Mary et la fleur de la sorcière, le premier film du studio Ponoc !
S’il y a bien un film qui était attendu en 2017 au Japon, mais surtout en 2018 en France, c’était Mary et la fleur de la sorcière, la première réalisation du studio Ponoc, composé d’anciens membres de Ghibli. Tout le monde se demandait qui pourrait succéder au grand maître de l’animation, et Hiromasa YONEBAYASHI s’est lancé dans l’aventure ! À l’occasion de la sortie du film sur NETFLIX, Journal du Japon revient sur cette adaptation d’un roman anglo-saxon.
Un tournant décisif dans la carrière du réalisateur pour une adaptation libre du roman de Mary Stewart
Si vous suivez le monde de l’animation japonaise depuis longtemps, vous n’êtes pas sans savoir que le Studio Ghibli, pour trouver le ou les digne(s) successeur(s) de MIYAZAKI et TAKAHATA, a fait plusieurs tentatives auprès de réalisateurs différents. Dans le lot, on retrouve notamment Hiromasa YONEBAYASHI qui avait commencé à faire ses preuves sur Le voyage de Chihiro en tant que superviseur des effets visuels. Ce qui a attiré le regard de MIYAZAKI, qui lui a proposé de réaliser deux films : Arrietty, le petit monde des chapardeurs en 2010 et Souvenirs de Marnie en 2014, tous deux inspirés de romans jeunesse anglo-saxons. Le film qui nous attire ici ne fera donc pas exception non plus.
Avec la fin du studio, annoncée par MIYAZAKI à la suite de Le Vent se lève, en 2017, nombreux étaient les anciens qui rêvaient de montrer leur savoir-faire à leur tour et de s’illustrer auprès du grand public. Pour se faire, ils se regroupèrent et créèrent le Studio Ponoc dont fait partie Hiromasa YONEBAYASHI. C’est donc avec lui que le premier film du studio prit forme autour d’une adaptation totalement libre du livre jeunesse de Mary Stewart, Le balai magique – Mary et la fleur de la sorcière (The Little Broomstick en version originale). Un long-métrage qui, par ailleurs, amorce un tournant dans sa propre carrière.
Ce dernier reprend ainsi l’histoire de Mary, dont on parlera de l’œuvre originale un peu plus bas. On suit cette jeune fille, d’une dizaine d’années, forcée d’aller finir ses vacances à la campagne, chez sa grand-tante en attendant la rentrée scolaire alors qu’elle n’a rien demandé. Durant son séjour, elle rencontre un jeune garçon du même âge habitant non loin, qui la met en garde contre la forêt proche de la bâtisse familiale. C’est pourtant bien au sein de cette dernière, guidée par un petit chat noir, Tib, que Mary découvre une jolie fleur, aux pétales violets et brillants, surnommée Vol-de-Nuit par le jardinier de la maisonnée. Une fleur, qui d’après lui ne fleurit que tous les 7 ans et serait une fleur de sorcière. Par un concours de circonstances, dont le chat n’est pas innocent, la jeune fille trouve ensuite un balai sur lequel la fleur s’écrase, ranimant ce dernier qui s’envole avec elle vers une école de magie renommée, Endor, navigant dans les nuages. Là, elle rencontre la directrice et l’un des professeurs (à l’aspect un peu Dr. Robotnik) totalement obnubilés par la fleur trouvée par la jeune fille. S’en suit, une aventure plutôt épique pour piéger Mary, devenue sorcière pour une nuit et ces personnages hauts en couleur.
Jusqu’ici, on se trouve entièrement plongée dans l’univers jeunesse de Mary Stewart mais totalement réinterprété par le réalisateur. Loin de coller en effet fidèlement à l’œuvre originale, le studio Ponoc offre sa propre vision de l’œuvre de l’autrice anglo-saxonne. L’un des exemples ? Mary et Peter ne se rencontrent pas au début du film, mais bien vers la fin de l’histoire. Endor, l’école de magie est certes accessible après la traversée d’un brouillard épais et dense mais ne vole pas dans les airs. Le fil rouge de l’histoire aussi est modifié pour laisser entrevoir un aspect plus dramatique et cinématographique. C’est en ceci que le film d’animation porte l’imagination plus loin. Cela dit, c’est peut-être cette adaptation, trop libre et bien plus colorée, qui amène les défauts qui vont avec, à moins qu’il ne s’agisse de ceux d’une première œuvre ? Ici ne vous attendez en effet pas à voir un film à la Ghibli, au rythme régulier et fluide, malgré le chara-design assez proche. Mary et la fleur de la sorcière souffre en effet de certains problèmes rythmiques qui montrent qu’il n’est peut-être pas suffisamment abouti dans son propos.
On a du mal à s’attacher aux personnages tout d’abord, bien que Mary se trouve être une fillette pleine de vie et au final plus volontaire qu’attendue de prime abord, mais la directrice et le professeur fou, ne nous attirent absolument pas et feraient bien trop copié-collé d’anciens films Ghibli. Mention spéciale néanmoins à un autre membre de Endor, Flannagan, régisseur des balais, qui est le personnage le plus attirant bien qu’il n’apparaisse que brièvement. En ce sens, c’est peut-être surtout là ce qui porte préjudice à Mary et la fleur de la sorcière : on a tendance à trop comparer avec les œuvres sur lesquelles le staff a travaillé par le passé. Et c’est bien dommage !
Néanmoins, on assiste à un très bon film familial qui tient la route, avec un réel message derrière, de la magie, une bande-son captivante et une certaine dynamique qui plaira au grand public. Pour les fan d’animation, une légère déception pourra se faire.
Le balai magique – Mary et la fleur de la sorcière
Afin de pousser un peu plus le propos, on a décidé de vous parler un peu de l’œuvre originale ayant servi de socle au film de Hiromasa YONEBAYASHI et dont nous avons la chance d’avoir une version traduite en français.
On le doit à Ynnis édition qui a sorti l’ouvrage le 3 février dernier avec une belle édition simple, mais avec chaque tête de chapitre illustrée à la manière anglo-saxonne. L’ouvrage nous raconte l’histoire de Mary, la seule de sa famille obligée d’aller s’exiler dans la campagne perdue chez sa Grand-Tante Charlotte. Cette dernière vit avec une aide, une cuisinière, un jardinier et deux femmes de ménage. Autant dire qu’elle est la seule enfant dans un monde d’adultes d’un certain âge. Fille timide et réservée, elle cherche à se rendre utile mais ne trouvera pas sa place, jusqu’à sa rencontre avec un chat noir : Tib. Le prenant sous son aile, ce dernier va la guider à travers bois pour la mener vers une étrange fleur. D’après le jardinier, cette dernière ne fleurit qu’une seule fois dans l’année, et il la nomme alors Vol-de-Nuit, une fleur de sorcière. Intriguée par cette dernière, mais rassurée par la présence du chat, Mary finit par tomber sur un petit balai, pile à sa taille en aidant le jardinier à balayer les feuilles mortes.
Très vite, par une sorte de hasard, Mary va écraser la fleur qui déverse son suc sur ses mains : en les posant sur le balai ce dernier s’anime et propulse la jeune fille à travers les nuages en direction d’une école pas comme les autres : Endor. Elle y rencontre une directrice étonnante, et un professeur chercheur un peu étrange et est ensuite entraînée à la découverte des différents cours possible jusqu’à trouver un lieu où des animaux semblent enfermés. Elle comprend alors bien vite à la suite d’allusions que ces derniers sont le fruit d’expériences malvenues, que son chat Tib l’a amené là dans l’idée de retrouver son frère Gib comme le suggérait le jardinier et elle ne peut rester insensible face au spectacle. On va donc voir comment la jeune et timide Mary va se découvrir un tempérament volontaire et entreprendre de sauver ces animaux.
On a donc une œuvre plutôt différente de l’adaptation cinématographique que nous offre le studio Ponoc et pourtant on ressent bien la patte des titres qui attirent les Japonais et leur donne l’envie d’en réaliser des films. Un ouvrage jeunesse qui fait passer un bon moment, à l’instar du film.