Gaming Memories #21 : Seiken Densetsu (Mystic Quest)
Bienvenue dans ce vingt-et-unième numéro de Gaming Memories ! Cette fois-ci, nous reviendrons à nouveau sur Game Boy pour vous présenter l’un de ses jeux les plus mémorables : Seiken Dejnsetsu plus connu sous le nom de Mystic Quest sous nos latitudes. Prêts à revenir sur ce jeu qui perdure à travers les âges ? Alors c’est parti, direction 1991 !
L’avant Final Fantasy
L’histoire de Seiken Densetsu remonte à 1987. Le jeu était à cette époque prévu sur Famicom Disk System. Le projet était immense et devait tenir sur cinq disquettes, en faisant l’une des plus grosses productions de la machine. Mais à cette époque, SquareSoft était loin d’être au meilleur de sa forme, bien au contraire… leur jeu fut annulé cette même année 1987, et tout joueur l’ayant précommandé a pu recevoir un message d’excuse lors de son remboursement. Le message sous-entendait qu’il fallait se pencher sur un autre soft prévu pour la fin 1987 : Final Fantasy, dans lequel la firme mettait tous ses espoirs.
Le projet refit surface en 1990, semble-t-il sous le nom « Gemma Knights ». La direction de Square, désormais à son troisième Final Fantasy, offrit au développeur Koichi ISHII de s’occuper de ce nouveau projet. Le nom « Seiken Densetsu », endormi mais réservé depuis quatre ans, fut repris. Trois Final Fantasy après sa création, cette nouvelle licence fut ainsi portée vers la console portable de Nintendo.
ISHII posa les bases de l’histoire du jeu et créa le design de tous les personnages. Yoshinori KITASE (bien connu des fans de Final Fantasy puisqu’il a travaillé sur une grande quantité de jeux de la série, Chrono Trigger…) l’aida à la création du scénario. Goro OHASHI s’occupa du gamesystem et Kenji ITÔ (à nouveau lié à la série Mana, plusieurs jeux SaGa aussi) composa la bande-son du jeu.
Ce dernier sortit le 28 juin 1991 au Japon et en novembre de la même année aux Etats-Unis. L’Europe (et vous devez commencer à avoir l’habitude) dut attendre jusqu’en 1993. En contrepartie, le jeu désormais connu sous le nom Mystic Quest (à ne pas confondre avec celui de la Super Famicom) fut intégralement traduit en plusieurs langues dont le français ! 700.000 copies (dont 500.000 rien qu’au Japon) s’en sont écoulées.
L’arbre de Mana est menacé…
Le thème principal du jeu, « Rising Sun ».
Vous incarnez un jeune esclave anonyme (à nommer soi-même) forcé de se battre pour amuser le Roi Noir. Lui et ses amis sont enfermés et ne servent qu’à affronter des monstres. Mais les compagnons du héros que vous incarnez meurent les uns après les autres. Comme Willy, son meilleur ami, qui succombe à ses blessures à son retour, après un nouveau duel. Le malheureux a juste le temps de lui demander de trouver l’un des Chevaliers Gemme nommé Bogard…
Notre personnage parvient à s’échapper en passant par l’entrée des monstres qu’il doit combattre et surprend une discussion du Roi Noir, qui cherche à monter la cascade non-loin de là car à son sommet se trouverait le fameux Arbre Mana dont il convoite le pouvoir. Au terme de la discussion, le Roi remarque notre personnage et tente de s’en débarrasser. Il tombe le long de la cascade mais – comme c’est le héros – il survit à sa chute qui aurait dû être mortelle. Non loin de là, il entend une voix féminine qui appelle à l’aide… c’est la rencontre qui marque le point de départ de l’aventure d’un futur héros et la clé pour rejoindre l’Arbre Mana à protéger.
Il va donc falloir traverser les différents environnements du royaume et les donjons qui le constituent pour retrouver la clé vers l’Arbre et empêcher le Roi Noir de s’en emparer. Des tragédies croiseront votre chemin, mais vous trouverez aussi des alliés pour vous aider.
Zelda + RPG = …
Dans Seiken Densetsu, on se déplace verticalement ou horizontalement dans des écrans qui défilent lorsqu’on atteint l’une de ses sorties. L’écran effectue un scrolling pour afficher le plan suivant, et ainsi de suite. On dispose d’une arme pour vaincre les monstres qui traînent ça et là directement à l’écran. Plusieurs coups suffisent généralement pour les vaincre mais certains demandent une technique particulière pour y arriver. On gambade ainsi dans les décors extérieurs jusqu’à tomber sur un donjon (qui fait exactement la même chose) ou dans une ville, où il sera possible de se reposer, entre autres. Le jeu permet de sauvegarder à n’importe quel moment et en cela, ce premier SD ressemble beaucoup au tout premier Zelda (les villes en plus), sorti quelques années plus tôt (1986).
Là où il s’en différencie, c’est en y ajoutant une dimension RPG, en faisant l’un des tous premiers jeux du genre Action-RPG (il y avait eu les premiers YS de Nihon Falcom depuis 1987). Le personnage que l’on contrôle peut évoluer au fil de l’aventure en gagnant de l’expérience (à force de tuer des monstres) et à terme, des niveaux qui le rendent plus fort, plus résistant ou autres. Chaque niveau gagné propose d’augmenter une capacité selon son choix (force, défense, etc), ce qui permet de façonner le personnage à son envie.
On obtient plusieurs types d’armes au fur et à mesure de la progression. Non seulement ces dernières peuvent être achetées dans les villes traversées, mais peuvent aussi être glanées durant l’exploration. Elles permettent de frapper de plus en plus fort, évidemment, mais servent aussi en quelques sortes de « clés » pour la progression de l’aventure. Une hache permet de couper des arbres qui barrent le passage, une chaîne laisse s’accrocher à quelque chose pour traverser un gouffre… tout type d’arme a aussi une attaque plus puissante si l’on laisse la jauge en bas de l’écran se remplir.
A coté de cela, on découvre des magies au fil du temps (feu, glace, soin…). Elles consomment plus ou moins de mana et ne peuvent donc plus être utilisées une fois notre magie vide. Il est possible d’en récupérer se reposant dans une auberge ou grâce à des objets trouvables dans des coffres ou en boutique, ainsi que des clés, potions de soin et autres objets curatifs (contre le poison, anémie qui rend les ennemis extrêmement dangereux, etc). On peut aussi découvrir des alliés temporaires qui font le même genre d’effets (donc soigner, par exemple) ou peuvent totalement faire éviter des dangers. Tout ce que l’on trouve est utile, d’une manière ou d’une autre.
L’aventure dans la poche
Seiken Densetsu est un jeu en vue trois-quarts, ce qui est assez classique pour l’époque mais qui fonctionne bien. Il arrive parfois de se faire toucher par un adversaire légèrement en dehors de l’écran car on ne l’avait pas vu avant (surprise, il y avait quelqu’un !), mais ça n’engendre jamais le maximum de dégâts possible. Ces derniers ne clignotent pas, ne disparaissent pas même quand il y en a plusieurs à affronter à la fois. Les décors ne sont pas particulièrement surchargés non plus, il faut dire, mais restent lisibles et forment un vrai ensemble (il y a plusieurs environnements différents). Il arrive que certains lieux un peu plus gros peinent à s’afficher (on trouve un château à un endroit qui apparaît progressivement, par exemple) mais globalement, le jeu reste dans la norme de que l’on peut trouver à cette époque.
La maniabilité répond plutôt bien et c’est une bonne chose, face à tous ces monstres bondissants et leurs projectiles. On attaque tout simplement avec la touche A, et la B sert à utiliser un objet mis en attente d’être utilisé (avoir une potion de soin sous la main en cas de danger peut s’avérer utile). Il est aussi possible d’attribuer cette touche pour la magie, qui se lancera comme une attaque normale sur A. Naviguer dans les menus est tout aussi facile car ils sont simples mais clairs. On remarquera surtout une lourdeur au niveau de la fonction « Aide », la capacité que l’allié qui vous suit peut utiliser. Pour s’en servir, il faut ouvrir le menu, aller tout en bas (en appuyant trois fois sur la touche) de celui-ci et lancer l’aide. Un texte (du genre « Je vais te soigner… ») va s’afficher et la capacité se lancera. Cela peut sembler un détail futile, mais interrompre un combat toutes les cinq secondes (pendant cinq autres secondes) pour se soigner devient vite lourd. Affilier cela à la touche B aurait peut-être été une meilleure idée… ?
En tous cas, le jeu reste assez souple et ne s’avère pas trop difficile (on peut toujours avoir un peu de soin dans un coin). Il vaut mieux être prudent lorsque l’on enchaîne les combats, mais les ennemis sont rarement violents au point de tuer notre personnage d’un seul coup. Cela n’empêche qu’il faut parfois faire un peu de leveling en traînant où l’on peut, mais ce n’est pas ennuyeux. On peut très bien s’amuser à faire la chasse aux coffres au passage. Au pire des cas, il existe une carte pour se repérer vaguement, et surtout retrouver la ville la plus proche.
Si le jeu peut se terminer en moins de deux heures si on le connait bien, le faire pour la première fois ou à son rythme peut entraîner plus d’une quinzaine d’heures, selon le désir d’explorer la carte entièrement ou non. L’exploration n’est peut-être pas un but aussi voulu que dans un Legend of Zelda, mais elle est plus directement méritoire par l’expérience qu’elle donne eu personnage (et forcément, un personnage plus fort craint moins le game over).
L’aventure est bercée d’une bande-son assez marquante. Parce qu’on entend ses thèmes assez souvent et longtemps, mais aussi parce que la majorité reste en tête, et sont plaisants à écouter. Elle est parfois dynamique (à l’aventure, compagnons !), d’autres fois douce, mélancolique voire même triste. Seiken Densetsu est une quête bercée de malheur contre lequel il faut faire face, et cela se ressent bien. Nous ne sommes peut-être pas au top de ce que le Game Boy pouvait faire (cela ne faisait que deux ans que la machine existait), mais peu importe : on a un sentiment très « Square » dans cette BO et c’est assez agréable (notons que le thème des Chocobos, l’animal mascotte de Final Fantasy, est présent, remixé par son compositeur d’origine pour l’occasion !).
https://www.youtube.com/watch?v=Jz-sVQlCoDI&list=PLEC0679F4ABB49D7A&index=4
Pour finir, et il faut en parler, le jeu a été traduit dans plusieurs langues dont le français (c’est assez rare pour l’époque pour être noté). Cette VF est un peu « rapide » mais il est à supposer que les textes originaux étaient bien plus longs (comme vous le savez, un seul kanji peut exprimer des mots peut-être très longs…). On se retrouve donc parfois avec des « t’as pas assez d’argent » et autres phrases du genre « j’me disais bien… » (pas très héroïque… tout ça pour gagner un caractère et pouvoir finir la phrase par un point – ce qui ne se fait pas à tous les coup), il manque aussi, parfois, un mot dans une phrase (et on se retrouve aussi avec un mot en double de temps en temps). La traduction n’est donc pas exemplaire, mais c’est un effort appréciable.
Le mana immortel
La série a assez vite continué sans jamais s’arrêter. Si au Japon elle s’est toujours faite connaitre sous le nom « Seiken Densetsu », en Europe et aux Etats-Unis il y avait un renouvellement de nom permanent, la faisant devenir la série « Mana ». Ainsi, on trouve Secret of Mana (Super Famicom, 1993, sans doute l’un des épisodes les plus connus et joués), Trials of Mana (Super Famicom, 1995 et 2019 sur Switch), et Dawn of Mana (PlayStation, 1996 et jamais sorti chez nous). De nombreux spin-offs ont également existés (sur PlayStation, NDS, mobile…) et entre tout cela, « Mystic Quest » est le seul à avoir eu ses propres remakes (et une ressortie sur GB au passage). Une version sur les mobiles japonais ainsi que des artbooks et manga ont aussi existé.
En 2003, c’est la société Brownie Brown (sous-filiale appartenant à Nintendo désormais nommée 1-Up Studio) qui a produit un remake du premier jeu avec SquareEnix sur GameBoy Advance. Ce jeu reprend l’histoire, les bases et le gamesystem du Seiken Densetsu mais lui donne un sérieux coup de neuf. L’impression de jouer à un tout nouveau jeu est bien présente mais on sent l’« âme » de l’origine. Les graphismes ont été retouchés dans un style plus dessin animé, fin et coloré, la bande-son retaillée pour la console, un deuxième scénario a été ajouté, et on note l’apparition des Djinns, qui servent aussi bien au combat que comme « clés » pour faire avancer la quête. Le jeu, malheureusement, semblait souffrir d’un problème de gamedesign assez violent qui le bloquait obligatoirement la partie à un point donné si l’on oubliait quelque chose en particulier…
Puis, plus de dix ans après (2016), c’est sur mobiles Androïd, iOS et PS Vita que le jeu revient dans une nouvelle version nommée Adventures of Mana. Le gameplay est encore un peu plus souple et direct que dans la version précédente, il est tout en 3D et la bande-son a à nouveau été retouchée pour être plus dynamique et poignante. La patte graphique y est plus « mignonne » qu’on aurait pu l’attendre pour une histoire aussi sombre, mais on y retrouve bien une nouvelle version une fois encore différente (pour le même jeu à la base…).
Seiken Densetsu, voué à être une licence propre pour finalement devenir une sorte de spin-off, s’en est plutôt bien sorti au fil des années en restant présent grâce à de nombreux jeux. Le premier épisode d’une série est toujours important, et celui-ci nous le montre en perdurant au fil des décennies. L’essai de la version d’origine est conseillé malgré les remakes car finalement, il reste très jouable et dynamique, pour peu qu’on accepte le poids de l’âge qui pèse sur ses épaules. Un incontournable des 8 bits quoi qu’il en soit !
Captures d’écran prises par JDJ. Crédits des autres visuels : Tous droits réservés ©SquareEnix.
Sacré histoire derrière cette licence !
Perso j’y ai jamais touché, mais comme dit dans l’article, ça me fait pas mal penser à un mix entre Zelda et Ys. Et moi qui susit un grand fan des premiers Ys, je pense que ça pourrait me plaire ^^
Merci pour cet article !