The Last of Us Part II : Naughty Dog au sommet de son art
Il y a maintenant 7 ans, Naughty Dog nous offrait The Last of Us, une nouvelle exclusivité Playstation qui aura fait couler beaucoup d’encre et aura marqué l’histoire du jeu vidéo, rien que ça ! Avec une influence cinématographique certaine, ce survival horror aura séduit ses fans par son histoire touchante sur fond de pandémie. On y découvrait alors Joël et Ellie, deux protagonistes que l’on apprend à connaître tout le long du jeu et que l’on voit évoluer. Une histoire très humaine.
Annoncé en 2016, soit 3 ans après, The Last of Us Part II avait alors la lourde tâche de succéder à son premier opus et surtout de réussir à marquer autant les esprits… Et pourquoi pas même, parvenir à le surclasser ? En 2020 et après de nombreux reports, nous y sommes, nous avons enfin pu mettre la main sur cette fameuse partie 2, aussi attendue que redoutée ! Alors pari réussi pour le studio ? La réponse dans notre test.
La vengeance au cœur de cette suite
The Last of Us sorti en 2013 et dernière grosse exclusivité de la PlayStation 3 racontait l’histoire simple, humaine et touchante entre Joël et Ellie. Avec un gameplay simple mais efficace sans rien révolutionner, cela n’a pas empêché le titre d’être porté au rang de chef d’œuvre pour plusieurs raisons : essentiellement, pour la profondeur de son histoire et sa narration toujours très juste ; et sa bande son mélancolique. Tout cela donne au jeu quelque chose d’unique, de jamais vu… Bref, une expérience qui, avec sa fin douce amère, ne laisse pas indifférent le joueur.
Le jeu aurait pu se suffire à lui-même, subsister sans suite, mais Naughty Dog a pris le risque d’aller au-delà, d’en raconter plus car, oui, il y avait encore des choses à raconter… Et c’est ainsi qu’en 2016 le studio annonce The Last of Us Part II. Se déroulant quatre ans après le premier volet, les fans pourront retrouver les deux protagonistes Joël et Ellie, bien installés dans la ville de Jackson qui réussi à reconstituer une société civilisée, tant bien que mal… C’est ici que tout prend place, et c’est au bout de quelques heures de jeu seulement que le réel dessein du jeu va surgir, quand Ellie part en quête de vengeance.
Tout comme son prédécesseur The Last of Us Part II se démarque par sa narration irréprochable, lente tout en étant rythmée. Le scénario est dense et ne vous laissera pas beaucoup souffler tant vous allez être surpris par les retournements de situation qui s’offriront à vous. La partie II prendra alors tout son sens tout le long du jeu, et il s’agira d’une suite logique par rapport aux thèmes évoqués dans la partie I qui étaient : l’humanité, ses choix et ses erreurs.
Techniquement bluffant
Naughty Dog a abattu un travail impressionnant pour cet opus. Premièrement, le gameplay, même s’il a peu changé et qu’il conserve les bases du premier. Des améliorations sont bel et bien présentes et elles font la différence. Commençons par le système de craft : si la création des matériaux de base (bandage, cocktail molotov, etc…) n’a pas changé par rapport au premier volet, les améliorations des armes, elles, ont gagné en réalisme. Tout au long du jeu, des ateliers de fabrication permettent d’upgrader un arsenal assez costaud grâce à des écrous à ramasser. Il faudra par conséquent un minimum d’exploration et de curiosité pour avoir des armes à la hauteur. Il faut également noter le travail de reproduction de Naughty Dog et son sens du détail : les armes sont fidèles à leur originale et les animations d’améliorations étonnement réalistes.
Même remarque pour le level design de haut niveau. Les environnements sont vastes, mais pas trop : assez pour faire de l’exploration, pour s’y perdre et observer les panoramas qui sont à couper le souffle. Le terrain de jeu favorise l’infiltration avec la possibilité de se cacher dans les hautes herbes. Le joueur peut aussi tirer avantage de l’environnement en l’observant bien. Ellie pourra, par exemple, se faufiler dans des brèches pour passer d’un endroit à un autre, escalader et tourner autour de son ennemi pour le déstabiliser et faire en sorte qu’il ne sache pas où elle se trouve. The Last of Us nous offre réellement la possibilité de choisir notre chemin.
Tous ces éléments rendent le jeu très fluide : il n’y a pas de pause et tout s’enchaîne très bien. Les ennemis seront nombreux, entre infectés et humains. S’ajoutent aussi maintenant les chiens qui peuvent vous pister grâce à leur odorat et indiquer à l’ennemi votre position… Il ne faudrait pas les sous-estimer car ce sont des ennemis agiles et redoutables qui peuvent donner du fil à retordre. L’intelligence artificielle est, à l’image de ces ennemis canins, très bien travaillée : les ennemis communiquent entre eux, donnent votre position à haute voix, et établissent des stratégies pour réussir à vous avoir, quitte à vous contourner pour vous attaquer dans le dos ! Autre détail qui a son importance : Naughty Dog a fait le choix de donner un prénom aux ennemis que vous rencontrez, pour les humaniser et développer ainsi de la culpabilité quand nous nous débarrassons de l’un d’entre eux. On y comprend là aussi la volonté de sortir un titre qui parle avant tout de l’être humain !
Dans The Last of Us Part II, l’infiltration sera en général plus payante que l’affrontement direct. Les développeurs ont mis en place un système astucieux de bruitage en fonction des situations. Si Ellie est à découvert, c’est un bruitage discret qui se déclenche pour signaler au joueur qu’il y a un risque de se faire repérer par l’ennemi. Cela permet en outre d’appréhender l’environnement et de rendre le titre anxiogène : le joueur est ainsi mis en alerte constante. Comme toujours avec les développeurs de Naughty Dog, nous avons d’ailleurs le droit à l’un des meilleurs mixages sonores du jeu vidéo, complété par des bruitages d’environnement incroyablement réalistes, quelque soit le lieu. Comme le premier opus, la bande son signe le retour du compositeur argentin Gustavo Santaolalla qui apporte avec lui des musiques à la guitare tantôt mélancoliques, tantôt apaisantes et posées mais, là aussi angoissantes. Il faut d’ailleurs noter que l’instrument à corde prend une place importante dans le jeu puisque c’est le lien qui unit Joël et Ellie. Quel régal d’entendre les deux protagonistes chanter ! L’intégralité de la bande son est de qualité et aide à nous plonger dans cet univers plein de noirceur et pesant au possible.
The Last of Us Part II est également une prouesse graphique : les villes sont magnifiques, luxuriantes, riches et crédibles avec ces immeubles et maisons en ruines recouvertes de végétation, ces routes dévastées, ces repères d’infestés à vous rendre claustrophobe… Avec ce titre, nous n’avons jamais été aussi proches de la nouvelle génération de consoles. Avec ses éclairages dynamiques et surtout la modélisation des personnages, les animations faciales et le langage corporel n’auront jamais été aussi réalistes. Le joueur peut ressentir les émotions des personnages comme la peur, l’inquiétude, la tristesse, la colère, et même la douleur… Tout y est ! D’Ellie aux autres protagonistes, en passant par les PNJ, ce réalisme émotionnel est porté à tout moment du jeu et pas seulement dans les cinématiques. Naughty Dog va plus loin dans le détail et pousse l’immersion encore plus loin en faisant apparaître des rougeurs sur la peau, de la crasse sous les ongles, des traces de sangs, des bandages… Enfin, le mouvements des personnages et des animaux est parmi les plus réalistes : le travail de motion capture derrière est énorme et le moindre muscle est représenté. Nous avons devant nous un des plus beaux jeux de la PlayStation 4 à n’en pas douter !
D’ailleurs, petit aparté : si l’envie vous prend de vouloir prolonger l’aventure visuelle, l’artbook officiel de Naughty Dog vous permettra de voir tout le travail réalisé par les développeurs en pas moins de 200 pages au format A4.
Il retrace l’histoire du jeu, décrit ses environnements, ses personnages, sa conception graphique, chaque lieu y passe. Le livre regorge de détails et vous pourrez vous émerveiller de nouveau devant cet univers, y (re)découvrir certains détails et comprendre comment le jeu est né. Sont au programme également des informations sur les Séraphites ou le WLF, ainsi que des commentaires des développeurs et un avant propos intéressant de Neil Druckmann, le réalisateur du jeu. Cet ouvrage, véritable making-of du jeu, est disponible depuis le 2 juillet aux éditions Omaké books au prix de 34,99€. Toutes les informations sont sur le site de l’éditeur.
La notion du bien et du mal
Malgré tous les compliments que nous venons de faire, The Last of Us Part II a pourtant fait débat et n’a laissé visiblement personne indifférent : que l’on ait aimé le jeu ou qu’on l’ai détesté ce n’est pas à cause du gameplay, mais bien de son histoire. Naughty Dog a mis encore une fois l’humain au cœur de l’histoire. Si le premier mettait en avant l’espoir et l’amour, sa suite est beaucoup plus sombre avec la vengeance qui est au cœur de l’intrigue. Et nul doute qu’il vous fera culpabiliser mais aussi réfléchir… et certainement réagir.
Dans ce second opus, les personnages ont mis en suspend leur humanité pour assouvir leur vengeance. La violence de certaines scènes vous mettra à l’épreuve tant parfois il est difficile d’appuyer sur un simple bouton pour réaliser l’action demandée. Et que l’on mette les choses au clair : ici, il n’y a ni gentil ni méchant. Le manichéisme est balayé et vous douterez du bien fondé des actions des protagonistes, ce qui vous fera réfléchir à vos propres décisions. Que cela soit d’un côté ou de l’autre, les personnages sont avant tout humains et le studio a réussi un tour de force avec cela, notamment grâce à une narration maîtrisée comme jamais dans un jeu vidéo. Entre flashback et moment présent, vous allez jongler avec les émotions et les ressentis. C’est là toute la force du jeu. Que l’on aime ou pas la direction prise par Naughty Dog, nous sommes obligés de reconnaître que The Last of Us II sort du lot, apporte de la fraîcheur à un monde vidéo ludique conformiste. Il y a une innovation dans la façon de raconter et c’est peut être en ce point que les détracteurs du jeu n’y ont pas trouvé leur compte. Plus l’histoire avance et plus le cycle de violence qu’entraîne la vengeance nous emmène sur un point de non retour jusqu’au final du jeu. Du début à la toute fin, vos émotions vont être mises à rude épreuve, et chaque joueur aura sa propre perception des choses mais remettra en question la notion de bien et de mal.
The Last of Us Part II est une œuvre aux influences cinématographiques qui marquera pour sûr l’histoire du jeu vidéo tant il fait débat : l’écriture du jeu est irréprochable et nous avons rarement vu un tel niveau, jouant avec nos émotions, notre sensibilité, notre colère… Cette suite a réussi le pari de nous surprendre tout en restant dans la ligne de son prédécesseur, sans jamais le trahir. Le titre vous fera réfléchir sur les conséquences de vos actes, il vous sortira de votre zone de confort. En ayant retravaillé le gameplay, en y ajoutant des détails et des interactions rendant le tout plus immersif et réaliste, grâce à une direction artistique irréprochable et une motion capture parmi les meilleures du milieu, The Last of Us Part II nous emmène un peu plus vers la nouvelle génération de console et nous ne pouvons qu’être impatients de voir ce que le studio aura à nous proposer les années à venir.
D’ici là, cet opus fera réagir : certains vont l’aimer, d’autres vont le détester ! Il y aura des débats, mais il ne laissera certainement pas indifférent… et c’est aussi à ça que l’on reconnaît une œuvre majeure.