Bravely Default 2 : votre bravoure vous fera-t-elle défaut ?
Bravely Default débarque sur console de salon ! Licence connue des joueurs de J-RPG, les précédents jeux de Tomoyo Asano étaient parues uniquement sur console portable de Nintendo jusqu’à maintenant. C’est donc un cap qui est franchi, et nous allons voir ce que donne ce Bravely Default, nouveau venu, mais ce que l’on peut déjà vous dire, c’est que cela fait plaisir d’avoir un RPG à l’ancienne, à notre époque !
Contexte & Histoire :
L’historique de la saga Bravely est un peu chaotique, revenons donc dessus quelques instants pour mettre l’essence de Bravely Default 2 en perspective. Tomoyo Asano, qui travaille chez Square Enix lance la production de Bravely Default sur 3DS, dont la sortie au Japon remonte à 2012. Le jeu connait un certain succès, et une majorité des ventes se fait en dehors du Japon. Son point fort tient en ses personnages et leurs dialogues, particulièrement bien écrits, portés par un design et un système délicieusement oldschool. L’ensemble des joueurs est cependant unanime pour mettre en évidence un gros « default » : sur la dernière partie du scénario, le jeu connait une répétition (littéralement), qui plombe l’expérience. Le jeu conserve malgré tout une bonne réputation, et une suite intitulée Bravely Second voit le jour. Cette dernière est une continuité du premier opus, nous y retrouvons certains personnages, et le point noir du précédent jeu est corrigé. Mais le projet est une nouvelle fois pointé du doigt : il ressemble trop à Bravely Default.
Le développement de la licence Bravely est alors en berne, et Asano développe alors Octopath Traveler, un RPG encore plus oldschool faisant la part belle au pixelart, dont vous pouvez retrouver notre avis ici (Spoiler Alert : il est très bien !). Boosté par ce succès, Asano remet les couverts autour de la saga Bravely, mais en lui faisant prendre un nouvel élan : le jeu sera désormais sur la console de salon de Nintendo, la Switch. Nous avons donc ici un numéro 2 du même genre que pour un Final Fantasy. Un même esprit, mais un épisode numéroté qui introduit de nouveaux personnages et une épopée qui ne tient pas compte des anciens jeux. Si la saga Bravely est amenée à perdurer, il y a fort à penser qu’un Bravely Default 3 gardera le même cap.
C’est donc sur cette base que Bravely Default 2 puisse ses racines. L’histoire prend place dans le continent d’Excillant, lui-même divisé en cinq royaumes, et où les 4 cristaux primordiaux (eau, feu, vent et terre) régulent la nature. Il y a cependant des catastrophes climatiques au sien de ce monde, et l’origine vient d’une utilisation malintentionnée de ces cristaux. Vos quatre compagnons d’aventure sont amenés à devenir les héros de la lumière qui sauveront le monde. Bon, quatre cristaux dérobés à retrouver, des ̶g̶u̶e̶r̶r̶i̶e̶r̶s̶ héros de la lumière : l’affiliation à Final Fantasy est à peine cachée (l’ambiance mignonne et guillerette des personnages en SD sur fond de flûte de pan rappelle aussi Final Fantasy 9). Mais que nenni, c’est dans les vieux pots qu’on fait les meilleurs RPG, et Bravely Default assume pleinement ce classicisme.
Le prologue du jeu se veut quand même extrêmement conventionnel dans sa narration. Tout est un peu téléphoné, et on commence à avoir peur de s’ennuyer ferme avec un soft sans surprise. La fin du chapitre 1 vient cependant évincer ces doutes, et le scénario prend son envol. Les discussions et les quêtes annexes seront l’occasion d’en apprendre plus sur le lore du jeu, mais surtout de connaitre un peu mieux vos quatre héros. Il manque malgré tout à Bravely Default 2 ce petit supplément d’âme qu’avait le premier du nom. Des personnages comme Edea ou Ringabel manquent au titre. Sans être mauvais, un joueur ayant fait les précédents opus ressentira une petite frustration. Rien de condamnable toutefois, les nouveaux joueurs y trouveront certainement leur compte.
En parallèle de la trame principale, vous trouverez bien entendu les habituelles quêtes annexes, des monstres rares à abattre, et un jeu de cartes « Barrage et Domination », sorte de mélange entre la bataille et le Go.
Le détail du testeur-râleur : il est en revanche vraiment dommage que, comme pour d’autres jeux, les voix japonaises ne soient sélectionnables qu’après avoir commencé une partie ET avoir eu accès aux options. Condamné à regarder l’introduction en anglais.
Gameplay & Combat :
Voilà tout ce qui fait le sel de la saga Bravely : ses systèmes d’Astérisques (de job) et de Brave/Default !
Le premier est assez connu des joueurs de J-RPG, et a fait les belles heures des premières générations de Final Fantasy. Les rôles de Mage noir, Mage Blanc, Guerrier, Voleur, etc, sont des jobs qui peuvent être assignés à chacun de vos personnages entre les combats. Cela vous permet de customiser votre team à l’envie, et selon les besoins d’un affrontement. Le changement de job s’accompagne d’un changement de tenues, et Final Fantasy X-2 avait su remettre au goût du jour cet aspect.
Dans Bravely Default, cela s’appelle des Astérisques et vous les obtenez en battant certains Boss. Si l’acquisition de nouveaux cristaux permet de dévoiler le potentiel de vos personnages, c’est surtout via vos Astérisques que vous développerez votre équipe. Et pour le coup le jeu est très généreux ! Pas moins de 24 astérisques seront à votre disposition, permettant de créer des équipes très variées. Des compétences passives très utiles sont disséminées çà et là parmi ces jobs. Par exemple, le mage noir peut apprendre au niveau 9/12 Attaque Aspire, qui permet de régénérer des PM lorsque l’on fait une attaque physique. Pas très utile de bourinner à l’arme avec un mage nous direz-vous ? En effet, mais les compétences passives sont acquises pour le personnage, quel que soit son job. Il peut donc s’en équiper tout en passant Défenseur, ce qui est tout de suite bien plus intéressant : une classe qui peut s’équiper d’armes lourdes bénéficiera alors d’un soin de PM gratuit. Mais cela demandera de leveler le job de Mage Noir pendant un moment, simplement pour cette compétence.
Dans le même genre, le job de Dompteur permet d’apprendre Force Bestiale (+10% d’attaque à chaque Brave utilisé jusqu’à la fin du tour) au niveau 7, et Eco PM (consommation de PM réduite de 20%) au niveau 10, qui seront utiles pour une classe d’attaquant ou de mage. Il faut donc s’attarder un peu sur son planning d’évolution en tentant de se projeter à moyen terme.
Chaque personnage peut s’attribuer deux classes : une principale et une secondaire. La première définira votre apparence, vos statistiques, et les items dont vous pouvez vous équiper. La secondaire vous permet d’avoir accès aux techniques et magies apprises. Vous pouvez par exemple passer votre héros en Défenseur, et lui donner accès aux magies de soin apprises précédemment avec le Mage Blanc pour vous confectionner un paladin : un tank capable de soigner. Via ces compétences, le jeu dévoile encore plus son potentiel. Lorsque qu’on les ajoute aux effets d’un équipement, du job secondaire ou du Brave et Default, le jeu devient tout de suite plus tactique. De la tactique en préparation avec les compétences, et pendant les combats avec les Brave et Default.
L’autre système est par contre propre aux titres Bravely. Durant un combat, vous pouvez choisir de mettre un personnage en Default, autrement dit en défense (jusque là, rien de nouveau), mais cela va aussi lui faire accumuler un tour d’avance ! Lors de son prochain tour, ce personnage pourra donc réaliser deux actions consécutives sans pénalité. Vous pouvez cumuler jusqu’à trois tours, et donc réaliser quatre actions à la suite (les trois stockées + celle du tour en cours) avec la fonction Brave. Mais le Brave ne s’arrête pas là ! Vous pouvez également consommer jusqu’à trois tours en avance, sans aucun stock, pour immédiatement enchaîner les attaques, quitte à vous endetter de 3 tours. Le contrecoup : à vos trois prochains tours, votre personnage ne pourra rien faire, pas même se défendre. Enfin, sachez que l’ennemi dispose aussi de ces fonctions ! Les monstres du début de l’aventure ne s’en servent pas beaucoup, mais au fil de l’épopée, cet usage leur sera bien plus fréquent, et il va sans dire que les Boss axent leur stratégie là-dessus.
C’est d’ailleurs toute la spécificité de la saga Bravely Default : mal jauger un adversaire et abuser de Brave peut vite vous mettre en Game Over. Imaginez le scénario suivant : vous utilisez tous vos tours d’avance avec des Brave, mais votre adversaire se met en Default et survit à toutes vos attaques. Non seulement vous devrez attendre 4 tours pour attaquer, mais vous n’aurez aucune garde, et votre adversaire aura un tour en stock grâce à son Default. Les monstres sont visibles sur le terrain, et c’est un contact avec eux qui déclenchera le combat. Mais gare à vous si plusieurs ennemis vous repèrent sur la carte et vous touchent en même temps. Le premier avec lequel vous entrerez en contact déclenchera un combat, et lorsque vous aurez occis le groupe d’ennemis, le suivant arrivera tout de suite, sans passer par la case départ. Il est possible de vite se faire surmener à ce jeu-là.
Durant le prologue du jeu, on vous prend vraiment par la main. Déjà avec Sloan, qui sera un personnage de soutien dans votre équipe pendant un bon moment. Vous ne le contrôlez pas, mais cet allié invité intervient à chaque tour, soit pour asséner un puissant coup qui one shot un monstre, soit pour effectuer un gros soin, soit pour ressusciter un allié. Autant dire qu’il sera difficile de perdre un combat tant qu’il est là.
Ensuite, le jeu vous donne beaucoup de petits didacticiels sous forme de panneaux explicatifs. Autant c’est essentiel pour présenter le fonctionnent de Brave et Default, autant on se serait passé de la note nous disant qu’un point de sauvegarde à la fin d’un donjon signifie qu’un boss est juste derrière. Après avoir passé les premières heures de jeu, ces aides disparaissent, parfois même trop : on nous indique en effet assez mal que des informations très intéressantes sur les capacités des jobs se trouvent dans le sous-menu didacticiel, dans la rubrique « souvenirs ». Il en est de même avec certaines compétences dont l’effet est décrit succinctement, en passant sur leurs mécanismes avancés. Un peu à la manière d’un jeu Pokémon, où seuls les fouineurs connaîtront les coefficients multiplicateurs d’une attaque très efficace, ou les probabilités d’EV et IV. Bref, des détails qui demanderont des recherches aux plus intéressés.
Enfin, le système de PC (point de compétence) réserve une dernière fourberie. Pour accumuler des PC et monter vos jobs, il ne faudra pas nécessairement affronter des ennemis puissants. En effet, contrairement à l’XP et à l’argent, le nombre de PC lâché par les monstres n’augmente pas très vite au fil des chapitres. Pour maîtriser vos jobs, il vaut bien mieux retourner voir des mobs de bas niveau, et enchaîner des combats. Atypique pour un RPG, n’est-ce pas ? En utilisant des friandises pour monstre, vous pourrez d’une part les attirer vers vous (lorsque votre niveau est trop haut, ils s’enfuient en voyant vos gros muscles), et d’autre part enchaîner aléatoirement plusieurs combats. Le jeu vous y encourage même. En multipliant les combats, vous devrez vaincre plusieurs vagues de monstres sans être régénéré en PB entre chacun, donc attention à ne pas abuser des Braves dès le début ! En contrepartie, un coefficient multiplicateur sera appliqué à vos PC. Si chaque vague est bien fournie en ennemis, il n’est pas rare de se faire jusqu’à 600 PC en un coup ! Plus qu’il n’en faut pour passer plusieurs niveaux d’une traite.
Graphisme & Musique :
Dernier aspect et non des moindres, la bande-son et les graphismes du jeu. Visuellement, la saga a très peu évolué depuis ses débuts, si ce n’est que les personnages sont un peu moins en SD que lors du premier numéro. Le character-designer n’est autre que Akihiko Yoshida, le fabuleux illustrateur qui a officié sur Tactics Ogre, Vagrant Story, Final Fantasy Tactics, Final Fantasy XIV et Nier Automata. Nous profitons de cette mention pour lui témoigner tout notre amour, car c’est toujours mérité. Bravely Default 1 avait posé des bases qui sont depuis le ciment de cette licence, et les décors des villes sont également une marque de fabrique pour ce jeu. Des textures qui semblent peintes sont appliquées sur des décors en 3D, ce qui permet à la caméra de suivre notre personnage dans une ville qui semble tout droit sortie d’un jeu 2D. C’est très étonnant la première fois qu’on y a affaire, mais c’est parfaitement réussi. En dehors des villes, vous pourrez activer l’option « Floutage de l’arrière-plan » dans les paramètres qui créera un flou sur les bords de l’écran, imitant « l’effet maquette » (Tilt shift).
Côté musique, là aussi, du lourd : c’est Revo et son groupe Sound Horizon qui propose ses envolées de violon accompagnées de guitare électrique. Le second opus était orchestré par Ryo du groupe Supercell, mais pour cette troisième itération c’est bien Revo, déjà présent sur le premier opus, qui revient à la baguette.
Captures d’écran réalisées par Oliver BENOIT pour Journal du Japon © 2021 Square Enix
Jeu testé sur une version dématérialisée fournie par LaBoîtecom
La traque des monstres rares, les 100 quêtes annexes, la maîtrise des astérisques, les salles des épreuves, la collection des cartes de B&D (un mini-jeu de cartes) seront autant d’activités qui vous occuperont en parallèle de la quête principale. Si le soft n’est pas aussi riche d’un bon vieux FF, ce premier épisode sur console de salon sait proposer une aventure efficace, et des à-côtés connus des J-RPG qui font très bien le travail. Le système atypique du gameplay saura occuper joyeusement les joueurs, faisant oublier certains classicismes de l’histoire. Avec Octopath Traveler, Bravely Default est un des J-RPG de la Switch qu’il faut avoir fait si vous aimez ce genre, et d’autant plus si vous appréciez la nostalgie qu’ils apportent. Une démo est disponible sur le store de Nintendo pour vous faire un avis.