Josée, le tigre et les poissons : un film empreint de poésie
Sorti le 25 décembre 2020 au Japon pour Noël, et le 16 juin 2021 en France pour la fête du cinéma, Josée, le Tigre et les Poissons est un film d’animation japonais au titre intrigant. Adapté d’un roman paru en 1984, c’est le second film du réalisateur Kotaro TAMURA, qui n’est pas parmi les noms les plus connus dans l’hexagone. Il a pourtant participé aux storyboards de nombreuses œuvres célèbres telles que Fullmetal Alchemist Brotherhood, Sword Art Online ou encore le 20e film Pokémon. Avec Josée, le tigre et les poissons, il propose une histoire attachante et dynamique. A l’occasion de la sortie du film en DVD et Blu-Ray, plongeons dans un univers coloré et fort en émotions.
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Josée et Tsuneo à la conquête d’Osaka
Contrairement à la majorité des films d’animation populaires, dont l’intrigue prend place dans la capitale nippone, celui-ci se déroule dans la ville d’Osaka, dans l’ouest japonais. Les fins connaisseurs reconnaîtront sans doute certains lieux-phares de la métropole, grâce aux dessins fidèles à la réalité. Les japonophones décèleront dès les premiers dialogues, le dialecte typique du Kansai, qui apporte une certaine dynamique aux échanges. Nous restons cependant dans une grande ville urbaine, avec des décors vraiment très agréables visuellement.
L’histoire prend place dans le quotidien bien rempli de Tsuneo, un étudiant en biologie marine dont le rêve est d’étudier au Mexique pour y faire de la plongée. Travaillant à mi-temps dans un centre de plongée pour payer ses études, il cherche à accumuler d’autres petits emplois pour financer son projet. Un soir, alors qu’il rentrait chez lui, Tsuneo sauve accidentellement la vie de Kumiko, paraplégique de naissance, condamnée à se déplacer en fauteuil roulant. Il la raccompagne chez elle, auprès de sa grand-mère, qui décide de l’embaucher comme auxiliaire de vie. Tsuneo, ravi à l’idée d’avoir un nouveau travail, accepte avec joie, tandis que Kumiko se montre réticente.
Si leurs débuts sont difficiles, les deux jeunes apprennent petit à petit à s’apprivoiser, grâce notamment à leur passion commune pour les poissons et la mer en général. Également mordue de lecture, Kumiko se fait appeler Josée, du nom de l’héroïne d’un de ses romans français favoris. Jusqu’alors renfermée sur elle-même et plutôt casanière, cloîtrée dans sa chambre, Josée apprend à découvrir le monde extérieur en compagnie de Tsuneo. Elle découvre les beautés de ce dernier, mais aussi ses zones d’ombre : elle est rapidement confrontée à la réalité de la société, le regard des gens vis-à-vis de son handicap et des frustrations que cela engendre. Mais Tsuneo s’attachera à lui fabriquer de beaux souvenirs authentiques et porteurs d’espoir, afin de l’aider à combattre les « tigres » du monde.
Josée, le tigre et les poissons traite de nombreuses thématiques fortes tels que le courage de dépasser ses peurs et d’affronter le quotidien, le dépassement de soi, la conquête de ses rêves. L’accent est également mis sur la compréhension et l’acceptation des sentiments d’autrui, la tolérance et la compassion.
Des personnages hauts en couleurs et des relations complexes
Bien que le scénario ne soit pas des plus originaux et qu’il reprenne de nombreux clichés et éléments-clefs des films d’animation à succès, Josée, le tigre et les poissons se démarque par le réalisme des sentiments et des émotions des personnages. Si on se doute dès le début de la romance naissante entre les personnages principaux, elle est amenée de manière subtile et naturelle. Leur évolution n’est d’ailleurs pas un fleuve tranquille et au départ, ils ne peuvent pas se voir en peinture.
Le réalisateur s’attarde sur les sentiments profonds des personnages : la méfiance de Josée vis-à-vis de Tsuneo, l’incompréhension de ce dernier face au caractère impitoyable de la jeune femme… Et bien d’autres encore. On suit avec plaisir les étapes successives de leur lien, appréciant chaque petit changement dans leurs échanges et leurs attitudes. Le contraste entre le flegmatisme de Tsuneo et la tornade qu’est Josée renforce d’autant plus cette relation électrique entre eux.
Si le film se concentre essentiellement sur cette relation, TAMURA prend soin d’étoffer les points de vue et émotions des autres personnages. Ainsi, nous avons un classique triangle amoureux qui se dessine rapidement entre Josée, Tsuneo et Mai, la collègue de ce dernier au magasin de plongée. Amoureuse de Tsuneo, elle reste cependant en retrait mais ne manque jamais une occasion de tenter de se rapprocher du jeune homme. Aguicheuse et au tempérament fort, elle joue de ses attributs féminins pour séduire son ami, qui semble pourtant y être totalement indifférent.
Le personnage de Hayato, l’autre collègue de Tsuneo, est également intéressant et attachant. De prime abord, il semble être le cliché des personnages secondaires : dragueur et frivole, insouciant mais toujours là pour son ami. On se rend rapidement compte qu’il est très perspicace et a le cœur sur la main. Il se lie facilement avec les autres.
Le réalisateur nous emmène également auprès de Kana, une bibliothécaire mignonne et gentille qui devient la première amie de Josée. Si la relation entre les deux jeunes femmes n’est pas expressément dépeinte, elle reste essentielle au déroulement du scénario. C’est Kana qui suggère à Josée de devenir illustratrice, tant ses dessins sont captivants et fascinants. C’est aussi elle qui l’aide à concevoir son premier recueil d’illustrations.
Enfin, la grand-mère de Josée, Chizu, est particulièrement haute en couleurs : pointe des cheveux violettes, un peu rustre et très franche, passionnée de Pachinko et surprotectrice envers sa petite-fille. Derrière son attitude bourrue, on découvre un personnage attachant et désireux que Josée soit heureuse malgré les difficultés auxquelles elle fait face. Elle semble culpabiliser à l’idée de l’enfermer à domicile, mais soulagée qu’elle finisse par explorer le monde de ses propres yeux avec Tsuneo.
Une mise en lumière de la vision du handicap au Japon
En plus de traiter d’une romance plutôt réaliste, le film aborde des sujets variés et pas toujours mis en avant dans les histoires classiques tels que le handicap. On voit le monde à travers le regard de Josée, son ressenti, et l’aversion que témoignent les gens à son égard. L’une des scènes les plus marquantes et fortes reste sans doute celle où Josée essaie de réserver un ticket de train en autonomie, alors que les guichets ne sont absolument pas adaptés aux personnes en situation de handicap. Elle est perçue comme un poids, une intruse, par les passants de la gare, jusqu’à se faire bousculer violemment par un passant malpoli. Lorsque Tsuneo s’insurge, il décrète que c’est elle qui gêne le passage. Quelques mètres plus loin, le même passant bouscule une vieille dame, l’insulte, mais celle-ci le remet à sa place aussitôt. Cette scène nous permet de comprendre que la vision du handicap au Japon est encore très connotée et négative.
TAMURA, à travers son film, dénonce la froideur des Japonais vis-à-vis des handicaps, notamment physiques, à travers différentes scènes-clefs disséminées habilement tout au long de l’histoire. Au-delà de celle décrite précédemment, dès le début du film, la grand-mère de Josée souligne qu’elle préfère se balader avec elle de nuit pour éviter le regard des gens. De plus, la rencontre entre Josée et Tsuneo naît du fait que cette dernière s’est faite pousser par un passant en haut d’une pente vertigineuse qu’elle a dévalé dans son fauteuil.
Le réalisateur joue énormément sur la frustration que ressent Josée face aux choses qu’elle ne peut faire d’elle-même, et fait contraster ces sentiments avec sa joie de découvrir de petits plaisirs simples de la vie, qui pour nous paraîtraient totalement anecdotiques. Grâce à la tournure que prend le scénario, on fait basculer les points de vues des personnages sur le handicap (nous vous laissons le loisir de le découvrir vous-mêmes). Mais de nombreuses scènes fortes nous rappellent à quel point il est confortable de vivre sans contrainte et qu’il est important d’être particulièrement tolérant envers tous les profils.
Un scénario pas uniquement centré sur le Japon
Un autre aspect intéressant de l’histoire est celui du rêve de Tsuneo : vivre à l’étranger. Il est plus courant de suivre des histoires exclusivement orientées sur le Japon et l’évolution des personnages là-bas, mais on suit avec plaisir et intérêt les péripéties d’un étudiant fauché qui veut traverser le globe pour concrétiser son rêve. On l’accompagne dans ses moments de doute, ses remises en question, l’accumulation de la fatigue due à la multiplication de ses petits boulots … Mais malgré tout, il garde le sourire, car il se rapproche chaque jour de son objectif, tout en passant du temps avec une Josée qu’il apprécie de plus en plus de par son caractère atypique. Le scénario nous permet de nous immerger dans les difficultés qu’éprouvent les étudiants face à leurs projets, le soutien de leur entourage, et les sacrifices nécessaires pour arriver à leurs fins.
De plus, nous sommes loin des clichés habituels des personnages qui rêvent de vivre aux États-Unis, à Paris ou à Londres. Ici, c’est le Mexique qui est mis en lumière, un pays peu souvent vu dans les films d’animation japonaise. Et surtout, le projet de Tsuneo est nourri par une ambition atypique : faire de la plongée avec des poissons que l’on trouve uniquement là-bas. Et c’est quand son rêve, sur le point de se réaliser grâce à ses nombreux efforts, menace de s’effondrer, que le scénario prend un tournant plus sombre. On côtoie un Tsuneo à deux doigts d’abandonner son rêve, découragé. Mais il se raccroche à sa détermination, et suivre ce combat est une piqûre de rappel : ne jamais renoncer à ses rêves les plus fous.
Une réalisation soignée et des dessins réalistes
Les dessins de Josée, le tigre et les poissons sont particulièrement doux et poétiques. Le trait est précis et réaliste, et on reconnaît certains lieux d’Osaka au premier coup d’œil. L’apparence des personnages est travaillée, avec des tenues colorées et élaborées. Les textures sont propres et permettent une bonne immersion dans l’univers de Josée.
Le film s’inscrit dans une trame réaliste, sans présence d’éléments fantastiques, contrairement à d’autres œuvres phares de ces dernières années. Pourtant, lorsqu’on plonge dans l’imagination fertile de Josée et qu’on parcourt Osaka sous l’eau, on se sent transporté dans un univers onirique captivant. Les scènes de plongée sont également saisissantes. L’animation est relativement bien gérée, avec quelques manques de fluidité çà et là. Les dessins de Josée sont hauts en couleurs, poétiques et collent parfaitement à l’ambiance générale. Dans certaines scènes, on s’attarde sur des gros plans sur les pas de Tsuneo ou les traces des roues du fauteuil de Josée dans la neige, réalistes et immersifs. De manière générale, la nature et les saisons sont bien retranscrits, le résultat est homogène et cohérent. Les scènes les plus spectaculaires sont celles liées à la mer, la thématique récurrente de ce film.
Même si on retrouve plusieurs codes propres aux films d’animation telles que certaines scènes un peu exagérées ou des réactions quelque peu extravagantes, le réalisateur a souhaité maintenir un équilibre entre la réalité et l’imaginaire possible grâce à l’animation. De plus, les dessins sont épurés : suffisamment détaillés pour être convaincants, mais pas trop pour éviter de surcharger le tout. Certaines scènes font penser à des aquarelles par la douceur et la diversité des couleurs. Enfin, un soin particulier est apporté à certains détails, notamment ceux du fauteuil roulant de Josée ou du matériel de plongée de Tsuneo, Mai et Hayato. L’ambiance un peu vieillotte de la maison de Josée et sa grand-mère apporte son lot de poésie aux scènes qui s’y déroulent.
Un coffret DVD généreux et fidèle à Josée
Pour célébrer la sortie de Josée, le Tigre et les Poissons en DVD et Blu-Ray, Journal du Japon a pu découvrir en avant-première un coffret DVD grâce à Eurozoom, les distributeurs officiels du film en France. Nous devons admettre que ce dernier est particulièrement bien fourni et permet de replonger immédiatement dans l’ambiance propre au film.
Le coffret se compose de deux CD : le premier pour le film, et le second pour une interview du réalisateur de 62 minutes. On retrouve également un livret de 28 pages contenant des photos issues du film, mais également des interviews écrites des seiyuu (comédiens de doublage) de personnages principaux. On découvre ainsi que les doubleurs de Tsuneo et Josée sont originalement des acteurs de live-action et se sont prêtés au jeu du doublage. Ils nous racontent leurs difficultés et leurs joies, comment ils se sont appropriés les personnages.
Le réalisateur, également interviewé, lève le voile sur de nombreux choix de réalisation, que ce soit pour les couleurs, l’ambiance ou même les personnages. Il nous dévoile que Josée est une œuvre originalement écrite en 1984 et qu’un live-action avait déjà été fait en 2003. Il amène ainsi sa propre vision de l’histoire de Josée grâce à l’animation. Il révèle sa direction artistique, et on apprend de nombreuses anecdotes sur le projet de Josée.
Mais ce qui marquera le plus les esprits des spectateurs est sans doute le petit recueil d’illustrations de Josée, tout droit issu d’une scène-clef du film, et à propos duquel nous resterons les plus discrets possibles afin de ne pas vous gâcher la découverte de l’histoire. Nous avons beaucoup apprécié la présence de ce petit livret et nous espérons qu’il en sera de même pour les personnes qui achèteront ce coffret. Les dessins sont doux et chaleureux.
Josée, le tigre et les poissons, en Blu-ray : le concours
En partenariat avec le distributeur du film, Eurozoom, Journal du Japon vous propose un jeu concours pour tenter de gagner 5 exemplaires de l’édition Blu-ray de Josée, le tigre et les poissons dès le 3 novembre. Pour participer au concours, il faudra surveiller nos réseaux sociaux (Facebook, Twitter et Instagram) et répondre aux questions posés. Attention : pour qu’un maximum de personnes aient leur chance, le nombre de lots est limité à un par personne et par adresse postale. Les lots ne pourront être expédiés qu’en France métropolitaine.
Josée, le Tigre et les Poissons est un film qui marque par la profondeur des messages véhiculés dans l’histoire, des dessins soignés et des décors reproduisant fidèlement la réalité. Le film est fort de ses émotions authentiques grâce auxquelles il est facile de s’identifier aux personnages, et d’un univers poétique et atypique, comme en témoigne le titre. Onirique, on se laisse transporter dans l’imaginaire florissant de Josée. Si ce n’est pas encore fait, n’hésitez pas à plonger au cœur du quotidien de Josée et Tsuneo, dont l’histoire vous émouvra certainement.
Chizu Yamamura