[Découverte] Nako, un shōnen et une aventure à la française par Tiers Monde et Max
Il y a peu, les Editions Michel Lafon se sont associés à la société de production Shibuya Productions pour le développement d’une collection manga qui inclut les œuvres de gagnants du concours MAGIC International Manga Contest, coorganisée avec la prestigieuse maison d’édition japonaise Shueisha. Nako, un shônen d’aventure fantastique créé par le rappeur Tiers Monde et le dessinateur Max, a été le coup de cœur du jury manga du MAGIC 2018, présidé par Tite KUBO (Bleach).
Le premier chapitre publié sur le site Shônen Jump Plus dans le cadre du concours a conquis plus de 150.000 lecteurs, nous sommes donc allés voir de quoi il en retourne en rencontrant ses auteurs…
L’histoire de Nako est assez classique : Depuis des siècles, le village de Kaluline vit dans la paix, en parfaite harmonie avec la nature qui l’entoure. Aujourd’hui, le jeune Nako se prépare pour son rituel de passage à l’âge adulte qui lui permettra de devenir membre de la garde du clan des Convaincus. Mais des forces qui le dépassent se mettent en marche pour changer à jamais sa destinée.
Journal du Japon : Bonjour et merci pour votre temps… Pour commencer pouvez-vous vous présenter à nos lecteurs ?
Max : Bonjour, Je m’appelle Max, je suis le dessinateur et illustrateur. Je suis dessinateur à la base, mais Nako c’est mon premier manga.J’ai fait des illustrations sur l’actualité rap pour le Web média Booska-P. Je suis dessinateur dans le milieu du rap avec notamment des couvertures d’albums et de single.
Tiers Monde : Bonjour, Je suis Tiers Monde rappeur et scénariste de Nako. J’ai écrit des chansons, mais Nako c’est ma première oeuvre sur un long récit. Je viens du monde du rap, je fais parti d’un label avec d’autres rappeurs. J’ai personnellement fait trois albums et j’ai fait environ 300 concerts à travers la France. Je suis pas mal implanté dans cet univers. Je suis aussi un gros fan du Japon et de manga. Quand je me suis senti assez mûr pour raconter une histoire je me suis dis que ça devait absolument être pour un manga.
Vous n’avez pas penser à la BD d’abord ?
Tiers Monde : Non, ça tout de suite été pour du manga, encore maintenant je suis un gros consommateur. C’est vrai qu’à un moment j’avais un peu arrêté après la fin des années Dragon ball Z. Du coup j’ai raté pas mal de choses, et j’ai repris en plein Naruto. J’ai tout rattrapé ce que j’avais raté. C’est un secteur qui est tellement vivant par rapport à la BD que du coup c’est plutôt le manga qui m’attirait.
Et pour vous Max ?
Max : A la base j’ai une formation dans le dessin animé dans une école qui s’appelle : L’IDEM Creative Arts School dans le sud de la France. J’y suis allée deux ans, je voulais devenir dessinateur pour les storyboards ou du character design. Je suis plus de l’école cinéma 2D et de la BD franco-belge. C’est bien plus tard que j’ai connu le manga.
Comment s’est passée votre rencontre ?
Max : J’ai fait la couverture de son dernier album : No Future. Je ne l’ai pas rencontré directement, mais via un ancien chef de projet du label à qui j’ai montré mes dessins lors d’un concert… C’est comme ça que j’en suis venu à dessiner pour Tiers Monde. Et on eu un coup de foudre artistique, comme il aime dire. Ça c’est fait comme ça.
Graphiquement Nako est entre les deux BD française et manga.
Max : Oui, c’est ça. On était d’accord tous les deux, on voulait faire un manga. Je n’avais pas envie de faire une BD, alors que ce sont mes codes au départ. J’étais chaud pour faire un shōnen. Tiers monde est venu avec pas mal de références, même si j’en avais moi aussi. Il est venu avec de la matière en me disant : regarde celui-ci, ou celui-là. J’ai commencé Nako comme ça, de la manière la plus vierge possible… Tout en utilisant les codes du manga et en me les appropriant. Plus j’avançais dans la création du tome 1, plus je me suis approprié les codes, petits à petits.
Tiers Monde : On s’est complété rapidement, moi avec les manga et lui avec sa formation de story boardeur, ça donne un résultat hybride et qui fait l’identité de Nako justement. Je ne sais pas si Nako aurait été plus attrayant avec un autre trait, mais les retours que l’on a sont que ce manga est atypique et il faut vraiment que les gens voient ça.
Tiers Monde : Comme je disais, je suis un gros consommateur de shōnen, et on s’est dit avec Max que l’on devait s’enfermer le moins possible dans un univers. On s’est posé la question : « Comment ne pas choquer les lecteurs avec des choses anachroniques ? » Là par exemple dans Nako ça commence dans un village, mais ça va s’ouvrir par la suite.
Comment s’est passé la création des personnages ?
Tiers Monde et Max : (rires) ça été la bagarre !
Max : bon pas trop sur le tome 1 je trouve, mais ensuite c’est plus tendu. Dans ce premier opus on voulait aller à l’essentiel avec les personnages, éviter qu’il y en ait de trop, afin de les présenter de la manière la plus simple possible. Tiers Monde me décrit les personnages tel qu’il les voit , moi je prends en compte ce qu’il me dit ensuite et j’apporte ma vision des choses, aussi. Après c’est de la négociation. On a une conversation what’s app ou on parle beaucoup, on s’envoie des références etc. C’est comme ça qu’on a construit nos personnages.
Tiers Monde : On recherche à ce que nos personnages apportent au premier coup d’œil une émotion, un sentiment. Après c’est la bagarre entre nous.
Max : Truc bête, là où on a galéré dans le tome 1 c’est pour la coupe de cheveux de Nako. Au début on n’était pas d’accord. On s’est vite rendu compte que le caractère du personnage passait par sa coupe de cheveux.
Tiers Monde : On a eu plein de version de Nako : avec une coupe à l’iroquois, avec des dreadlocks… on a essayé beaucoup de choses. Et en fait on s’est rendu compte qu’il était déjà dans les premiers essais. En prenant du recul on s’est aperçu que c’était celui-là qui fonctionnait.
La préparation a-t-elle été longue ?
Tiers Monde : On a eu la première étape avec les 40 premières planches pour le concours, ensuite on a fait l’histoire du tome 1 qui fait 114 pages. On a ensuite été édité donc on est passé à 276 pages. On a travaillé régulièrement. A partir du moment où on était dans ce projet, on savait où on allait. On se donne vraiment les moyens de se que l’on fait, on est tous les jours en contact tous les deux pour se tenir au courant de ce qui avance, et de ce qui n’avance pas. On y a va au coup par coup. Nous sommes des jeunes en apprentissage. C’est l’une des meilleures manière de vivre le truc à fond. C’est d’être tout le temps dans le feu de l’action.
Max : Tout s’est plutôt bien enchaîné et de façon assez rapide pour nous. On n’a pas rencontré de problème majeur sur le premier tome. C’est plus sur le second où on peut buter parfois sur le design des personnages parce qu’on a pas la même vision (rires). Mais ça s’arrange très vite.
Tiers Monde : Ce qui est important c’est que ça reste un travail. Et il faut faire avancer la machine. Les problèmes qu’on a rencontré sur le tome 2 c’est dû au fait que dans le premier l’action tournait autour de 4 ou 5 personnages, alors qu’il y en a plus dans la suite. D’où le surcroît de travail que cela demande.
Max vous travaillez en traditionnel ou en numérique ?
Max : Alors je suis à l’ancienne, sur du papier A3, j’ai besoin d’espace pour dessiner. Donc crayonné et encrage noir au feutre. Ensuite, les ombrages sont gérés sur photoshop. Ça se fait couramment, c’est une chose que j’avais apprise lors de mes études pour faire les storyboards. Avec trois niveaux de gris on arrive très bien à jouer avec la lumière c’est ce que j’apporte à Nako pour accentuer mes textures, mes ambiances.
Qu’est-ce qui vous a donné envie de participer à ce concours ?
Tiers Monde : Moi j’avais déjà fait le déplacement pour le festival, donc c’est quelque chose que je connaissais. On avait déjà commencé le processus de création quand j’ai vu l’annonce du concours. On s’est donc lancé en toute humilité pour jauger un peu notre oeuvre. On n’était pas parti dans l’optique de gagner. Ce qui était intéressant, c’est qu’il y avait des éditeurs de la Shueisha qui étaient présents donc avoir ne serait-ce que leur retour c’est du pain béni. C’est ce qu’on était venu chercher au départ. Nous avons été nous même surpris d’être coup de cœur du Jury. Après ça n’a été que du bonus.
Max : C’était extra.
Quels sont les retours que vous avez eu du Japon justement ?
Tiers Monde : On a eu des retours sur l’articulation de notre histoire au début, aussi bien positifs que négatifs, on a donc recalibré Nako. On a eu aussi un retour quantitatif (150 000 lectures ndlr) au niveau des lecteurs. On était sur le cul, mais aussi très heureux. On les remercie beaucoup.
Max : Très grosse surprise pour moi, je ne m’attendais pas à ça au moment où je dessinais Nako chez moi à Montpellier. J’en suis très heureux.
Quels sont vos projets ?
Tiers Monde : Le tome 2 bien entendu, puis le tome 3. On aimerait bien sortir les trois premiers cette année. Le premier arc se terminerait sur le tome 6. Dans notre travail, on en est déjà à la moitié du tome 2 de dessiné (en février 2019, ndlr). On va essayer de gérer ça tout en gardant une “vie” en dehors de Nako. On veut vraiment ancrer Nako dans le paysage du manga français.
Un petit mot à nos lecteurs ?
Tiers Monde : Soyez curieux, venez découvrir un shōnen à la française. Si vous aimez le Japon, les manga, les anime comme Radiant, Lastman, Dragon ball Z, Naruto… Venez lire Nako et donnez-nous votre avis. On le lira avec attention.
C’est noté, merci !
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Remerciements à Tiers Monde et Max pour leur temps, ainsi qu’à Shibuya production, Shibuya International, Sahé Sibot et Laure Peduzzi.