Balade automnale dans le jardin japonais d’Albert Kahn
Il existe des lieux français d’où se dégage pourtant une magie japonaise. C’est le cas du musée départemental Albert Kahn, situé à Boulogne-sur-Seine. Tout juste rénové après 6 années de fermeture, le musée met en valeur le travail autour du monde d’un passionné d’images : Albert Kahn. Journal du Japon vous embarque aux portes de Paris pour un splendide voyage dans le jardin japonais d’Albert Khan !
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Un homme ambitieux
Né en 1860 en Alsace dans une famille juive de marchands de bovins, Albert Kahn développe très tôt son goût pour les affaires. Quittant sa région natale (devenue allemande en 1870) pour Paris à 16 ans, le jeune garçon entame une rapide ascension dans ses études et sa carrière de financier dans la banque. Propriétaire de son propre établissement, il devient un des hommes les plus riches de France, mais aussi un grand voyageur pour développer ses affaires.
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En 1898, à 38 ans, il commence à développer sa passion du voyage. En créant les bourses Autour du Monde, il permet à des étudiants de voyager aussi. D’un montant de 16 500 francs (soit 60 000 euros), ces aides vont permettre à 150 personnes de parcourir le monde. Ces boursiers se réuniront par la suite chez lui, à Boulogne pour créer le cercle Autour du Monde et discuter de leurs différentes aventures vécues.
Le monde à perte de vue
En 1908, le banquier commence lui aussi un tour du monde avec Abert Dutertre, un jeune mécanicien formé à la prise de vue cinématographique et photographique et Maurice Lévy qui doit l’aider à développer ses affaires. Le voyage les emmène en Amérique du Nord, Hawaï, au Japon puis en Chine. À son retour, Kahn crée les « Archives de la planète », afin de documenter le monde et ses changements pour les générations futures. Jean Brunhes est nommé directeur scientifique et emploie une douzaine d’opérateurs qui photographient en noir et blanc et en couleur ou filment le monde entier à partir de 1909.
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La Première Guerre mondiale marque l’arrêt des voyages dans le monde, mais Albert Kahn met un point d’honneur à documenter le conflit mondial avec ses prises de vues. Il envoie donc ses opérateurs sur place et constitue un fond exceptionnel.
Le début de la fin
Dans l’espoir de changer le monde à sa façon, l’homme d’affaires met en place de nombreux mécénats scientifiques et sociaux. Précurseur dans ses idées, il crée par exemple une revue de presse diffusée dans l’ensemble du monde. Cependant, la crise financière de 1929 a raison de sa fortune et le philanthrope se retrouve ruiné. Sa maison est rachetée par le département en 1936 et est déjà alors ouverte au public occasionnellement. Le vieil homme a seulement le droit d’y habiter jusqu’à sa mort, sans les meubles et les biens qu’il possédait. Seule une petite rente départementale lui ait accordé. Jusqu’à la fin, il cultive son jardin qui le passionne tant. La Seconde Guerre mondiale éclate et Albert Kahn s’éteint à son domicile dans la nuit du 13 au 14 novembre 1940.
Une demeure au cœur de l’innovation photographique
La demeure d’Albert Kahn, située à Boulogne-sur-Seine, est le théâtre de sa vie. Très tôt, le banquier rachète cet hôtel particulier avec les parcelles qui l’entourent. Le jardin est la première œuvre de sa vie et il le veut varié, représentant des scènes du monde pour y évoquer la paix. Il y invite uniquement ses proches et invités de marque. Avec l’aide de plusieurs jardiniers, dont Louis Picart, il le compose et l’imagine. Le jardin japonais voit le jour entre 1900 et 1927. Pour le compléter, Albert achète deux maisons japonaises au Japon, qu’il fait livrer en pièces détachées et reconstruire par des charpentiers japonais. Des ponts japonais sont édifiés, des carpes koï nagent dans les étangs… L’investissement est énorme !
Une serre est aussi édifiée afin de conserver les dahlias du Japon lors des saisons froides.
Le jardin attenant au musée représente aujourd’hui le plus gros point d’intérêt de cette visite et attire un grand nombre de visiteurs.
Des archives exceptionnelles
Équipées des dernières technologies de prises de vue, notamment de la révolutionnaire photographie autochrome conçue par les frères Lumières et qui propose des clichés en couleur, les « Archives de la planète » constituent aujourd’hui un fond documentaire absolument gigantesques. La collection regroupe 180 000 mètres de films noir et blanc (soit 100 heures de film) et 45 minutes de film en couleur ainsi que des milliers de photographies, l’une des plus grandes au monde pour cette époque. On en découvre une bonne partie dans le musée avec notamment, celles prises au Japon.
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Roger Dumas a été un des opérateurs envoyés dans le Pays du Soleil Levant. Grâce aux « passe-droits » que l’amitié d’Albert Kahn avec la famille impériale lui offre, le photographe a un accès privilégié au pays et photographie le quotidien de la famille. Il assiste même à une cérémonie d’ordinaire très privée, les funérailles de l’empereur Taishō en 1927.
Le Japon, un pays cher à Albert Kahn
Fasciné par ce pays où tout reste à découvrir, Albert Kahn donne une place importante au Japon dans sa vie. Tout commence lors d’un voyage d’affaires sur place, il tombe amoureux des lieux et de sa population. L’homme se lie même d’amitié avec la famille impériale qu’il a reçu chez lui, en France. Pour son plaisir personnel en premier lieu, il photographie les jardins qu’il trouve particulièrement beaux. Ces photos lui serviront à recréer son jardin japonais en France.
Les personnalités françaises comme Auguste Rodin, Anatole France ou Anna de Noailles approuvent ce paysage grandiose et viennent régulièrement le visiter à Boulogne. Ils y retrouvent des cerisiers en fleurs au printemps, des chrysanthèmes et la reproduction d’un mont Fuji, enveloppé d’Azalées.
« J’aime tout particulièrement ce pays et c’est pour cela que j’ai voulu transposer ici au pied de ma demeure, un coin de la terre japonaise », Albert Kahn (A.Thein, France-Japon 1938).
Un nouveau musée conçu par… un Japonais
Depuis avril 2022, le musée départemental d’Albert Kahn a rouvert ses portes après 6 années de travaux. Le nouveau bâtiment qui abrite les collections a été pensé et conçu par un architecte japonais : Kengo Kuma. La façade représente les plis d’un origami. Les immenses baies vitrées permettent de créer un lien entre le musée et le jardin japonais. Ce bâtiment est un véritable hommage à la passion d’Abert Kahn pour le Pays du Soleil Levant.
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Pour s’y rendre
Métro 10, arrêt Pont de Saint-Cloud
Bus
17, 52, 72, 126, 160, 175, 460, 467 (arrêt Pont de Saint-Cloud ou Rhin et Danube)
Tramway
ligne T2 (arrêt Parc de Saint-Cloud, puis traverser la Seine)
Le musée est ouvert du mardi au dimanche (sauf le 1er mai, le 25 décembre et du 1 au 15 janvier).
Le tarif est de 8 euros par personne, mais l’entrée est gratuite tous les premiers dimanches du mois.
Pour plus d’informations, consultez le site du musée.
Envie de créer son jardin japonais chez soi ? Retrouvez vite notre article qui vous aidera étape par étape !