Gaming Memories #14 : Spécial Mega Drive

Bienvenue dans ce quatorzième numéro de Gaming Memories. Cette fois-ci, nous continuons dans les numéros spéciaux car ce mois d’octobre marque les trente ans de la sortie de la Mega Drive de SEGA. Nous vous proposons donc un retour sur la première machine 16 bits du marché du jeu vidéo. Prêts à aller rendre visite à Maître  Sega et au Punk ? Alors, c’est parti !

Mega Drive

Une nouvelle génération approche

L’histoire de la Mega Drive commence en 1987. A ce moment, SEGA s’occupe de sa console actuelle, la Master System. En arcade, leur System 16 a toujours autant de succès, mais face à la Famicom de Nintendo toujours aussi populaire cinq ans après sa sortie et la toute récente PC-Engine de NEC, il fallait riposter. L’idée de base de la machine est de porter le système d’arcade en machine de salon pour réaffirmer sa place sur le marché du jeu vidéo.

MEGA DRIVE SEGALa Mega Drive, première console d’une nouvelle génération (16 bits), arrive en octobre 1988 au Japon. Malgré un accueil favorable de la part de grands magazines comme Beep ! ou Famitsu en juin 1988, elle est un peu boudée par les joueurs : seulement 400.000 exemplaires sont vendus lors de sa première année. Les joueurs continuent à lui préférer la Famicom et la PC-Engine, l’une étant très populaire depuis plusieurs années et l’autre, techniquement impressionnante (et précurseur de l’utilisation du CD-Rom dans le jeu vidéo domestique).

La MD avait pour nom Sega Mark V lors de son développement. Mais les dirigeants de la firme estimaient qu’il était préférable de choisir un nom qui aurait plus d’impact. Après trois-cent propositions échangées, SEGA se fixe finalement sur le nom «  Mega Drive ». A cette époque, la mascotte de la firme était encore Alex Kidd, surtout héros de la console précédente, la Master System.

Spécifications techniques

MEGA DRIVE 2La Mega Drive est une console dite 16 Bits, la quatrième génération. Elle reprend la carte arcade System 16 comme 0, mais le processeur utilisé est un Motorola 68000. Ce dernier, bien que cher pendant un temps et daté de quelques années, vit son prix chuter au fil du temps. Devenu ainsi viable, le 68000 a été utilisé dans de nombreux appareils, y compris pour le jeu vidéo. Dans certaines bornes d’arcade, déjà, et aussi dans des ordinateurs de marque Apple (Apple Lisa en 1983 et Macintosh en 1986). Les deux grands concurrents du jeu vidéo sur micro-ordinateur, Commodore et Atari, s’en servirent également pour leur Amiga et Atari ST. Un processeur qui n’en était donc pas à son coup d’essai.

Par crainte que celui-ci soit surtout occupé par le côté graphique, SEGA l’a accompagné d’un processeur Zilog Z80. Celui-ci gérait uniquement le son en renfort. C’était une recette visiblement finement trouvée car elle fut réutilisée pour plusieurs jeux du System 16 en arcade, mais pas uniquement : Capcom et SNK reprirent la combinaison pour leurs systèmes (respectivement) CPS1/CPS2 et Neo Geo MVS. La Mega Drive avait souvent pour réputation d’avoir un son criard et pas toujours agréable à l’oreille, mais elle était pourtant capable de belles mélodies (il a même été prouvé que des chansons en qualités MP3 pouvaient être lues par la console…). Ce processeur contrôlait les puces Yamaha YM2612 et Texas Instruments SN76489.

A l’écran, la console affichait une résolution qui allait de 320×220 à 320×448 selon le type d’affichage (balayage progressif ou affichage entrelacé). Concrètement parlant, la Famicom de Nintendo affichait du 256*240 et la Super Famicom, de 256*224 à 512*229 en progressif et 512*448 à 512*478 en interlacé (la résolution n’était pas la même selon l’endroit, selon si la console était en NTSC ou PAL). La Mega Drive, bien que bourrée de couleurs dans certains jeux comme les Sonic the Hedgehog, était pourtant réputée pour en avoir d’un peu ternes, à coté des couleurs éclatantes de sa concurrente directe Super Nintendo. Elle disposait de 512 couleurs et jusqu’à 64 à simultanément à l’écran. Mais bien que ces procédés n’aient pas été utilisés avec tous les jeux – et loin de là –, la MD était capable de scrolling horizontal, vertical, de distorsions d’écran et de déplacements à haute vitesse. Le « Blast Processing », tel qu’on l’appelait, était un procédé de programmation exclusif permettant des défilements à haute vitesse sans faire ralentir la machine. Un avantage certain pour des jeux de type Shoot’em-up. Elle pouvait afficher soixante-quatre sprites par image.

Phantasy Star IV, SEGA, 1994

Phantasy Star IV, SEGA, 1994

Les cartouches de jeu pesaient en général deux méga-octets. Certaines faisaient plus que cela. La première cartouche à les dépasser, en faisant à l’époque la cartouche la plus « lourde » du marché fut celle de Phantasy Star II (cinq Mo). D’autres jeux, plus poussés, allaient jusqu’à vingt-quatre Mo (Phantasy Star IV) ou même trente-deux Mo (The Lost World : Jurassic Park). Cela peut paraître risible à coté de ce qui se fait de nos jours, ou même déjà à coté de la capacité des cartouches Super Famicom et sa capacité à compresser/décompresser les données (ce qui permettait des softs de plus grande taille), mais c’était ce que l’on pouvait appeler de « gros » jeux.

Les cartouches, pour finir, étaient rarement « zonées » (une cartouche zonée japonaise ne pouvait pas être lue sur une console US ou Euro et ainsi de suite), ce qui permettait de jouer avec des jeux JP sur les autres modèles (à condition d’élargir un peu le port cartouche). Ce zonage n’a réellement commencé à prendre place qu’à partir de 1993 (c’est aussi l’année de sortie de la MD II), dotant certains jeux comme Landstalker de protections lourdes et difficiles à franchir. De manière « amusante », un certain nombre de cartouches européennes contenaient le jeu européen et japonais en même temps.

Carrière de la machine

Comme dit plus tôt, la console ne s’est pas énormément vendue au Japon lors de sa première année. Elle arriva aux États-Unis en août 1989 sous le nom Genesis puis en Europe et au Brésil en 1990. Par cette diffusion rapide au travers du monde, SEGA parvint à s’approprier une large part du marché du jeu vidéo, en avance sur son concurrent le plus direct, Nintendo (la PC-Engine est restée assez discrète en dehors du Japon). Les deux firmes s’échangeaient régulièrement des « piques » grâce à un marketing assez présent (« Genesis does what Nintendon’t » aux USA, ou Maître Sega et le punk en France, par exemple…)

Ristar, SEGA, 1995

Ristar, SEGA, 1995

Au Japon, la firme au hérisson bleu – quoi qu’il n’arriva et s’imposa comme mascotte qu’en 1991 – préféra créer un paquet d’accessoires à utiliser avec sa machine, la transformant en véritable outil multifonction, comme avec le Sega Mega Anser (un logiciel de comptabilité développé en commun avec une banque japonaise), par exemple. Il y eut même un service permettant de télécharger des jeux pour y jouer en ligne.

Les produits dérivés et liés ne s’arrêtent pas là. Le constructeur Aiwa sortit un poste cassette/CD intégrant une Mega Drive, ou bien elle fut coupée à une machine de karaoke avec le Mega Drive. Un modèle spécial nommé Mega Jet a également été intégré aux avions Japan Air… En 1992, une machine combinant MD et MCD sortit sous le nom WonderMega, et une version portable nommée Nomad est a été mise sur le marché américain en 1995. De quoi tenter de conquérir le monde !

Mega CDTrois machines liées sortirent un peu du lot : Power Base Converter, MegaCD et 32X. Le premier était un adaptateur de jeux Master System pour Mega Drive, mais les deux autres étaient comme des petites consoles à eux seuls. Le MegaCD (sortie décembre 1991), comme son nom l’indique, était un add-on qui utilisait les CD-Rom comme support de stockage de jeux. NEC avait déjà commercialisé le CD-Rom² de la PC-Engine fin 1988, c’était donc un marché qui s’ouvrait naturellement aux  constructeurs. Le CD-Rom permettait d’en mettre plein la vue avec une meilleure flexibilité que le LaserDisc utilisé dans certaines bornes d’arcade. Mais le prix du CD-Rom était élevé et celui de l’appareil le fut également… le 32X, en 1994 ne fit pas l’unanimité non plus. Cher, et pas forcément rentable, il n’y eut que 100 000 exemplaires vendus à sa première année environ. La faute à un nombre trop faible de jeux sortis (seuls deux jeux sont sortis avec l’appareil, pour commencer….). Cependant, le 32X doublait pourtant les capacités de la MD.

SEGA 32 XSEGA conçut une puce nommée « Sega Virtua Processor » en 1994. Celle-ci, tout comme la Super FX utilisée dans Star Wing et Stunt Race FX sur Super Famicom, était vouée à augmenter les capacités d’une cartouche de jeu. Sur Mega Drive, elle ne servit qu’avec Virtua Racing, où elle permettait un affichage 3D même plus fluide que celui de Star Wing (pourtant déjà impressionnant pour l’époque). Cette puce fut en quelques sortes l’idée de base pour le 32X, avec lequel certains jeux comme Doom accédèrent à leur tour à la ludothèque SEGA. Mais les jeux, beaucoup moins nombreux que sur la console principale, firent devenir cette tentative de longévité un échec. De plus, la Saturn arrivait à grands pas… le 32X sortit en novembre 1994 aux USA (sa première sortie, avant même le Japon), tout comme la Saturn dans le pays du soleil levant.

Cela n’a pas empêché la Mega Drive d’avoir une durée de vie de presque dix ans. 1997 signe sa fin officielle. La société TecToy en commercialisa jusqu’en 1999 sur le sol américain, alors que quelques jeux y sortaient encore (InternationalSuperstar Soccer Deluxe de Konami en 1996, The Lost World : Jurassic Park d’Appaloosa Interactive en 1997…).  Si cette année marque la fin au Japon, les États-Unis continuèrent à faire tourner la console : SEGA confia la licence de la machine à Majesco Enterprises, qui en réinjecta une fournée sur le marché en lot avec des jeux invendus. Ils sortirent même une Mega Drive 3. La console a eu beaucoup plus de succès en dehors du Japon, d’une façon écrasante. Sur presque trente-et-un millions d’unités vendues, seuls 3.58 millions s’écoulèrent au Pays du Soleil-Levant. Pourtant, la Mega Drive reste sans doute la machine la plus populaire de la firme.

Des centaines de jeux… et un hérisson

La Mega Drive a accueilli dans les neuf-cent jeux au cours de sa carrière, dans un grand nombre de genres. Beaucoup sont restés au Japon, ou ont pu arriver aux USA, mais jamais en Europe. Malgré un soutien d’éditeurs tiers moins fort que sur les consoles Nintendo, certains comme Capcom ou Konami y ont créé des jeux remarquables.

Les trois premier Sonic the Hedgehog (1991, 1992, 1994).

Les trois premier Sonic the Hedgehog (1991, 1992, 1994).

Comme dit précédemment, à la sortie de la console, celle-ci n’avait pas encore de mascotte. Hormis Alex Kidd pour la Master System, SEGA restait sans vrai personnage fort – tel que Mario pour Nintendo ou Bonk, le héros de PC Kid, pour la PC-E. A cette époque, ces personnages étaient importants et pouvaient représenter l’esprit et l’identité d’une machine et son constructeur. Sonic the Hedgehog s’imposa dans ce rôle et le jeu sortit en juin 1991 d’abord aux États-Unis puis au Japon et en Europe. Il se vendit à quinze millions d’exemplaires, ce qui en fait le plus vendu de la machine.

Genesis does what Nintendon’t… forever ?

Valis III, Telenet Japan, 1991

Dire que la 16 bits de SEGA a été leur console la plus populaire ne serait pas exagéré. Parmi toutes celles de la firme, c’est celle qui revient le plus souvent. Il est vrai que la Saturn et la Dreamcast la suivent de très près, mais concrètement, c’est leur aînée qui fait le plus souvent parler d’elle. Du moins chez nous car au Japon, la collection Sega Ages 2500 sortie sur PlayStation proposait de remakes de jeux des autres. Quelques numéros de la collection ont vu le jour sur PlayStation 3 et XBox 360. Chez nous, c’est surtout la Mega Drive qui a eu cet honneur avec les Sega Mega Drive Collection (PS2, 3, 4, XBox 360, PSP, Steam). Ces collections ont été publiées pour la première fois en novembre 2006, proposant plus de cinquante jeux.

L’idée de collection massive ne s’arrête pas là. Plusieurs Mega Drive (fabriquées en sous-main mais avec licence officielle) ont vu le jour lors de cette dernière décennie. En décembre 2017 sortait un nouveau modèle incorporant soixante-dix jeux et permettant d’utiliser ses cartouches d’époque. Les avis sont parfois mitigés, mais c’est un équivalent sans égal aux compilations sur consoles de salon.

Bien évidemment, la Mega Drive a sa propre personnalité parmi les Sega Hard Girls, ces personnages  représentant les consoles et accessoires principaux de l’éditeur. Forcément, elle fait partie des protagonistes principaux, aux cotés de Saturn et Dreamcast. Le jeu Superdimension Neptune vs Sega Hard Girls (PS Vita, Steam) la mettait aussi en scène comme l’une des héroïnes jouables. Sa version américaine, Genesis, faisant une apparition, comme MegaCD, 32X

SEGA HARD GIRLS

Les Sega Hard Girls Mega Drive, Mega Drive II, Genesis

Aladdin, Virgin interactive, 1993

La Mega Drive est également utilisée à d’autres fins, par des fans. Malgré qu’elle soit une console forcément  abandonnée, une équipe de fans nommée WaterMelon sortit un tout nouveau jeu en décembre 2010 ! Ce soft, nommé Pier  Solar, était un RPG  avec une cartouche à la capacité accrue par rapport à celles de l’époque. Cette équipe, forte de son succès (Pier Solar a été distribué par Internet uniquement, est devenu assez rare et de fait, assez cher…), a remis le couvert avec un Beat’em-up nommé Paprium. Celui-ci n’est actuellement pas encore sorti.

Niveau fans, le musicien 2080, par exemple, a composé une chanson tout simplement nommée « MyMega Drive » avec un clip qui transpire l’amour pour la machine (il est disponible sur YouTube). Au niveau des  « Demoscene » (performances de programmation sur consoles, avec des graphistes, compositeurs, programmeurs…), l’équipe Titan a réalisé « Overdrive II » qui a remporté la première place du Revision 2017 (un rassemblement dédié à cette pratique), avec une performance incroyable.

Malgré un rival puissant, SEGA a donné un grand coup au marché du jeu vidéo avec leur Mega Drive, à son époque. Bien qu’elle ait toujours été vue comme « moins puissante », elle a au fil du temps démontré qu’elle en « avait sous le capot ». On peut se demander si c’est SEGA ou les joueurs qui ont été le plus marqués par elle lorsque l’on voit le nombre de portages, qui ont continué à faire parler d’elle. Peut-être a-t-elle été trop en avance sur son temps, peut-être que SEGA l’a sortie trop tôt sur le territoire japonais… mais nous n’avons – peut-être – pas encore fini d’en entendre parler !

Captures d’écran prises par JDJ. Crédits des autres visuels : Tous droits réservés ©SEGA

4 réponses

  1. Xxiooup dit :

    Simpa ce mini dossier méga drive, face au mastodonte Super Nintendo, elle n’a pas à rougir, et a ceux qui disent qu’elle a des musiques criardes (ce qui est vrai sur une palanquée de jeux), je les pousse à aller écouter les musique des jeux technosoft ou compile pour comprendre que la console n’est pas en tort mais les compositeurs plutôt…

    • Effectivement, quand on écoute ça ou même les BO des Streets of Rage, Phantasy Star IV aussi, c’est surtout les compositeurs qui ont la faute, et aussi (il faut être honnête) la taille des cartouches et la place allouée aux musiques. Quand on y met le poids, le résultat est juste bluffant pour son époque.

  1. 21 février 2019

    […] à quoi « X68000 » faisait référence… mais nous vous renvoyons à l’article spécial Mega Drive si besoin). En cela, il est assez réussi car non seulement il dispose de bons graphismes, avec des […]

  2. 27 avril 2019

    […] des consoles comme la Mega Drive et autres machines d’arcade (vous êtes invités à retourner sur l’article dédié pour plus de détails). Ici, sur GB, c’est un processeur Sharp LR35902 qui fait office de cœur […]

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