. Les silhouettes longilignes évoluant dans des nuées de fleurs rose poudré ou sur fond de ciel étoilé bleu nuit. Son compte Instagram regorge aussi de personnages tirés de contes occidentaux ou de mangas. Parmi ses sources d’inspiration majeures, l’artiste australienne compte Fruits Basket, Nana, Cardcaptor Sakura et Sailor Moon.
Dans sa boutique, ses personnages se parent des codes chibi (petits corps avec de grosses têtes, traits simplifiés, couleurs pastels..). On nous présente le quotidien de la charmante Mushroom girl et de ses amis. On se projette facilement dans leur quotidien scolaire, dans les festivals estivaux, dans leurs sorties pluvieuses, dans leurs voyages dépaysants… grâce à la papeterie à leur effigie.
Il est agréable de voir la jeune fille évoluer dans un univers japonais (reconnaissable aux bentos mignons ou aux confiseries ne cachant pas leur inspiration nippone). On retrouve dans le mangas de Cherriuki ces 2 styles dessins, selon si l’atmosphère est légère ou tendue. On s’attache alors des personnages d’une grande richesse, aussi mystérieux que farceurs.
Flowers for Vincent
Thèmes : Romance / Tranche de vie / Drame / Mystique
Synopsis : Depuis que l’état de santé de sa grand-mère s’est dégradé, Iris, une jeune lycéenne de terminale, est perturbée au point de manquer régulièrement les cours. Mais un jour, lors d’une de ses habituelles errances, Iris perçoit un parfum doux et familier qui la conduit devant une boutique de fleurs qu’elle n’avait jamais vue auparavant. Elle fait alors la connaissance de Vincent, un jeune fleuriste qui tient la boutique depuis la mort de son ancien propriétaire. D’abord intriguée par ce garçon avenant et discret, Iris entend aussi parler d’une légende liée à la boutique, et de l’aura mystérieuse qui entoure le maître des lieux.
Mot de l’éditeur : Flowers for Vincent est un shôjo tranche de vie mettant en scène des personnages profonds et attachants. Iris est une jeune fille sensible, affectée par l’hospitalisation de sa grand-mère, sa seule famille. Le trouble qu’elle ressent s’accentuera par sa rencontre avec Vincent, un mystérieux fleuriste, charmant et taciturne. Il y a quelque chose d’intriguant autour de Vincent : pourquoi Iris n’avait-elle jamais vu sa boutique ? Pourquoi semble-t-il venir d’un autre monde ? Est-il vraiment humain ? Le lecteur découvre à travers cette romance un savant mélange d’humour et de tragédie dans lequel les personnages sont guidés par des liens qui transcendent leur destinée. Au croisement de Tsubasa Reservoir Chronicle et Fruits Basket, un doux parfum de nostalgie transparaît dans l’ambiance fantastique et le character design doux et soigné de l’auteure.
On retient de cet univers doux et poétique plus que des dessins floraux et des personnages attachants. L’histoire ne s’articule pas seulement autour de la romance de Vincent et d’Iris. Il est question de son propre rapport aux autres et des expériences tirées de nos rencontres (même éphémères). Iris apprend à devenir sociable, à élargir son cercle de relations et à prendre position haut et fort. Vincent s’inspire de la jeune fille pour à son tour s’affirmer et gagner en caractère. Ils font face à une menace les dépassant, les empêchant de vivre pleinement leur relation, et une question se pose. Doivent-ils néanmoins profiter de leur amour au jour le jour, même en sachant leur temps compté ? Ou tenter de repousser l’échéance en se fuyant ? Leur romance impossible vaut-elle le coup d’être vécue ou ignorée ? Vous saurez leur décision finale en vous plongeant dans cette lecture haletante.
Rencontre avec Cherriuki
Journal du Japon : Bonjour, merci d’avoir accepté cette rencontre. Pour commencer, pouvez-vous nous présenter votre parcours artistique, de vos débuts dans le dessin à votre carrière de mangaka ?
J’avais commencé à dessiner, aussi loin que je me souvienne, quand j’étais enfant. Mais mon monde a changé lorsque j’ai découvert le manga à l’âge de 11 ans. Le premier que j’ai lu était Tokyo Mew Mew ! C’était une expérience qui a change ma vie. Je suis tombée amoureuse du style instantanément. J’ai grandi en regardant Sailormoon, ce qui a également eu un impact majeur sur mon style. J’adore ce style artistique doux et romantique, et les sentiments véhiculés à travers ces histoires.
À partir de mon premier manga, j’ai été obsédée par le style manga et je n’ai plus pu m’arrêter d’en dessiner. J’ai imité mes artistes préférés pour m’entraîner afin de m’améliorer. J’ai commencé à publier des œuvres sur deviantART (elles n’étaient vraiment pas très bonnes) et j’avais trouvé du soutien parmi cette communauté. C’est ce qui m’a poussé à continuer. J’avais l’habitude de dessiner mes propres histoires et de les publier en ligne. Aujourd’hui, des années plus tard, je n’utilise plus deviantART mais je suis passé à d’autres médias sociaux (Facebook, Tiktok, mais principalement Instagram).
@cherriuki_ Process of Black Lady 🖤 #sailormoon #blacklady #watercolor #ink #illustration #art #painting #process ♬ Moonlight Densetsu (From « Sailor Moon ») [Instrumental] – Harpsona
Je suis devenue artiste à plein temps, faisant des conventions et des festivals qui me procurent un revenu pour me nourrir et continuer à dessiner. Grâce aux réseaux sociaux d’aujourd’hui, c’est indéniablement beaucoup plus facile de devenir artiste qu’à l’époque.
Il y a quelques années, Mahmoud m’a contactée pour me donner l’opportunité de créer mon propre manga sous leur maison d’édition (anciennement Editions H2T). Je suis vraiment contente d’avoir la chance d’en réaliser un, car c’était mon rêve depuis toujours !
Parlez-nous de la création de votre série Flowers for Vincent…
Je voulais dessiner une histoire autour d’un magasin de fleurs et d’un mystérieux propriétaire. Je souhaitais transmettre l’idée que les personnes qui entrent dans notre vie, peu importe la durée de leur séjour, auront toujours un impact et laisseront toujours une trace en nous. Le style shôjo est mon préféré en lecture ! C’est aussi mon style par défaut que j’utilise pour dessiner, donc bien sûr, cela m’est venu naturellement. J’ai écrit cette histoire en pensant au public, aux adolescentes et aux jeunes adultes. Je ne suis pas sûr que le public masculin lira vraiment ça (Rires)
En raison de mon emploi du temps, mon éditeur et moi avons dû créer une courte série pour mon premier manga. Nous avions estimé que cela me prendrait un an pour dessiner un livre, donc nous n’avions que 2 ans pour ce projet (Rires). J’aurais bien voulu écrire un volume de plus, c’est sûr, mais je ne dessinais vraiment pas assez vite (Rires)
Au départ j’avais fait de Vincent un personnage plus froid et inaccessible et d’Iris un peu plus énergique (Rires). Au début, elle a fini par être une personne plus isolée, ne comptant que sur sa grand-mère pour lui tenir compagnie. Je voulais montrer sa croissance là où elle pourrait se faire une amie plus tard. Si je devais choisir mon préféré entre mes personnages principaux, j’aime la personnalité cool et confiante de Vincent. Malgré son passé tragique, il n’a jamais renoncé à essayer de sauver son âme.
Je souhaitais que les filles de ce manga aient toutes des noms de fleurs ! Ils ont tous des significations spécifiques. Iris signifie espoir. Camélia signifie amour et dévotion. Mes fleurs préférées sont les pivoines et les tulipes, j’ai donc essayé de les dessiner le plus possible.
Pouvez-vous nous en dire plus sur votre vécu de fan de mangas en Australie…
Quand j’étais petite, ils y avait des versions doublées de certains animes populaires à la télévision pour enfants, tels que Sailormoon, Pokémon, Yu-gi-oh et Digimon. À l’époque, ils étaient plutôt classés comme des «dessins animés». Ce n’était pas aussi populaire qu’aujourd’hui. C’était même un peu « ringard » d’apprécier des choses aussi spécialisées, donc trouver d’autres personnes intéressées par cela n’était pas aussi facile.
De nos jours, le manga/anime est devenu très populaire auprès de tout le monde. Grâce à Netflix, YouTube et d’autres services de streaming, l’anime et la culture japonaise sont désormais largement répandus et appréciés de tous. La popularité croissante des conventions d’anime attire également beaucoup d’attention sur la culture japonaise ! Grâce aux réseaux sociaux je connais des tas d’artistes/illustrateurs australiens incroyables sur Instagram tels que jb0xtchi, kelogsloops, Alfred Liu et Beanynne.
Et qu’en est-il de votre parcours de mangaka ?
Devenir mangaka reste un chemin difficile pour un non-japonais. Mais grâce aux médias sociaux et aux plateformes facilement disponibles permettant aux gens de publier leurs mangas/webtoons en ligne, de nombreux artistes peuvent désormais facilement créer et partager leur propre manga !
Si vous souhaitez devenir mangaka, tant que vous dessinez avec amour vous pourrez réaliser tous vos rêves. Il est important de travailler dur pour perfectionner vos compétences et apprendre des autres. Et n’ayez pas peur de mettre votre travail en ligne !
Enfin, ou presque, nous avons pu découvrir votre boutique de goodies… Dites-nous en davantage !
J’ai assisté à ma première convention d’anime en 2010 (je pense). J’en ai découvert l’existence sur Facebook et j’étais tellement excitée d’y aller ! La convention était remplie de tellement d’artistes et d’œuvres d’art que c’était incroyable. Je voulais avoir ma propre table et vendre mes œuvres un jour aussi ! Au début, ce n’était qu’un passe-temps, mais le soutien des personnes qui appréciaient mon art m’a aidé à continuer à vendre mes œuvres lors de conventions et à créer une boutique en ligne.
Dernière question : quel est votre ressenti quant à votre venue en France ?
Je suis super nerveuse, mais impatiente en même temps! Ce sera ma première fois en France et j’ai toujours voulu y aller. C’est mon éditeur qui m’a suggéré cette idée d’être présente pour la sortie du 2e livre !
Vous pourrez retrouver Vincent et Iris le 12 octobre chez Amazon, en commande chez votre libraire préféré, ou dès à présent sur Mangas.io. Plus d’informations également sur le site de l’éditeur, Nouvelle Hydre.
Remerciements à Cherriuki pour son temps et à Nouvelle Hydre pour la mise en place de cette interview.