La fable poétique du cochon et du renard
Mercredi est sorti sur les écrans français un joli film d’animation tout en délicatesse et en émotion qui s’adresse à toute la famille, à partir de 5 ans. Le cochon, le renard et le moulin – Pig : the dam keeper poems en anglais – narre les aventures de Pig, le veilleur de brumes, et de son ami Renard, duo emblématique de la société de production californienne Tonko House, créée par Robert KONDO et Daisuke « Dice » TSUTSUMI. Ces deux anciens de chez Pixar et Blue sky studio ont imaginé tout un univers emprunt de poésie et proche des problématiques des enfants. Le veilleur de brumes, The damkeeper en anglais, fut d’abord un court-métrage sélectionné pour l’Oscar en 2014 avant de se décliner en série télé au Japon sur la plateforme Hulu, en exposition, en module éducatif pour les écoles primaires, en art books et en bandes dessinées. Le nom même ainsi que l’identité visuelle de la société de production dérive de ce duo d’amis fictifs aussi opposés qu’attachants. Une belle réussite qui ne fait que confirmer toute la diversité et toute la beauté que peut offrir l’industrie de l’animation.
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Découverte du film et entretien avec l’un des créateurs, Robert KONDO.
Une histoire d’amitié entre un renard et un cochon
Réalisé par Erick Oh, lui aussi ancien de chez Pixar, Le Cochon, le Renard et le Moulin raconte le quotidien de Pig qui vit au sommet d’une colline, seule rempart contre un gros nuage noir qui menace le village en contre bas. Pig est laissé seul par son père, parti trouver une solution pour combattre cette brume noire. Avant de partir, ce dernier construit un moulin qui repousse la brume et dont Pig est responsable. Commence alors pour Pig l’attente du retour de son père mais aussi les aventures du quotidien, à la fois poétiques et fantastiques, souvent drôles, parfois un peu effrayantes, mais jamais barbantes. C’est au cours de ses aventures que Pig rencontre Renard et que leur amitié se développe, et c’est ensemble qu’ils traverseront toutes les péripéties en s’entraidant.
Divisé en 10 chapitres, le film reprend les épisodes de la série télé diffusée au Japon sur une durée totale de 50 minutes. Sont abordés des thèmes universels comme le chagrin, l’étape importante pour l’enfant de se séparer des parents, les responsabilités qui nous incombent en grandissant, l’importance de la famille, l’entraide et l’amitié au-delà des différences ainsi que l’écologie. La peur et les rêves bizarres ont aussi leur place chacun dans un épisode. C’est probablement cette propension à parler de toutes les émotions, positives comme négatives, de tous les sentiments, qui fait la force du film. Il en ressort l’impression nette que la vie est un tout et que tout expérimenter est normal. Le style visuel, doux et épuré, compose autant que le scénario, sur cette double facette de clair/obscur, de positif/négatif, jouant avec la spatialité du cadre, plaçant la tristesse et la peur du côté de la brume noire, à droite de l’écran, et la joie et les aventures, du côté du village et des autres, à gauche de l’écran. Au milieu de cela, Pig passe de l’un à l’autre le plus naturellement qui soit renforçant cette idée qu’on peut être triste et joyeux à la fois, seul et accompagné. Sans dialogue mais avec des bruitages et de la musique, composée par Zach Johnston et Matteo Roberts, le spectateur découvre, saynètes après saynètes, comment ce petit cochon, devenu le gardien du moulin et le veilleur de brumes, vivra tous ces évènements qui ramenés dans notre réalité, constituent la vie d’un enfant.
Les facettes d’une fable poétique
Extension de l’univers du court-métrage Le Gardien de brumes, le film est aussi clair et met plus avant l’entre-aide et l’amitié que le court-métrage est sombre et axé sur un moment difficile d’une vie. Le travail de Tonko House tout empreint de poésie qu’il soit, ne laisse aucun sujet de côté et, en un peu moins de 20 minutes, le court-métrage réussit à traiter de la violence physique ou verbale en milieu scolaire de façon compréhensible pour les petits. (Ndrl : lien pour le visionner en fin d’article). C’est à travers les personnages que les enfants peuvent identifier les « méchants »,
« la victime », « le nouveau », « les témoins », et par là-même reconnaître ce qu’ils sont, ce qu’ils voudraient être et ce qu’ils ne voudraient pas être. L’identification permet le chemin vers la discussion sur le sujet délicat de la violence gratuite et vers l’introspection. La société de production a d’ailleurs élaboré un module éducatif fondé sur le court-métrage pour les classes de primaire. Visuellement, la différence est flagrante aussi entre le court-métrage et le film: détails et effet crayons-pastels hachuré pour le premier; minimalisme et douceur de l’aquarelle pour le second. Dans les deux cas, le happy end est bien évidemment au rendez-vous, autant grâce à Renard, personnage lumineux qui apporte le changement, qu’à Pig lui-même, personnage sombre qui opère un changement chez lui-même pour changer le monde et les autres autour de lui. Y a pas : avoir un ami est l’une des plus belles choses au monde.
Rencontre avec Robert Kondo, co-fondateur de Tonko House et créateur de l’univers de Pig, le veilleur de brumes, The dam keeper en anglais.
Journal du Japon: Bonjour Robert, merci de nous accorder de votre temps. Commençons par le commencement : comment l’univers du veilleur de brumes est-il né?
Robert Kondo : Tout a commencé en 2011. A l’époque, Dice (Ndlr : Daisuke TSUTSUMI, son associé) et moi travaillions tous les deux comme directeurs artistiques sur Monstres academy (2013) chez Pixar. Dice m’a alors proposé de faire un court-métrage ensemble afin de se frotter concrètement à la réalisation ce qui ferait de nous de meilleurs directeurs artistiques. On a donc commencé l’écriture d’un court-métrage. En fait, depuis Toy story 3 (2010) Dice et moi sommes devenus très proches car on partageait le même espace de travail et les mêmes tâches. On peint même de manière très similaire. Dice avait déjà réalisé une petite vidéo animée pour promouvoir l’un de ses propres projets « sketchtravel ». On l’a visionné ensemble et on s’est dit qu’on pouvait faire quelque chose de bien plus développé que cela, techniquement et artistiquement parlant.
JDJ : L’idée de créer une société de production n’était donc pas dans vos plans du départ.
RK : Oui, ça ne l’était pas. Travaillant pour Pixar, on a pu faire The dam keeper grâce au programme Pixar Co-op qui permet à des employés de développer leur propre projet. L’écriture a pris 1 an et la réalisation a duré 9 mois, ce qui est long. Et durant tout ce temps, on travaillait au quotidien avec une vingtaine de personnes sur notre film sur notre temps libre. On avait vraiment une équipe autour de nous et quand on a commencé à travailler à nouveau pour Pixar sur Coco (2017), on a bien senti qu’on avait changé, que même si on était content d’être à nouveau des directeurs artistiques, rien ne serait plus pareil. Vous savez, produire ce court-métrage, ça a été vivre au quotidien autant dans l’excitation que dans la peur : l’excitation de créer, de se surpasser et la peur d’échouer, de ne pas savoir comment gérer les crises, et des crises on en traverse dans de telles situations. Et je crois qu’on est devenu accro à ce mélange qui est inhérent à la prise de risques. Dice et moi, nous nous sommes questionnés sur notre choix de carrière, notre choix de travailler pour un gros studio, notre envie de raconter des histoires. C’est aussi arrivé à un moment de nos vies où, personnellement, on évoluait aussi en devenant parents. On était bien conscient que travailler chez Pixar représentait un sommet dans notre carrière mais il était aussi important pour nous de nous demander quel impact on voulait avoir sur le monde qui nous entourait. On voulait être sûr de partir pour les mêmes raisons et les bonnes, selon nous. Et ça nous a poussé à démissionner en 2014 pour créer Tonko House, notre propre société de production. Et depuis, on n’a pas vraiment eu le temps de regarder en arrière, tout est allé très vite et on ne regrette pas notre choix même si le risque est plus grand maintenant qu’avant parce qu’on est responsable de plusieurs personnes. En réalité, en quittant Pixar on ne savait pas ce qu’on allait faire mais pourquoi on allait le faire. Donc, c’était vraiment repartir de zéro avec toute l’excitation et la peur que ça comporte.
JDJ : Vous avez évoqué les personnes dont vous êtes responsables. Justement, combien d’employés travaillent pour vous aujourd’hui?
RK : 14 personnes aux USA et 4 au Japon où on a une petite antenne.
JDJ : Le court-métrage est à l’origine de l’univers de The dam keeper qui comporte désormais une série télé, une expo, des artbooks et des bandes dessinées, un module éducatif pour les écoles primaires, et maintenant ce film. Quoi encore?
RK : Oui, dit comme ça, ça fait beaucoup en fait. Avec le court The dam keeper, on voulait amener le public à s’interroger sur le monde dans lequel il évolue. Nos films sont des fables basées sur des anecdotes et des histoires qui proviennent de notre propre vécu et on espère qu’à travers eux, on arrive à dépasser le simple divertissement et à toucher les gens, à les encourager à discuter. On espère qu’après avoir vu The dam keeper, les parents et les enfants parlent de leur expérience de l’école. Et en développant l’univers de The dam keeper sous différents formats, ça permet de multiplier les possibilités de faire naître cette sensibilité ou cette curiosité par rapport à certains sujets que l’on traite dans nos films. On travaille vraiment sur cet équilibre entre divertissement et éveil de la curiosité ou sensibilisation du public. Le module éducatif en est le parfait exemple.
JDJ : Pourriez-vous nous expliquer d’où vient le nom de votre société, Tonko House?
RK : « Tonko » est un mot fabriqué, issu du japonais. « Ton » est un mot que l’on peut relier à celui de « cochon » et « ko » à celui de « renard ». Donc, c’est la maison du cochon et du renard. Et on a choisi « House » plutôt que « production » ou « studio » parce que ça évoque pour nous plus l’idée de ce qu’on a vécu nous-mêmes, Dice et moi, en faisant The dam keeper : un endroit où des créatifs, des scénaristes et des réalisateurs peuvent venir travailler, prendre des risques, peuvent échouer et apprendre ensemble. Un lieu où l’on évolue ensemble avec les frustrations, les défis et les joies. Là où un grand studio semble immuable, stable comme une véritable zone de confort, une maison, même si c’est un lieu important pour soi, ça peut ne pas être le seul lieu important de sa vie. Tu peux en partir et y revenir à tout moment.
JDJ : Etre nommé pour un Oscar avec sa première réalisation, ça fait quoi?
RK : Fierté mais aussi humilité, même si beaucoup de gens doivent le dire. Avec The dam keeper, on a fait pas mal de festivals et on a vite réalisé la quantité et la qualité des films qui circulaient en même temps que le nôtre. La nomination aux Oscar, je la pends comme le résultat d’avoir été un bon moment, au bon endroit, même si j’avais envie de crier sur tous les toits avec fierté « Et, on a bossé vraiment dur dessus », j’étais aussi conscient des centaines de films aussi bons que le nôtre, qui ont demandé autant de travail mais qui n’ont pas fini sur la shortlist. Dans ce sens, Dice et moi, avons eu le sentiment d’être les représentants des réalisateurs et producteurs indépendants car même si on venait de chez Pixar et même si pour ce genre de récompenses l’objectif est d’abord de juger la qualité de la mise en scène, la différence entre les films produits avec un gros studio derrière et ceux produits indépendamment est énorme. On n’a pas gagné et dans un sens, je me dis que c’est mieux ainsi parce que gagner ce prix en tout début de carrière ne nous aurait probablement pas aidé à évoluer par la suite. Ca nous a fait connaître de pas mal de gens du milieu et du public à l’international aussi, et c’est déjà bien. Et ça nous a aussi laissé sur notre faim, alors on continue à travailler pour gagner à nouveau notre prochaine nomination en temps voulu.
JDJ : Dans vos films, il y a un très beau travail visuel, présent aussi dans l’écriture, sur les symboliques de la lumière et de l’obscurité. Mais loin de les opposer, vous les posez comme naturellement complémentaires.
RK : Tout à fait. En tant que scénariste, réalisateur et peintre, pour moi, il n’y a pas de lumière sans obscurité et inversement. Elles sont inséparables, même dans les moments où l’une domine l’autre. C’est ce dont notre monde est fait dans ce que l’on voit, touche ou ressent. Vouloir un monde avec l’un mais pas l’autre c’est l’amputer et se priver. Et dans nos histoires et nos films, travailler sur la lumière et l’obscurité, sur la tristesse et la joie, le sombre et le lumineux, la solitude et l’amitié, est un moyen d’exprimer l’idée de vivre ensemble malgré les différences.
JDJ : Dans ce sens, Renard est vraiment l’incarnation du personnage lumineux. Il est évident que le travail sur les personnages est important en animation, mais pour vous, est-ce que le développement des personnages est l’élément central, vital, à toute bonne histoire?
RK : Pour moi, le développement des personnages est l’élément le plus challengeant, le plus difficile. Il s’agit de créer des personnages fictifs qui semblent réels et crédibles et en animation, on part de rien pour leur donner vie, on insuffle la vie à des objets et des personnages créés de toute pièce. Et arriver à créer un personnage animé duquel le public va se sentir proche et qui va le toucher, c’est savoir qu’on a réussi car à partir de là, on peut raconter n’importe quelle histoire. Si le public s’identifie aux personnages, alors partir dans l’espace ou aller à l’épicerie du coin devient une belle histoire à raconter.
JDJ : On sent que les enfants sont un public que vous aimez mais aussi qu’à travers vos films, vous voulez leur donner confiance en eux et leur dire d’accorder aussi leur confiance aux autres.
RK : On veut embarquer toute la famille sur ce chemin-là, en fait. Et on en revient aux personnages je pense, et au fait qu’ils sont des incarnations de nous-mêmes. Pig, par exemple, est le personnage avec lequel Dice et moi-même nous identifions. Fox est quant à lui, le genre de personnage auquel on aimerait tous tellement ressembler. Et les personnages de Hippo et de Crocodile incarnent une partie de nous qu’on aimerait ne pas avoir en nous. Notre message n’est pas de dire que le harcèlement est mauvais et que les enfants ne doivent pas harceler les autres. Franchement, le harcèlement existera toujours. Néanmoins, Fox n’est qu’un témoin de la situation et il aurait très bien pu rester passif et ne rien faire. Mais au contraire, il s’engage, il s’intéresse, et intervient et c’est lui qui change la situation pour Pig, qui change Pig. On n’est pas là pour dire aux gens quoi croire mais on aimerait vraiment les inciter à être plus curieux, à s’interroger et à trouver des réponses ou des solutions car, de la sorte, on prend confiance et on se rend compte que c’est pas un souci d’être différent, c’est pas un souci d’avoir plein de questions, c’est pas un souci de ne pas avoir réponse à tout.
JDJ : Pour le film, vous avez choisi dans le titre anglais le mot « poems » et non « little stories » ou « chapters ». Pourquoi ce choix de mot?
RK : Cela vient de deux choses : d’abord nous travaillions à l’époque de la production du film sur des livres d’histoires de The dam keeper qu’on voulait très poétiques. A côté de cela, Erick, le réalisateur du film, a tout de suite identifié les saynètes comme des souvenirs, des instants de mémoire avec toute la poésie que cela pouvait porter. Ca a eu un impact fort au niveau visuel parce qu’on avait comme objectif d’insuffler à l’écran cette poésie et le résultat fut qu’on a beaucoup épuré et enlever des éléments.
JDJ : ça m’a d’ailleurs fait penser à des haikus, j’avais l’impression de voir des haikus animés.
RK : Vraiment ? Maintenant que vous le dites, je peux comprendre l’analogie.
JDJ : Vous avez confié la réalisation du film à Erick Oh. Sachant ce que représente l’univers du The dam keeper pour Dice et vous, comment s’est passé cette passation?
RK : Erick avait travaillé sur le court-métrage The dam keeper. Il nous aidé, avec d’autres, à lui donner vie. Pour nous, il fait donc partie de la famille parce qu’il a été là du départ aussi. Dice et moi n’avons pas longtemps hésité, surtout qu’en plus, Erick a réalisé bien plus de films à ce jour que nous deux réunis. Il est de ceux vers qui nous nous tournons sans hésiter quand nous nous interrogeons sur une idée ou une problématique artistique ou d’écriture. En fait, on était bien plus enthousiaste et curieux de voir ce qu’il allait faire de l’univers et de l’histoire de Pig et de Fox qu’autre chose.
JDJ : Le cochon, le renard et le moulin est diffusé au Japon sous forme de série télé, vos expositions s’y tiennent aussi et certains de vos posts sur vos réseaux sociaux sont d’ailleurs bilingues, anglo-japonais. Une relation spéciale entre Tonko House et le Japon semble donc se construire. Comment cela est arrivé?
RK : Dice est Japonais, il y a grandi et étudié à Tokyo. Je suis né et j’ai grandi aux Etats-Unis mais je suis d’ascendance japonaise, et travailler à Tonko House m’a permis de me connecter à la culture japonaise et par là, à mes racines, notamment grâce à mes associés. Car il y a un troisième associé qui lui aussi est Japonais (Ndlr : Daisuke « zen » MIYAKE). Il est plus dans l’ombre, comme un producteur en fait. Mais il a grandi au Japon et est arrivé aux USA pour le lycée. Dice et lui ont toujours évoqué leur envie de retourner au Japon d’une manière ou d’une autre. Et puis, l’industrie de l’animation au Japon est riche d’une culture visuelle et narrative très forte, et le domaine du CG (Ndlr : Computer Graphics) est en plein boum là-bas. Quand Dice et moi avons lancé Tonko House, les permières personnes qui sont venues nous voir sont les responsables du studio japonais Anima spécialisé en CG. Ils étaient vraiment curieux de voir ce que deux anciens de chez Pixar et Blue sky studio voulaient faire avec leur propre société de production. Et à partir de là, on a compris qu’on était perçu comme un pont entre Hollywood et le Japon dans l’animation et le domaine du computer graphics, en particulier. L’industrie
de l’animation japonaise possède également une technicité et un niveau d’excellence extraordinaires. On a donc eu très vite envie de prendre le meilleur des deux, notre expérience hollywoodienne d’un côté et la spécificité et la force de l’animation japonaise de l’autre, afin d’arriver à créer quelque chose de nouveau et de singulier. Depuis, on développe nos collaborations avec le Japon. La moitié de la production de Pig : the dam keeper poems a été réalisé au Japon et Moom, notre seconde production, a été réalisée en collaboration avec des sociétés japonaises. Et on ne compte pas s’arrêter là.
JDJ : Et bien justement, c’est quoi la suite ?
RK : En mai prochain, nous organisons deux évènements, un au Japon et un en Corée. A Tokyo, on organise un festival avec un mois de projection de films dans un cinéma de Shinjuku, et en Corée, on fera notre première exposition à Séoul dans le district de Gangnam. Il y a la sortie du film et la sortie des bandes dessinées de The dam keeper en France. Niveau animation, on travaille actuellement sur une série en stop motion pour le Japon et aussi sur une série en 2D autour de la musique. Et un long-métrage de The dam keeper aussi.
JDJ : Vous qui avez travaillé pour de grands studios et qui êtes maintenant indépendant, comment voyez-vous le futur de l’industrie de l’animation?
RK : L’évolution du modèle de distribution change les choses en changeant lui-même ces dernières années. Il y a encore 5 ans, sans des millions de dollars, il était impossible d’être distribué à l’international. Mais le changement des modes de distribution ouvre ce nouveau marché dans lequel des sociétés comme Tonko House peuvent désormais toucher le public partout dans le monde. Cette internationalisation du public permet aussi de rendre visible des poches de public spécialisé ou intéressé par un type de format ou de genres ou de sous-genre, etc. Donc, publics et créatifs arrivent à se trouver et à se suivre. Ce n’est peut-être pas la meilleure analogie mais, si je compare avec l’industrie alimentaire, il y a d’un côté les chaînes de restauration que vous retrouvez partout dans le monde et où vous mangerez la même chose et c’est cool. Et puis, à côté de cela, vous trouverez aussi partout dans le monde de très bons restaurants de plus en plus spécialisés sur des produits ou des cuisines et affichant leurs valeurs et c’est tout aussi cool.
Nous, on se voit comme ces restaurants-là. En résumé, c’est dificile d’être en compétition avec un Disney mais en même temps, il y a d’autres moyens ou endroits où se développer, je pense à Netflix, par exemple, et tout autre plateforme en ligne de diffusion. Plateformes d’ailleurs qui font évoluer les formats même des oeuvres. Elles permettent aussi de construire et de souder des communautés à travers le monde. Elles chamboulent vraiment le modèle établi et c’est pour le mieux pour nous, créatifs, car ça ouvre énormément de perspectives pour l’avenir. En 3 ans, il y a des films qui ont été distribués et qui ont trouvé leur public alors que dans l’ancien système de distribution ils n’auraient jamais pu être distribués de la sorte. Et toujours, à côté de cela, prenez Spiderman, énorme franchise, énorme marché, où vous avez un gros studio qui expérimente visuellement et narrativement parlant (Ndlr : et qui vient de décrocher l’Oscar du meilleur film d’animation). On n’avait pas vu ça depuis longtemps. Donc, on est entré dans un schéma où les gros studios expérimentent pour se renouveler afin de rester dans la course et où les studios indépendants trouvent leur place et leur public. Et c’est super pour nous car on a encore plein d’histoires à raconter. J’aimerais vraiment que Tonko House et les studios indépendants appartiennent au prochain modèle de réalisation et de production de films, qu’on soit pris en exemple par les futures générations de réalisateurs d’animation.
JDJ : merci Robert et bonne continuation !
Merci à Robert Kondo et à Giselle Grimaldo pour l’organisation de cette interview
Vous pouvez visionner le court-métrage The Dam keeper sur ce lien.
Plus dinformations sur Tonko House, c’est ici.
1 réponse
[…] Le Cochon, le renard et le moulin réalisé par Erick Oh est l’une des bonnes surprises de l’année. A la rédaction, nous avions apprécié cette fable pleine de poésie écrite pour un jeune public (à partir de 6 ans) et c’est avec plaisir que nous découvrons sa 12e place et ses 26 873 entrées. Le film aborde des thèmes universels comme le chagrin, l’autonomie progressive de l’enfant et les responsabilités inhérentes, la famille, l’entraide et l’amitié au-delà des différences mais aussi l’écologie. Le style visuel, doux et épuré ainsi que les musiques de Zach Johnston et Matteo Roberts participent à l’attachement du spectateur pour ce petit cochon, devenu le gardien du moulin et le veilleur de brumes. […]