Les Neiges de l’éternel : La solitude est un art
Avec la sortie du dernier roman de Claire Krust, L’envolée des Enges aux éditions Hélios, Journal du Japon remonte un peu le temps et se penche sur son premier ouvrage, le très remarqué Les Neiges de l’éternel, lauréat du Vampire & Sorcière (V&S) award dans la catégorie fantastique l’année de sa sortie (août 2015). Réédité en format poche toujours aux éditions Hélios, Les Neiges de l’éternel est un recueil de nouvelles se déroulant au Japon féodal qui retrace la vie d’une famille de nobles sur le déclin au fil des ans. Plusieurs thématiques sont présentes dans ces cinq nouvelles et, malgré ce format d’écriture découpé, nous avons à faire à une seule et même histoire.
« Une » histoire en huit-clos
Tout comme le titre l’indique, la neige, le froid, le blanc sont bien évidemment des éléments communs aux cinq histoires. La froidure de l’hiver qui contrecarre les plans de nos protagonistes, la blancheur des peaux typiquement japonaise, des murs vierges de tout mobilier ou décoration ou encore le vent glacial sont tant d’éléments qui rappellent à nos personnages principaux qu’ils ne sont que des hommes, ou presque.
Et tout ce blanc les renvoie aussi à leur solitude. L’un parce qu’il est prisonnier des murs entre lesquels il vit, l’autre parce qu’elle n’a nulle part où aller.
La force de caractère de nos personnages est aussi une problématique récurrente qui les renvoie fatalement vers leur isolation. Ils campent sur les idées, leurs point de vue et cela ne fait que les exclure de leur famille et du groupe comme de la société dans lesquels ils évoluent.
Le fil rouge
Pourtant, Les Neiges de l’éternel est avant tout une histoire de famille, celle de nobles, qui nous sert de fil rouge pour comprendre l’intégralité de l’histoire, et que l’on prend plaisir à retrouver d’une nouvelle à l’autre, de façon plus ou moins évidente car c’est parfois au lecteur de faire ses propres déductions par rapport aux informations données dans le récit.
Dans chaque nouvelle, il est aussi question de faire évoluer un jeune personnage au travers d’épreuves beaucoup trop difficiles pour eux : combattre la maladie, partir en voyage dans le froid et la neige, quitter un lieu familier qui nous a protégé toute notre vie…
Et le Japon dans tout ça ?
Bien sûr, ce qui est intéressant dans ce recueil, c’est aussi le cadre des actions: l’époque Edo (Ndrl : vous trouverez des informations sur cette période historique ici).
Plusieurs détails sont présents pour nous rappeler que nous nous trouvons au Japon :
- Tout d’abord, l’auteure n’hésite pas à intégrer directement des termes en japonais dans ses histoires, même si écrits en romaji (Ndlr : en utilisant l’alphabet latin).
- Ensuite, le folklore japonais. Nous ne pouvons passer à côté des histoires de fantômes qui occupent tout de même deux nouvelles sur les cinq présentes. Il faut dire que Claire Krust est une passionnée de ces êtres surnaturels et que ce sont justement eux qui lui ont inspiré cet ouvrage. Sans oublier les demeures aux portes coulissantes, les autels à encens pour se souvenir des ancêtres que nous pouvons retrouver au détour d’un chapitre.
- Enfin, la calligraphie a une place primordiale dans l’intrigue. Par ailleurs, lorsque l’art est exercé, les détails de l’auteure sont tels que l’on se croirait devant le personnage en pleine écriture. Matériel, état d’esprit et façon de faire, tout est emprunt de nostalgie et de sérénité.
Pourtant, bien que central sur le quatrième de couverture pour résumer l’oeuvre, le Japon est un brin anecdotique. A savoir que si cela se passait dans une autre époque, dans un autre pays tout en gardant notre famille de nobles en fin de règne, cela aurait le même effet sur le lecteur.
Un award mérité.
Ce qui est à retenir dans Les Neiges de l’éternel, c’est principalement le style fluide et simple de Claire Krust. Il permet une immersion totale dans son univers, dans la psyché des personnages. Voilà pourquoi il n’est pas important que l’action se déroule au Japon même si on apprécie tout de même ce « clin d’œil » d’une, sans doute, passionnée. Mais au vu de la qualité du livre, il n’est donc pas étonnant qu’elle ait rafler le prix du meilleur roman Fantastique en 2015.
C’est sans hésiter que vous pouvez vous laisser tenter par cette réédition au format poche des Neiges de l’éternel, en attendant le deuxième et dernier tome de la saga, et que vous pouvez suivre cette jeune auteure plenie de promesses.
Plus d’info sur l’auteure et ses oeuvres ici.