Le Silence de l’amour : les années Lennon au Japon
Cette rentrée littéraire prend des airs de musique bien connus avec la sortie récente du Silence de l’amour, roman de François Simon, chevalier des Arts et des Lettres, écrivain mais aussi critique gastronomique. En amoureux du Japon et des Beatles, il nous propose un voyage sentimental sur les traces des années Lennon au Japon. En route pour le Japon, les montagnes retirées des Alpes japonaises à Karuizawa où le couple Yoko Ono et John Lennon ont pu y connaître des parenthèses de paix durant trois étés !
Karuizawa : sur les traces du couple
« Une des balles perdues tirée par Mark Chapman sur John Lennon, le 8 décembre 1980, a traversé l’Atlantique. Elle m’a atteint en plein cœur. Elle a tué mon innocence.
Je me vois encore tituber mentalement dans la rue Santeuil, à Nantes. J’ai dû glisser la main sous mon blouson de cuir pour chercher la douille comme si elle avait percé ma candeur. On venait de m’arracher de l’enfance. S’interrompaient un pan musical de ma vie, la bande-son de mon âme » – page 7 (Chapitre 1)
Le roman est raconté à la première personne et la musique de John Lennon a eu un grand impact sur la vie du narrateur depuis qu’il est très jeune. Amoureux lui aussi d’une Japonaise, une fleuriste, il se lance sur les traces du couple iconique. Il descend dans les mêmes hôtels et traverse les mêmes paysages que l’ex-Beatles et sa femme. Mitsuko, la Yoko du narrateur, le rejoindra-t-elle dans son périple japonais ?
« Il fallait que je parte, maladie récurrente chez moi se déclenchant à la moindre contrariété. Non point pour rejoindre les larmes et les bougies de Central Park, renifler l’asphalte devant le funeste Dakota Building où John Lennon fut révolvérisé devant sa femme, Yoko Ono. Mais dans un lieu où il serait encore vivant dans l’essence, virginal dans son évocation, épuré dans son sentiment. » – page 13 (Chapitre 2)
« Il y avait là un lien que pratiquement jamais les biographies de John Lennon n’ont évoqué. Et pour cause, il ne se passa rien à Karuizawa, au Japon, dans la province de Nagano. A partir de 1977, John Lennon et Yoko Ono y passèrent trois étés. […] En tout, [ils] passèrent neuf mois au Japon. Le couple cherchait dans l’Archipel une résidence secondaire où il aurait pu séjourner librement. Ils qualifièrent cette époque bénie comme « le silence de l’amour ». – pages 18 et 19 (Chapitre 3)
Le récit alterne entre les aventures du narrateur au Japon, sur les traces de son idole, et les nombreuses anecdotes musicales ou sur la vie du couple iconique. L’amour qui a uni John Lennon et Yoko Ono, la haine du public teintée de racisme contre cette dernière, des informations sur la création de musique… Des éléments du quotidien au Japon se mêlent dans un roman écrit dans un style fluide qui invite à tourner les pages. Le train est le moyen de transport incontournable au Japon et donne lieu à de belles descriptions de moments ordinaires avec d’autres voyageurs et des paysages qui défilent à grande vitesse… C’est aussi les fameux ekiben, les plateaux repas vendus dans les gares, un voyage de tous les sens comme le décrit si bien le critique gastronomique ! Et des boiseries du wagon, comme une gymnastique mentale, le narrateur en vient à parler des Beatles et de leur morceau Norwegian Wood.
« Ses accords avec le métal, les banquettes, le verre. J’essayais de deviner la nature du bois verni. Visiblement, il devait y avoir un certain boxon parmi mes neurotransmetteurs. Le nerf vague tire-bouchonnait. Un afflux de propositions s’enclencha comme un panneau d’aéroport avec le cliquetis des destinations. Bing : voilà le paulownia. Non. Le contreplaqué. Non. Les noix de cajou, un canoë. Non et non ! Puis, il y eut une dépression brusque, ma tête s’ouvrit comme une corolle, un air montait dans le lointain comme une Sainte Vierge phosphorescente. Tout de suite, je reconnus le morceau Norwegian Wood, des Beatles. » – page 60 (Chapitre 7)
Sans être fan des Beatles, François Simon réussit à maintenir l’intérêt du lecteur en agrémentant ici et là divers éléments de la culture japonaise. Cela pourra être de l’ikebana, art floral, comme du kintsugi, l’art de réparer les choses cassés avec de l’or. D’ailleurs, la culture japonaise est particulièrement bien décrite et l’on voit que l’auteur est un grand connaisseur du pays (ainsi que des Beatles). Le livre plaira autant aux fans du groupe qu’aux japanophiles ou même aux curieux en quête de voyage vers le pays du Soleil Levant.
« Savoir recoller les morceaux, comme dans l’art du kintsugi (« la menuiserie dorée ») ou la manière de transformer une catastrophe domestique (un vase cassé) en œuvre d’art. La porcelaine brisée retrouvait une nouvelle vie grâce à de l’or en poudre, rejoignant ainsi l’esprit du wabi-sabi, l’art de la perfection imparfaite. […] Question brisures et cassures, Yoko avait beaucoup donné dans sa vie. Elle en fit une œuvre, Men Piece (morceau recollé); n’hésitant pas à casser des vases et des tasses, histoire d’enfoncer le clou. » – pages 77-78 (Chapitre 9)
A travers le livre, le lecteur en saura davantage sur l’artiste Yoko Ono, injustement détestée…
Plus d’informations sur le site de l’éditeur.
François Simon signe avec Le Silence de l’amour, sorti dans votre librairie préférée depuis le 25 août, un roman personnel et documenté non pas que sur John Lennon mais aussi et surtout sur le couple qu’il formait avec Yoko Ono. En mêlant la vie des deux icônes à celle du narrateur et Mitsuko, le lecteur ne s’ennuie pas et prend plaisir à découvrir de nombreuses anecdotes sur les Beatles tout en apprenant au détours de descriptions des éléments de la culture japonaise qui raviront tout le monde, même ceux qui connaissent très peu le Japon.