La musique française vue par les Japonais
Une certaine curiosité pousse souvent quelqu’un à se demander quelle image il peut renvoyer au reste du monde. C’est une pensée que Journal du Japon vous propose aujourd’hui d’étudier à travers la question suivante : quelle image a la chanson française auprès des Japonais ?
Pour y répondre, un questionnaire a été envoyé à des Japonais ayant tous autour de la vingtaine. La moitié d’entre eux n’ont jamais mis un pied en France, ou au maximum pour un simple voyage. L’autre moitié est venue en échange pendant un temps, impliquant une certaine immersion dans la culture française et ainsi (peut-être ?) un regard différent.
Après un article très complet qui vous présente ce que la jeunesse japonaise écoute en ce moment et les artistes en vogue, il est maintenant l’heure de voir quelles sont nos marques au pays du Soleil Levant.
Pour quels styles de musique sommes nous réputés ?Trois styles de musique se sont démarqués, tous à des antipodes différents…
Pour commencer, sans grande surprise : le rap.
Ce genre a connu une grande explosion au sein de la France elle-même. Il n’est pas étonnant de le voir s’exporter à l’étranger et représenter la musique française. Différents noms sont ressortis comme l’incontournable Jul, qui s’est implanté comme un grand nom depuis maintenant plusieurs années consécutives.
De même, Orelsan et les Casseurs Flowters que l’on ne présente même plus chez nous et qui semblent avoir conquis le cœur des Japonais en passage en France. Et ce notamment grâce à leur titre Regarde comme il fait beau.
Plus récent, le nom de Gazo est aussi ressorti ainsi que PNL, Gambi ou encore MHD et son succès Afro Trap, Part. 7 (La Puissance).
La France ne semble donc pas avoir un grand nom emblème du rap français mais plusieurs porte-paroles, mettant en lumière la diversité d’artistes que nous avons au sein de notre scène rap.
Dans un autre registre, la pop et la variété française semblent plaire aux Japonais. On y retrouve des noms très actuels comme Pomme, Angèle ou encore Aya Nakamura dont Pookie et Dégaine semblent faire danser jusqu’au bout du monde. Aussi, plus étonnamment Lous and The Yakuza et Voyou. Zaz et Joyce Jonathan semblent avoir marqué les esprits et continuent de perdurer aussi.
Des noms plus old school sont aussi cités, comme Françoise Hardy ou Sylvie Vartan. Cette dernière avait connu un franc succès dans les années 60 avec son titre La plus belle pour aller danser. Il lui avait notamment permis de se produire à Tokyo dès sa première tournée internationale. Sa popularité fut telle qu’elle est est l’une des seules artistes féminine étrangère à avoir été classé n°1 dans les charts japonais.
La France a en effet connu une certaine prospérité au Japon lors de la deuxième moitié de XXe siècle. Des grands noms de la chanson française tels que France Gall, Michel Polnareff, Mireille Mathieu, Françoise Hardy et beaucoup d’autres ont su toucher un public japonais.
La musique Les Champs-Élysées de Joe Dassin est par ailleurs très populaire aussi. L’ambassade de France avait en effet utilisée cette chanson pour promouvoir le pays au Japon. Un acte qui semble avoir un impact encore de nos jours !
Mais rien ne peut se mesurer au vintage du dernier genre cité : la musique classique. Notre patrimoine français est en effet reconnu à travers le monde entier, en voici la preuve : des compositeurs comme Debussy ou Ravel sont les artistes français venant en tête en premier de certains japonais et ce même après tant d’années.
La musique française, encore plus connue qu’il n’y paraît ?
Certains artistes français font le choix de composer en anglais pour pouvoir toucher un maximum de public. Ainsi, certains noms comme les Daft Punk, David Guetta ou encore DJ Snake ne sont parfois même plus considérés comme Français par les étrangers.
Pour preuve, lorsque l’on demande à des Japonais s’ils savent cette information, 80% répondent qu’ils l’ignoraient. Cette réponse était d’ailleurs donnée, entre autres, par des répondants avouant ne connaître aucun style ou artiste Français.
À l’inverse, il semblerait que notre musique se soit encore plus exportée que ce que pensons.
Des artistes nés en France et chantant dans leur langue maternelle se trouvent, à défaut d’avoir eu du succès ici, de l’autre côté du globe. C’est l’étonnant cas de Clémentine Mitz. En effet, après avoir tenté de lancer sa carrière en France, cette chanteuse n’a malheureusement pas réussi à convaincre. Cependant, les sonorités de ses chansons semblaient pouvoir captiver l’attention du marché asiatique. Elle s’est alors produite au Japon, où elle a su trouver un public. Elle y a vendu plus de 4 millions d’albums depuis le début de sa carrière. Ses musiques sont un mélange de pop, de jazz et de bossa-nova. Son dernier album Quel temps fait-il ? sorti en 2019 reprends des chansons françaises, permettant ainsi de les faire découvrir au public nippon.
Elle a aussi sorti plus récemment un nouveau single original : Est-ce que vous avez le même en rose ?
Au vu de ces informations se pose alors la question d’à quel point la musique faite par des Français est-elle réellement exportée et reconnu à travers le monde ? Ce qui est sûr, c’est qu’elle dépasse ce que le public peut penser au premier abord.
Et quand on inverse les rôles ?
Le soft power est une grande force du Japon. Il permet en effet à cette puissance mondiale de s’exporter et de faire connaître sa culture.
En France, lorsqu’on pense à la musique japonaise il est presque systématique d’avoir en tête des musiques qui proviennent tout droit d’animés ou de films. Notre pays étant le premier consommateur de manga hors du Japon, ce n’est pas étonnant.
Beaucoup de monde s’intéresse au Japon, à sa culture et par conséquent à sa musique. Cet intérêt multiplie les genres connus mais aussi les moyens de découvertes.
Les opening d’animés prenant appuis sur plusieurs genres, cette pluralité se ressent dans la diversité d’écoute. Que ce soit de la pop, du rock en passant par le rap et le RnB en allant jusqu’au métal. Les groupes populaires auprès des français sont affiliés à un large éventail de styles.
C’est ainsi que s’est par exemple fait connaître le groupe RADWIMPS. À l’origine des bandes originales des films de Makoto Shinkai dont le très acclamé Your Name, ou plus récemment de Suzume.
C’est un groupe qui est aujourd’hui dans l’esprit de beaucoup de Français, de manière volontaire ou non, au vu de la popularité de leur musique ici. C’est par ailleurs grâce à cet élan que le groupe revient en concert à Paris le 28 mai 2023. Annoncé à l’Elysée Montmartre (1300 places), la demande est telle que le tourneur change de lieu pour la Salle Pleyel (1900 places). Si leur première expérience dans l’hexagone en 2015 n’était pas une franche réussite (le groupe peine à remplir le Trabendo -700 places-), leurs nouveaux fans ont la chance, cette fois-ci, de faire de cet évènement un bel instant.
Il existe aussi, au vu de l’intérêt porté à la culture japonaise, un grand nombre de personnes qui font le pas de s’intéresser à sa musique plus en profondeur. C’est pourquoi les conventions existent, donnant lieu à des concerts. Ces évènements crées alors une nouvelle façon de faire découvrir la musique japonaise aux Français. Même si, malheureusement, la pandémie a fortement impacté ce moyen d’écoute et qu’il peine encore à se relancer.
Il semble donc que la musique française se soit exportée de bien des manières auprès des Japonais. Bien qu’une forte tendance aux classiques de l’ancienne génération persiste, les plus jeunes de passage en France sont aussi conquis par les nouveaux arrivants. Réussiront-ils à s’exporter hors de la France d’eux-mêmes et connaître le même succès que leur prédécesseurs ? Rien n’est moins sûr, mais c’est un chemin qui restera intéressant, et révélateur, à observer…