[Interviews] Les Contes Japonais sublimés par les Éditions le Héron d’Argent
Difficile de s’intéresser au Japon en passant à côté de ses contes, qu’ils soient populaires ou religieux. Ces mythes et légendes font partie intégrante du folklore japonais, et les références dans les œuvres d’hier et d’aujourd’hui n’en manquent pas. Si l’on commence à bien connaître l’origine du renard à neuf queues de Naruto, on connait moins le fameux Susanoo de Sasuke. Et qui est donc ce Yamata-no-Orochi que Shaman King nous dévoile aux côtés de Ryu ? Tant d’êtres qui font la particularité de la culture japonaise, que cela soit des yōkai ou des dieux, des messagers ou des esprits… Alors rien d’étonnant de voir de nombreux ouvrages traités du sujet. Et parmi tous ceux que l’on trouve aujourd’hui sur le marché, l’un se démarque tout particulièrement pour le soin apporté à son esthétisme : chez les Éditions le Héron d’Argent, on ne fait pas les choses à moitié, et Contes Japonais en est le parfait exemple.
Un merveilleux recueil
Magnifiquement illustré par l’artiste Shiitake, Contes Japonais est le premier ouvrage des Éditions le Héron d’Argent s’intéressant à la culture japonaise. Aux côtés des Contes Merveilleux ou de l’Encyclopédie des Dragons Légendaires, pour ne citer qu’eux, Contes Japonais s’inscrit dans une collection d’ouvrages de la catégorie Beaux-livres qui ne vole pas son titre : avec son grand format de 24 x 32 cm et ses dorures en or, la maison d’édition souhaite proposer un ouvrage de luxe qui marquera les esprits. Et l’on peut dire que le pari est réussi : que cela soit la couverture ou les pages, les illustrations sont sublimées par la qualité de l’ouvrage. Mais ce qui est d’autant plus remarquable, c’est que cette relation galvanisante va également dans l’autre sens : les illustrations de Shiitake viennent à leur tour sublimer les mythes et légendes du Japon que nous raconte Vanessa Callico. Si nous évoquions plus haut le fameux kistune à 9 queues, Susanoo ou le Yamata-no-Orochi, ce n’est pas pour rien : découvrez ou redécouvrez leurs histoires, aux côtés des légendes de Kaguya, Urashima Taro ou encore d’Ame-no-Uzume, le tout accompagné de magnifiques illustrations dont on prend plaisir à admirer les moindres détails. Chaque conte est accompagné d’un haïku et d’une mise en page remarquable. En somme, un beau livre objet que l’on prend plaisir à sortir et ressortir pour se plonger dans cette incroyable culture de contes.
Sorti en fin d’année 2020, Contes Japonais a pu voir le jour grâce à une campagne Ulule qui a explosé les scores : avec un financement à 1 274%, on peut dire que l’ouvrage était (très) attendu ! Aujourd’hui, vous pouvez vous le procurer sur le site officiel de la maison d’édition pour seulement 29,90 euros. Pour l’occasion de cette sortie littéraire qui nous a marqué, nous vous proposons une interview exclusive avec Vanessa Callico et Shiitake.
Une passion pour les contes et légendes du monde
Journal du Japon : Bonjour Vanessa et merci pour le temps que vous nous accordez ! Pour commencer, pouvez-vous vous présenter à nos lecteurs ?
Vanessa : Bonjour ! Je suis auteure et éditrice aux éditions le Héron d’Argent, une maison d’édition spécialisée dans les ouvrages aux finitions de prestige présentant une grande appétence aux mondes imaginaires.
Après avoir écrit une trilogie de romans de fantastique historique (Les Sept Portes de l’Apocalypse) et des ouvrages de pédagogie musicale (mon premier métier), je me concentre désormais sur l’écriture de beaux livres présentant des sujets variés, ainsi que sur la destinée de notre maison d’édition actuellement en plein essor.
Comment est née la maison d’édition Le Héron d’Argent ?
Mon premier roman (La Croisade des Carpates), co-écrit avec Diana Callico, a séduit tout de suite un public important. Alors qu’il était publié chez une autre maison d’édition, nous avons alors repris les droits d’exploitation de l’ouvrage et fondé notre propre structure. Le nom lui-même nous a été inspiré par un véritable héron qui observait la route de retour du festival des Imaginales, alors que nous cherchions activement un nom pour notre future maison d’édition. Ses plumes semblaient briller sous le soleil…
Quelle est d’ailleurs sa ligne éditoriale ?
Les Éditions le Héron d’Argent défendent une littérature exigeante d’écrivains et d’artistes proches de leur public et passionnés par leur Art. Notre ligne éditoriale ? Le beau, les finitions élaborées, l’originalité. Dorures, grands formats, grands artistes illustrateurs et belles plumes sont de la partie.
Quelle est votre relation avec le Japon ?
Un pays évocateur de littérature, de rêve et de culture. C’est également le pays que nous avons choisi avec mon mari pour passer notre lune de miel !
Comment est né votre ouvrage Contes japonais ?
Cet ouvrage est né, à l’origine, de notre rencontre à Japan Expo avec l’artiste Shiitake. Suite à cela, nous avons commencé à travailler sur l’ouvrage Contes Merveilleux, portant sur les contes européens. Travailler sur les très riches contes et légendes de l’archipel était ensuite une évidence.
Quel travail représente un tel ouvrage ?
Colossal ! Déjà, chaque illustration de Shiitake est une véritable œuvre d’art. Et cela prend du temps d’étudier la mythologie japonaise et les légendes si lointaines de ce pays, pour pouvoir en transmettre les plus belles perles.
Contes japonais a pu voir le voir grâce à une campagne Ulule qui a explosé le compteur : plus de 63 000 euros récoltés sur un objectif de 5 000 euros. Est-ce que vous vous attendiez à un tel succès ?
Ce fut une très belle surprise, bien que nous sachions que l’ouvrage soit très attendu par les lecteurs et lectrices. Nos campagnes Ulule sur nos beaux livres sont très prisées et explosent régulièrement le compteur.
Selon vous, qu’est-ce qui fait l’originalité de votre ouvrage et qui a pu rassembler autant de monde ?
La thématique japonaise est très appréciée, ainsi que les finitions de prestige de notre collection de beaux livres, tableaux et thés. Nous disposons d’un public enthousiaste et fidèle. L’art lui-même de Shiitake est absolument exceptionnel et connaître les mythes et légendes du Japon a beaucoup intéressé le lectorat.
Comment avez-vous procédé pour sélectionner les contes de cet ouvrage ? On voit souvent plusieurs versions d’une même histoire qui diffèrent peu les unes des autres. Comment avez-vous tranché pour Contes Japonais ?
Nous avons tenté de nous approcher au mieux de l’esprit des contes, en adaptant certaines conventions littéraires de la tradition de l’archipel, représentées par exemple par les haïkus d’introduction.
Quel est le conte qui vous a personnellement le plus touché et pourquoi ?
J’ai une appétence particulière pour le contes du pêcheur Urashima-Taro et de la tortue, car il parle du passage du temps, des choix de destinée et de leurs conséquences. Et puis, il est visuellement impactant de par sa fin qui me touche. J’avais découvert ce conte très jeune et il a participé à mon affection pour le Japon et ses légendes.
Pouvons-nous espérer voir paraître un nouveau livre sur la thématique du Japon dans votre collection ?
Évidemment ! Nous avons de nombreuses surprises à venir et n’hésiterons pas à retourner sur les rives japonaises dans nos prochaines aventures…
Affaire à suivre donc…
Une artiste à suivre de près !
Journal du Japon : Bonjour Shiitake et merci pour le temps que vous nous accorder ! Pour commencer, pouvez-vous vous présenter à nos lecteurs ?
Shiitake : Après avoir été diplômée de l’université privée des arts et de la culture d’Oita, j’ai créé l’atelier Gensodo. J’y dessine des personnages originaux dont le concept se résume en deux mots : « beau » et « réconfortant ». Je participe à des expositions au Japon et à l’étranger, mais aussi à des conventions.
Mon activité professionnelle est principalement centrée autour de la ville de Kitakyûshû, dans le département de Fukuoka, où je crée et dessine des affiches, des emballages et d’autres produits en me basant en général sur des designs de princesses. Il m’arrive également de participer à des collaborations. C’était par exemple le cas pour Contes japonais.
Pourquoi avoir choisi d’exercer votre métier sous un pseudonyme ? Et comment avez-vous choisi ce pseudo ?
À la base, mon pseudonyme n’a pas de rapport avec mon activité. En primaire, quand on changeait de place, on se choisissait un surnom afin de mieux s’intégrer dans le groupe. Nous avions choisi de prendre des noms de champignon, alors j’ai choisi Shiitake, et les autres ont choisi d’autres champignons. On a choisi ce thème parce qu’on trouvait qu’il s’en dégageait une atmosphère un peu étrange, ce qui nous amusait beaucoup.
Ensuite, au collège, j’échangeais des bandes dessinées avec ma meilleure amie par correspondance, et je me suis rappelé de ce surnom, alors j’ai choisi d’en faire mon nom de plume. Notre correspondance a duré huit ans, j’ai lancé Gensodo et je l’ai gardé. Je trouve que « Shiitake » me correspond bien. Mon vrai nom englobe tout ce que je suis en dehors de mon travail d’illustratrice, alors j’accorde beaucoup d’importance au pseudonyme que j’utilise uniquement pour cet aspect de ma vie.
Est-ce qu’il y a une différence, entre travailler avec un auteur japonais et un auteur français ?
La différence la plus évidente est la barrière de la langue, mais heureusement, nous étions assistées par un interprète très talentueux. Cela nous a permis de travailler ensemble sans problème.
Pour ce qui est du travail d’illustration, je pense que les Japonais et les Français ont des sensibilités légèrement différentes qui s’expriment de façon différentes. Les illustrations que je publie via Gensodo n’ont pas la même popularité en fonction du pays, et je trouve cela très intéressant.
Quelle est l’illustration qui vous a procuré le plus de plaisir a réalisé dans Contes japonais ?
Quelle que soit l’illustration, j’ai travaillé très dur pour faire ressortir ce que je voulais exprimer dans chaque dessin, mais si je devrais choisir un personnage : cela serait Inari Hime. C’est une déesse qui apporte des récoltes abondantes, et ses serviteurs sont des renards. J’ai essayé de faire en sorte que la composition de l’illustration donne subitement envie de la vénérer. Je suis très heureuse qu’elle ait été choisie pour la couverture.
À l’inverse, quelle est l’illustration qui vous a posé le plus de difficulté à réaliser ?
C’était celle de Yuki-onna. Contrairement aux autres œuvres originales, j’ai du me baser sur les designs déjà existants. J’ai fait de mon mieux pour essayer de lui donner l’image que je voulais, mais c’est un yôkai vraiment terrifiant, ce qui m’a poussé à créer quelque chose de vraiment différent de ce que je dessinais habituellement.
Quelles sont vos influences artistiques ?
Alphonse Mucha, Mutsumi Inomata, Cicely Mary Barker…
Chez Journal du Japon, nous aimons tout particulièrement l’illustration de Tamayori, pouvez-vous nous raconter l’histoire de cette réalisation ? Comment l’avez-vous construite ?
Dans ma ville natale, j’avais déjà dessiné sa grande sœur, Toyotama Hime, pour un autre travail. Tamayori faisait partie des illustrations que j’avais vraiment très envie de dessiner. En plus d’être la fille du dieu de la mer et de pouvoir se transformer en dragon, ce personnage a élevé l’enfant de sa grande sœur, ce qui lui donne une gentillesse très maternelle. C’est cette douceur que j’ai essayé d’exprimer en dessinant. Je me suis dit que ce serait joli de décorer ses cornes et ses écailles de fleurs de glace, et je me suis beaucoup amusé en le faisant. Je suis ravie qu’elle vous plaise !
Quelle est la suite de vos aventures en tant qu’illustratrice ?
À la base, je travaille surtout seule, en me concentrant sur Gensodo, et je compte continuer à faire de même. Depuis l’année dernière, j’ai moins de demandes que d’habitude, à cause du coronavirus, mais si je continue à poursuivre mon chemin sans trop d’encombres, je suis sûre que j’aurai de nouvelles opportunités, une fois que les choses se seront calmées.
Merci à Vanessa et à Shiitake pour les interviews. Il ne fait aucun doute que Journal du Japon sera au rendez-vous pour la suite des aventures japonaises des Éditions le Héron d’Argent. Et en attendant, nous profitons des Contes Japonais comme il se doit. L’ouvrage nous a convaincu, et nous ne doutons pas que vous y trouverez également votre bonheur !