betcover!! : poésie et folie en musique
betcover!! est un projet musical tokyoïte qui brille de par ses multiples influences et sonorités. Voulant s’affranchir des codes de la pop, ce groupe composé aujourd’hui de 5 membres propose une musique mélangeant poésie, mélodie, folie, drame… Afin d’en savoir plus sur leur nature et leur musique, Journal du Japon est parti à la rencontre du fondateur et meneur du groupe, Jiro Yanase.
Qui se cache derrière betcover!! ?
Formé par Jiro Yanase alors qu’il est encore lycéen, le groupe betcover!! débute son activité en 2016. Après deux EPs sortis en 2017 et 2018, les 5 signent avec le label cutting edge, branche du mastodonte Avex, et sortent leur premier album en 2019. Ils réitèrent l’année d’après, puis repartent en indépendant en 2021, année de sortie de leur troisième projet Jikan.
Journal du Japon : Bonjour et merci infiniment d’avoir accepté notre invitation. Tout d’abord, pouvez-vous vous présenter pour les lecteurs qui vous découvriraient aujourd’hui ?
Jiro Yanase : Bonjour, je m’appelle Jiro Yanase. Je suis né à Tokyo et je suis actif dans le groupe betcover!!.
M. Yanase, vous êtes donc à l’origine de ce groupe. Quels ont été vos premiers liens avec la musique et la création de musique ?
Si je me souviens bien, mon oncle m’a acheté une guitare électrique lorsque j’étais à l’école primaire, et je faisais partie du club de fanfare.
Vous jouez aussi de la flûte, un instrument que l’on peut parfois entendre dans vos chansons. Qu’est-ce qui vous a donné envie d’en jouer ?
Je jouais de la flûte dans le club de fanfare lorsque j’étais au collège. J’admirais Jethro Tull, et j’ai également commencé à jouer dans un groupe à ce moment-là.
Pouvez-vous citer quelques-unes de vos plus grandes influences musicales ?
La toute première musique à laquelle j’ai été accro est Raindrops Keep Fallin’ on my Head (de B.J Thomas). J’ai aussi été influencé par la musique disco des années 80 qu’écoutait ma mère lorsqu’elle prenait la voiture.
Comment est-ce que betcover!! est né ?
Tout a commencé lorsque j’étais au collège, avec un ami du club de fanfare.
Pourquoi avoir choisi ce nom de groupe ?
C’est un nom que mon ami m’avait donné et je l’ai gardé car j’aimais bien la manière dont il sonnait. J’ai fait une faute dans l’orthographe anglaise du mot (rires). Mais je l’ai gardé tel quel car c’est facile de le rechercher sur internet.
L’une de vos plus grandes forces est le mélange de nombreux genres musicaux dans le son du groupe. D’où vient cette nature éclectique ?
C’est parce que je ne suis pas trop conscient de la notion de genre. J’aime les scènes créées par une image sonore chaotique.
Pour donner aux lecteurs un premier aperçu du monde visuel et musical de betcover!!, je leur conseillerais la chanson Kaiten・Tenshi (« Rotation et ange »). Comment est né cette dernière ?
C’était il y a longtemps donc je ne me souviens pas de ce que je pensais à l’époque. Cependant, j’ai senti que j’étais capable de créer de la musique visuelle et je me souviens que j’étais très enthousiaste.
Y a-t-il des titres de votre discographie que vous aimeriez particulièrement faire découvrir à un nouveau public ?
Je dirais les trois morceaux Choujin (« Surhomme »), Tamago (« Œuf ») et Aoi issus du dernier album.
Je trouve que votre voix, M. Yanase, ressemble fortement à celle du légendaire chanteur belge Jacques Brel. Vous avez tous les deux une manière de chanter très expressive et théâtrale. Réfléchissez-vous à comment interpréter les paroles en même temps que les écrire ?
J’admire Jacques Brel, donc je suis très content de vous entendre dire cela. Quand j’écris de la poésie, j’ai souvent une approche théâtrale plutôt qu’un sentiment personnel.
L’année dernière, vous avez écrit une chanson intitulée Tabidachi (« Départ ») pour la chanteuse japonaise adieu. Quelle différence avez-vous noté entre écrire pour betcover!! et pour quelqu’un d’autre ?
Je pense que le fait qu’une autre personne chante les paroles est la plus grosse différence. Si j’en ai l’opportunité, j’aimerais retenter l’expérience.
Avez-vous des objectifs pour le futur proche ?
J’aimerais participer à la production de musique pour une œuvre visuelle. Sur le plan personnel, j’aimerais acheter un piano.
Tamago (« Œuf »), chef-d’œuvre d’une discographie déjà grandiose
Sorti le 21 décembre 2022, Tamago est le quatrième album de la discographie de betcover!!. Entre le groovy Ika to Tako no Samba (« La samba du calamar et du poulpe), l’intense Kabe (« Mur »), ou le solennel Tetsu ni Umaretara (« Si tu es né du fer »), chaque morceau a un caractère bien défini et transmet une gamme d’émotions différentes. Faisant suite au très bon Jikan (« Temps ») paru en 2021, ce nouvel opus explore et mêle de nombreuses sonorités inédites. Nul doute que s’il était sorti plus tôt dans l’année, il aurait eu sa place parmi la sélection d’albums J-Music 2022 de l’équipe.
Votre quatrième album Tamago est sorti le 21 décembre 2022. Toutes mes félicitations pour cela. Quand et comment la conception de cet album a-t-elle commencé ?
Tout d’abord, l’idée originale du titre principal est venue vers la fin de la production de l’album précédent. À cette période, il n’y avait pas de rythme et le style de chant était proche de la poésie. Le titre Tamago et le concept qui en découle sont ensuite nés lors d’une discussion avec les membres du groupe.
Comme le reste de votre discographie, la pochette de cet album est très mystique. Pourquoi avoir choisi cette image ?
Je voulais entrer dans les souvenirs de personnes que je ne connais pas, donc j’ai acheté des images sur Amana Images et je les ai édités.
Dans une interview précédente, vous déclariez que votre premier album était une expérience similaire à celle de regarder un film, tandis que le deuxième avait une saveur de performance live. Qu’en est-il de ce quatrième opus ?
Cette fois, j’ai essayé de rendre la performance live elle-même cinématographique.
Vous avez enregistré cet album en une seule prise. Pourquoi avoir pris cette décision ?
En effet, à la manière de la musique classique et du jazz, je ne voulais pas faire de montage sur un PC.
Globalement, l’album est teinté d’une atmosphère mélancolique, sombre et tourmentée. On le remarque dès le premier morceau avec des phrases telles que « Où est le bonheur qui semble être partout ». Quel est le thème majeur de cet album ?
Il s’agit de la mort triviale de quelqu’un qui était vénéré comme un surhomme.
En parlant de surhomme, impossible de ne pas mentionner le titre du même nom, Choujin, potentiellement le plus grandiose de l’album. D’où vient l’inspiration pour ce morceau ?
Je voulais exprimer une histoire tragique à travers la musique de groupe. J’ai été inspiré par le grand musicien japonais Kazuki Tomokawa et le film chinois « Nuits d’ivresse printanière » .
C’est aussi le seul titre qui se dote d’un clip vidéo. Pourquoi avoir choisi celui-ci ? Y a-t-il un message que vous souhaitiez transmettre ?
J’ai choisi cette chanson car c’est l’un des climax de l’album et il dépeint le personnage principal de l’histoire de ce dernier. Je laisse le message libre à l’interprétation de l’auditeur.
La structure de l’album est très cinématographique. L’enchaînement des morceaux donne l’impression d’être plongé dans un film. Dans les paroles ou dans la composition, puisez-vous une partie de votre inspiration dans le cinéma ?
Oui. Films, mangas, romans… Je pense que tout m’influence, y compris même les paysages ou la publicité. Quand j’étais petit, mon rêve était de devenir réalisateur de films, alors cela me fait plaisir qu’on me dise que j’ai un côté cinématographique.
Des mois avant la sortie de l’album, vous expérimentiez déjà certaines chansons lors de vos concerts. Comment décidez-vous de quelle version garder dans l’album ?
Ma musique est en constante évolution donc la version CD fait office d’enregistrement de cette période.
Y a-t-il une chanson en particulier qui a évolué plus que les autres ?
Toutes les chansons évoluent à chaque concert. Encore aujourd’hui, la seconde moitié de Choujin devient de plus en plus longue.
Le morceau H a un univers très intriguant. Il sonne théâtral et élégant, mais de quoi parle-t-il ?
La lettre H est essentiellement de l’argot pour le sexe au Japon [NDLR : H se prononce « ecchi » à la japonaise, ecchi pouvant signifier obscène ou simplement sexe]. Mais la chanson ne parle pas de sexe.
Le morceau éponyme Tamago est également un moment fort de l’album. Ses 8 minutes et 35 secondes à couper le souffle signent le retour des formats longs que vous aviez laissé après votre premier album.
Ce n’est pas mon intention de faire des chansons longues, mais j’ai envie de créer de la musique dramatique qui n’est pas restreinte par les règles de la musique pop.
Sur le site rateyourmusic.com, fréquenté par des centaines de milliers d’utilisateurs dans le monde, Tamago est classé dans le top 15 des meilleurs albums de 2022 tous genres et pays confondus. Comment réagissez-vous à la reconnaissance internationale dont votre musique fait l’objet ?
Je suis heureux que mes chansons et que les chansons japonaises soient si bien accueillies.
Votre nombre de fans augmente de plus en plus en dehors des frontières nippones. Auriez-vous quelques mots à leur adresser ?
Merci d’écouter ma musique. Les messages de fans internationaux me remontent toujours le moral. J’ai hâte de tous vous rencontrer.
Enfin, prévoyez-vous de performer à l’étranger un jour ? En France ?
Ce n’est pas prévu pour le moment mais j’espère venir jouer à l’étranger un jour. En France aussi, bien sûr.
Merci pour vos réponses et pour votre temps ! La France serait ravie de vous recevoir. En attendant, on vous retrouve sur vos réseaux sociaux et votre site officiel :
Et si ce n’était pas clair jusqu’ici, nous invitons tout le monde à écouter le quatrième album studio de betcover!!, Tamago.
Un grand merci à Jiro Yanase et à Lucky du staff de betcover!! pour ce précieux entretien.
1 réponse
[…] “超人” https://www.youtube.com/watch?v=39xoFcWXdns インタビュー記事: https://www.journaldujapon.com/2023/03/12/betcover-poesie-et-folie-en-musique/ […]