Ônami : un conte japonais sous forme de roman contemplatif et musical
Chez Journal du Japon, nous aimons particulièrement les projets ambitieux et originaux qui rendent hommage à la culture japonaise. Nombreux sont les Français qui se lancent dans d’incroyables projets inspirés par le Japon grâce au financement participatif. Nous pensons qu’il est important de les soutenir. Ônami, le petit dernier arrivé tout fraîchement sur la plateforme Ulule, est un coup de cœur de la rédaction. Pour l’occasion, nous vous proposons de rencontrer son talentueux créateur, David Lozano.
Ônami : un roman contemplatif et musical
Depuis quelque temps, on ne cesse de voir fleurir chez nos libraires tout un tas de contes japonais tout aussi intéressants les uns que les autres. Nombreux sont les écrivains et les artistes qui se plongent dans les histoires japonaises pour nous faire découvrir toute la richesse du folklore nippon, chacun avec une approche qui lui est propre. Dans cette avalanche de livres passionnants, Ônami se démarque par son originalité : ce roman contemplatif et musical nous transporte dans la préfecture de Kagoshima sur l’île de Kyushu à la rencontre d’un couple d’âge mûr qui s’en va prier pendant 3 jours et 3 nuits les kami afin d’avoir un enfant. À leur retour, leur prière est exaucée : ils accueillent une petite fille dans leur foyer qu’ils nomment Ônami, « la vague ». C’est son histoire que nous découvrons ici : cette légende qui donnera son nom au lac Ônami situé à Kirishima.
Plus qu’un simple livre, Ônami se présente comme une expérience à vivre. Cette bande-dessinée sans aucun mot s’accompagne d’une bande sonore composée par le dessinateur, David Lozano, et interprété par le groupe musical nommé Ensemble Kin dont il est l’alto. L’œuvre, aux incroyables illustrations, vous transporte dans un univers mystérieux découpé en 15 chapitres. Chacun commence par une page d’illustration accompagnée d’un haïku symbolisant le chapitre, puis de 7 pages dessinées contant l’histoire à découvrir avec la composition musicale originale.
Pour les plus curieux, vous pouvez d’ores et déjà découvrir le premier chapitre sur Youtube :
La campagne Ulule qui permettra au projet de voir le jour a débuté le 2 février 2021 et se terminera le 3 avril 2021. Pour seulement 10 euros, vous recevrez l’œuvre sous format PDF, et pour seulement 21 euros, vous recevrez l’ouvrage physique directement chez vous, le tout accompagné par la bande sonore numérique. D’autres contreparties vous permettent également d’obtenir l’édition collector d’Ônami, la bande-son en format CD, ainsi qu’un artbook et/ou un print offert. De superbes contreparties à petits prix pour une belle campagne Ulule à découvrir. Pour soutenir ce roman contemplatif et musical à la fois original et sensationnel, rendez-vous ici. En attendant de pouvoir découvrir Ônami, rencontrons son créateur !
La naissance d’un projet original par un artiste talentueux
Journal du Japon : Bonjour David et merci de nous consacrer un peu de votre temps ! Pour commencer, pouvez-vous vous présenter à nos lecteurs ?
David Lozano : Bonjour ! C’est moi qui vous remercie pour votre intérêt ! J’ai 35 ans et je suis originaire d’Avignon. Mon crayon m’a toujours accompagné depuis mon plus jeune âge. Je n’ai jamais sérieusement songé à étudier dans ce domaine. C’était simplement un outil indispensable pour m’évader jusqu’à ce qu’un nouveau vecteur vienne combler ce même besoin : la musique !
J’ai donc commencé à jouer du piano jusqu’à y occuper tout mon temps libre. J’ai finalement interrompu mes études pour m’y consacrer entièrement en intégrant le conservatoire d’Avignon. Professeur de piano et de formation musicale depuis une dizaine années, j’ai eu l’occasion d’intégrer plusieurs formations instrumentales jusqu’à créer l’Ensemble KIN avec lequel j’ai eu le plaisir de travailler et adapter les musiques de compositeurs qui me sont chers comme Joe Hisaishi, Nobuo Uematsu ou encore Daniel Elfman. J’ai également eu l’occasion de monter un concert pour un orchestre de 60 musiciens intitulé Video Games Symphonic. La composition, l’arrangement musical et l’illustration forment aujourd’hui un ensemble indispensable à ma vie artistique.
Quelle est votre relation avec le Japon ?
Né dans les années 80, je ne vais pas nier que mon premier contact avec la culture japonaise s’est fait grâce aux animés du Club Dorothée (rires) ! Goku, Seiya et beaucoup d’autres m’accompagnent depuis de (très) nombreuses années. J’ai, par la suite, découvert le travail de Hayao Miyazaki, IsaoTakahata et mon intérêt a grandi à chaque nouvelle découverte. L’histoire, l’art, la musique qui a réussi à toucher mes oreilles occidentales, la cuisine … Il y a tant de facettes qui m’ont donné l’envie d’en apprendre davantage jusqu’à finalement organiser mon premier voyage au pays du Soleil Levant. Ce furent trois semaines très intenses entre le Kanto et le Kansai avec une escale à Miyajima et une visite bouleversante d’Hiroshima.
Le retour à la réalité fut difficile. J’ai très vite eu l’impression de ne pas en avoir assez vu. Mon intérêt n’avait fait que grandir et j’ai très vite commencé à économiser pour organiser un prochain voyage. Cette fois-ci, ce sont les mythes et légendes qui m’ont fasciné. J’ai étudié de nombreux ouvrages en commençant par le Kojiki afin d’étancher ma soif. Mon prochain voyage ? J’adorerais me rendre dans les montagnes de Kirishima au bord du lac Ônami lié à la légende que je raconte.
Comment est né votre projet ?
C’est un mélange d’événements qui n’ont pas de liens entre eux qui m’a amené ici. Premièrement, s’il est un film d’Isao Takahata qui me touche beaucoup, c’est Le conte de la princesse Kaguya, qui raconte la légende du coupeur de bambou. J’aime ce style authentique, cette simplicité et ces phases de contemplations sans verbe. Deuxièmement, après avoir travaillé pour adapter les musiques des compositeurs qui me sont chers et expérimenté l’écriture avec Moon & Spirals que vous pouvez trouver sur notre album du même nom, j’ai ressenti ce besoin d’écrire les modestes notes qui tournaient dans ma tête. Pour terminer, la naissance de mon fils m’a fait repenser à cette légende qui met au premier plan un fort désir de parentalité. Sa redécouverte m’a profondément touché et les premières notes sont nées dans ma tête.
C’est de cette manière que les notes se sont substituées aux mots et que j’ai visualisé la découpe de l’histoire en quinze chapitres, tous accompagnés d’une ambiance musicale propre. Peu de temps après, en travaillant sur les illustrations originales, l’envie de les détailler davantage a fait germer l’idée du roman graphique.
Combien de temps ce projet a-t-il nécessité pour voir le jour ?
Entre l’idée et la finalisation du concert, un peu moins d’une année a été nécessaire. La crise sanitaire que nous traversons a plusieurs fois repoussé notre première représentation et j’ai profité de ce temps pour développer le dérivé en roman graphique. Aujourd’hui, le déroulement est entièrement pensé au brouillon mais seuls trois des quinze chapitres sont entièrement finalisés. J’estime qu’il me faut entre 8 et 10 mois pour terminer la réalisation des derniers chapitres. Le temps restant avant la sortie correspondra à l’enregistrement en studio avec l’ensemble KIN et les différents délais de production.
Vue l’originalité de votre concept, nous imaginons qu’il n’a pas été facile de trouver un éditeur prêt à tenter l’aventure. Est-ce pour cela que vous avez opté pour la création de votre propre maison d’éditions ?
En effet, j’ai eu la chance de recevoir de nombreuses réponses très encourageantes de la part de maisons d’éditions. Cependant, la crise sanitaire n’encourageant pas les nouveaux partenariats ou le manque de visibilité sur l’engouement d’un projet comme celui-ci ne m’ont offert que des réponses négatives ou évasives. Quelques-unes m’ont encouragé à persévérer ou patienter en attendant la fin de la crise. J’ai finalement choisi de me lancer dans cette aventure par mes propres moyens en espérant susciter la curiosité et partager ma passion et ma vision.
Vous êtes à la fois le dessinateur, le compositeur et l’un des musiciens d’Ônami, comment s’est passée la symbiose entre toutes ces compétences ? Est-ce que l’un vient en premier, ou est-ce plutôt un ensemble en perpétuelle évolution ?
J’aimerais dire que tout est bien organisé, mais ce n’est pas le cas ! Le premier chapitre a commencé par la musique. J’avais envie de “planter le décor”. J’ai rapidement entendu le bruit des vagues qui tiennent une part importante dans ce récit et j’ai réfléchi à un moyen de les représenter. Parfois, des échanges avec mes amis et musiciens de Kin m’ont permis d’affiner les motifs mélodiques ou rythmiques que j’entendais. Le déroulement chronologique du dessin venait alors se calquer sur la musique que je venais d’écrire. J’ai écrit la première moitié du concert en suivant ce procédé. La deuxième a été beaucoup moins bien organisée (rires). Le dessin venait en premier puis finalement, la musique venait changer la réalisation du dessin. Je commençais à représenter un motif mélodique pour une scène puis je le retirais pour l’intégrer à une autre scène plus adéquate. J’ai finalisé le quinzième chapitre avant de m’attaquer au douzième. L’inspiration venait selon les événements qui venaient ponctuer mon quotidien.
Quelles sont vos différentes sources d’inspirations artistiques ?
La musique de Joe Hisaishi a joué un rôle important dans mes choix. Il est rare aujourd’hui d’écouter une composition et de retenir aussi facilement une mélodie si habilement construite. J’ai développé mon oreille de musicien en étant assis devant mon piano. F. Liszt et F. Chopin m’ont accompagné durant ma formation de musicien mais la musique française du début du 20e siècle comme celle de M. Ravel que j’affectionne particulièrement ou G. Fauré m’a permis de renouer avec cette influence japonaise. Je trouve des similitudes entre cette musique et la musique japonaise traditionnelle. Je pense qu’il y a une part d’inspiration à double sens entre la musique traditionnelle japonaise et la musique française du début du 20e siècle et cette dernière et la musique du cinéma ou du jeu vidéo japonais d’aujourd’hui. En ce qui concerne le dessin, de nombreux artistes très variés sont des sources d’inspiration. Comme je l’ai déjà dit, je suis épris du style d’Isao Takahata, mais je suis également très admiratif du travail de Takehiko Inoue. J’apprécie également les vues de Paris à l’aquarelle d’Alex Hillkurtz ou les estampes modernes de Komatsuzaki Kunio.
Pourquoi avoir choisi ce conte en particulier ?
Je trouve très touchante la ferveur avec laquelle les personnages principaux prient pour avoir un enfant à aimer et à élever. Jeune papa, je me suis senti très proche de ces personnages. Ce personnage d’Ônami par son caractère et la représentation atypique qui en est faite dans ce conte, m’ont aussi rappelé la princesse Kaguya. J’avais envie moi aussi, par mon admiration et mon respect pour le travail d’Isao Takahata, de représenter ce personnage à ma manière.
Pouvons-nous espérer une suite à cette aventure ?
Il est un peu tôt pour en discuter mais ne pouvant passer plus de quelques jours sans un nouveau projet à concrétiser, je sais que je ne pourrai pas m’arrêter comme ça. Aujourd’hui, j’espère de tout cœur pouvoir partager ma passion grâce à cette campagne sur Ulule. Cependant, que le projet aboutisse ou non, j’estime avoir mis trop de ma personne et de ma passion dans ce projet pour ne pas le terminer. Reproduire l’aventure avec une autre légende japonaise me plairait grandement et j’ai déjà plusieurs idées dans un coin de page. J’ai également l’espoir de pouvoir un jour reproduire l’expérience avec une histoire originale.
Nous souhaitons une belle réussite à ce projet prometteur. A Journal du Japon, nous allons suivre attentivement la suite des aventures de David Lozano, en lui souhaitant le meilleur et la réussite de la campagne Ulule, dans l’espoir de voir d’autres projets aussi originaux que celui-ci voir le jour. Et bien entendu, nous vous encourageons à découvrir et partager la campagne Ulule d’Ônami.
J’espère de tout cœur que nombre d’ enfants et d adultes auront à cœur de découvrir cette magnifique œuvre qui permet d échapper à la monotonie du quotidien et d élever notre esprit vers la beauté, l harmonie et l enchantement : c est ce que nous offre Onami à travers les dessins et la musique de ce jeune et talentueux auteur compositeur qu est David Lozano.
Non l Art et la Culture ne sont pas morts !
Mireille