Échanges universitaires au Japon : une parenthèse enchantée ?
Les étudiants qui sont actuellement en échange universitaire ont été fortement impacté par la pandémie de COVID-19. Après des mois de stress à attendre le précieux sésame pour partir, ils ont enfin pu s’envoler pour le Japon. Pour la plupart c’était leur première fois dans ce pays qui fascine autant qu’il déconcerte, et une occasion unique de s’immerger dans une nouvelle culture. Cependant, partir étudier sur l’archipel demande une préparation minutieuse, des démarches administratives complexes, et peut parfois être source de désillusions. De la préparation en amont à la vie quotidienne sur place, Journal du Japon vous livre quelques précieux conseils.
Sortir de sa zone de confort
Les motivations qui incitent les étudiants français à opter pour le Japon sont multiples. D’une part, le pays fascine par sa culture riche et séculaire, sa gastronomie unique et sa société à la fois traditionnelle et ultra-moderne. Ils voient aussi dans l’échange universitaire une occasion de sortir de leur zone de confort et de développer des compétences précieuses pour leur avenir professionnel. Enfin, ils espèrent réaliser des progrès notables dans la compréhension orale et écrite de la langue, grâce à l’immersion. D’une manière générale, les cours au Japon ne sont pas très difficiles pour peu que l’étudiant soit assidu et curieux. Selon son université d’accueil l’étudiant aura ou non le choix de ses cours, généralement dispensés en anglais, en dehors des cours de langue. Un contrat d’étude est établi, en concertation avec l’équipe enseignante, afin de valider l’intégralité de son semestre ou de son année dans le cadre de son diplôme sans allonger le cursus scolaire.
Un projet qui se prépare en amont
Partir étudier au Japon demande une préparation minutieuse et des démarches administratives rigoureuses. En général, il est recommandé de partir en troisième année de licence ou en Master. Dans le premier cas, ce sont les notes du premier semestre de deuxième année de licence qui seront prépondérantes. Même si les notes ne sont pas le seul critère de sélection, il faut travailler dur pour viser un 14 de moyenne afin de mettre toutes les chances de son côté. Il est ensuite indispensable d’assister à toutes les réunions d’information organisées par l’université et de se faire connaître auprès des enseignants référents. Les candidats au départ doivent alors constituer un premier dossier de sélection comprenant notamment leur relevé de notes, une lettre de motivation et la preuve de ressources financières suffisantes. La liste des étudiants retenus est ensuite publiée par l’université d’origine. Dès cette étape, il est recommandé de faire une demande de passeport (86 €) en prévision car cette dernière peut prendre des mois et retarder la suite des démarches une fois la procédure lancée.
Un budget à prévoir malgré un Yen très bas
Le cours du Yen est actuellement à un taux historiquement bas. Cependant, le coût d’un échange universitaire au Japon ne peut s’envisager sans anticiper l’aspect financier. L’étudiant en échange est exonéré des droits d’inscription dans l’Université d’accueil mais il reste essentiel de prendre en compte diverses dépenses lors de la planification du séjour. Les options de logement comprennent les résidences universitaires, les appartements partagés ou loués individuellement, ainsi que l’hébergement en famille d’accueil. Les prix varient en fonction de la localisation et du type de logement choisi, mais il faut s’attendre à un budget de 500 € par mois. À cela s’ajoute environ 800 € mensuels pour les dépenses courantes qui comprennent l’alimentation, les transports, les vêtements, les sorties et les activités de loisirs. Les transports publics au Japon sont réputés pour leur efficacité, mais peuvent être coûteux, en particulier pour les longs trajets en train à grande vitesse (Shinkansen). Enfin, il ne faut pas oublier de souscrire une assurance santé internationale pour couvrir les éventuels frais médicaux (20 €/mois) et de quoi s’acquitter des frais de visa étudiant (20€).
Il est donc recommandé d’avoir des économies avant de s’engager dans cette démarche, même pour les étudiants boursiers. D’autant plus que les aides sont parfois versées avec retard, voire à la fin du séjour. De plus, la plupart des universités n’autorisent pas d’avoir un arubaïto [アルバイト, job] pendant son échange. Sans compter qu’on ne découvre sa ville d’affectation qu’au dernier moment et la vie quotidienne dans les grandes villes est chère, même si elle peut paraître bon marché à côté de Paris. Il faut aussi garder à l’esprit que le Japon est le pays de la consommation, avec des tentations à chaque coin de rue. Pour l’étudiant qui envisage de travailler, il est recommandé de demander un permis de travail directement à l’aéroport, c’est rapide et le document est délivré immédiatement. Sinon, il lui faudra se rendre à la mairie de son lieu de résidence pour déposer la demande puis revenir la récupérer plus tard.
Une destination inconnue
Le processus de candidature peut être compétitif, car le nombre de places disponibles est souvent limité. Chaque candidat émet trois vœux concernant certaines universités mais il ne peut véritablement choisir sa destination. Cette dernière lui sera attribuée en fonction de divers critères : résultats scolaires, maturité, projet professionnel développé dans la lettre de motivation, niveau de langue… Une fois l’université connue, il faut procéder à l’inscription et choisir un logement. Il s’agit à nouveau de bien hiérarchiser ses préférences (proximité avec l’université, salle de bain,…). Le logement le plus éloigné se trouvant généralement autour de 50 mn de transports et le plus proche à 15 mn à pied. La répartition se fait par tirage au sort en essayant de respecter au mieux les priorités de chacun. Il est recommandé d’acheter ses billets d’avion sans attendre de savoir où on logera, cette information pouvant intervenir un peu au dernier moment.
Toutes ces inconnues sont autant de sources de stress pour le candidat au départ mais il ne faut pas se décourager, quelles que soient l’université et le logement qui seront attribués, cette opportunité de passer quelques mois au Japon reste une chance exceptionnelle.
L’art de se faire discret
Pour tirer le meilleur parti de cette expérience, il est crucial pour les étudiants français de se préparer mentalement et culturellement. Il est indispensable de faire preuve d’ouverture d’esprit pour trouver sa place dans ce nouvel environnement, et le niveau de langue s’avère rapidement primordial pour s’intégrer. Participer activement aux activités et aux clubs étudiants, nouer des amitiés avec des étudiants japonais et étrangers, et explorer le pays pendant les congés sont autant de moyens de maximiser cette expérience unique. Il faut aussi apprendre à s’adapter à l’alternance jour/nuit qui peut déstabiliser dans certaines régions car le soleil se couche parfois très tôt, et faire preuve de souplesse face aux chocs culturels.
Il est capital de garder à l’esprit que les japonais sont intransigeants avec les étrangers. Il est donc essentiel d’être respectueux et de ne pas chercher à se faire remarquer car la vie peut vite devenir très compliquée pour celui qui n’est pas dans les clous. Un milliard de règles administratives incompréhensibles peuvent alors s’appliquer pour lui interdire tout et n’importe quoi de manière plutôt arbitraire.
Chaque dortoir a une réunion mensuelle où on discute des règles, de ce qui ne va pas, des évènements à venir… Il est important d’y assister et recommandé de faire son maximum pour nouer des relations avec des étudiants japonais afin de ne pas rester entre gaijin [外人, étranger]. D’ailleurs, une fois que la confiance est instaurée, les japonais peuvent s’avérer être de très bons amis. Ils sont attentifs au bien-être des autres, sentent quand quelqu’un va mal et savent écouter.
Parfois cependant, la déception est au rendez-vous. Un étudiant qui rêve de mégalopole, peut se sentir à l’étroit dans une ville de province comme Fukuoka, aux activités limitées et à la communauté LGBT invisible. Le Japon est par définition un pays peu ouvert à la différence et à la diversité. Bien qu’il existe une vie underground riche et passionnante, elle sera difficile d’accès à un jeune en échange universitaire qui sera démuni pour trouver de bonnes adresses, et qui n’osera certainement pas s’aventurer seul dans les lieux recommandés sur Internet.
Cœurs brisés sur l’archipel
Si, sur le court terme, une aventure avec un(e) gaijin peut attirer les Japonais, sur le long terme c’est bien différent car les relations amoureuses avec des occidentaux sont loin d’être entrées dans les mœurs. En particulier pour les hétérosexuels qui cherchent avant tout la stabilité voire le mariage. Pour de nombreux japonais, « occidental » rime avec « précarité ». C’est d’autant plus rédhibitoire s’il s’agit d’un couple mixte avec un homme occidental, car il est encore profondément ancré dans les mentalités que c’est à lui de subvenir aux besoins économiques du ménage. Il est de surcroît compliqué de présenter un étranger comme étant son koïbito [こいびと, petit(e) ami(e)] à sa famille, sachant qu’elle sera réticente à une union qui donnerait naissance à des enfants métis. Évidemment, la société japonaise évolue, les mentalités aussi, et de belles histoires d’amour peuvent naître comme partout ailleurs. Il existe aussi des Japonais, déjà très attirés par la culture occidentale, qui rêvent de venir vivre en France. Il faut cependant rester conscient que cette expérience universitaire peut se solder par des désillusions si l’étudiant part avec l’objectif de rencontrer l’âme sœur.
Partir étudier au Japon dans le cadre d’un échange universitaire est une aventure qui peut être à la fois excitante et exigeante pour les étudiants français. Les motivations, allant de la fascination pour la culture japonaise à l’excellence académique du pays, sont diverses et personnelles. Les démarches administratives nécessaires pour concrétiser ce projet peuvent être complexes, mais la récompense en vaut la peine. Pour réussir leur échange universitaire au Japon, les étudiants doivent se préparer activement, tant sur le plan linguistique que culturel, et être prêts à s’adapter à un nouvel environnement. Malgré les éventuelles désillusions qui peuvent survenir, cette expérience unique restera un tournant dans leur parcours académique et personnel, leur permettant de développer des compétences précieuses et d’élargir leur vision du monde.
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