Gaming Memories #09 : Golden Axe
Bienvenue dans ce nouveau numéro de Gaming Memories. Cette fois-ci, nous vous invitons à venir faire un tour dans une salle d’arcade d’époque ! La destination ? Le temps des barbares et des épées made in SEGA… le tout premier jeu Golden Axe, sorti en mai 1989 ! Prêts à aller terrasser un guerrier maléfique ? Alors c’est parti, préparez vos pièces !
Conan le Double Dragon (Quest)
Alors qu’à cette époque, le maître incontesté du beat’em-up est Double Dragon (Technos Japan, 1987), le game designer Makoto UCHIDA (aussi directeur sur Dynamite Deka – Die Hard Arcade chez nous – et designer sur Altered Beast) voulait créer un jeu inspiré par les films qu’il appréciait le plus à ce moment. Sa plus grande source d’inspiration à cette époque était la série des Conan le Barbare, mais tenter de concurrencer directement Double Dragon sur son terrain était beaucoup trop risqué.
La vision d’UCHIDA était que les jeux d’arcade devaient être compétitifs face à de grands titres tels que Dragon Quest (Enix, 1986). L’idée de base de Golden Axe a donc été de « faire un Double Dragon qui n’est pas un Double Dragon ». Le mélange entre l’aspect médiéval de DQ (épées, magie) et le combat dans un scrolling horizontal donnèrent ainsi Golden Axe. Il fallut un an à l’équipe de l’AM1 pour que le jeu voie enfin le jour sur le Sega System 16 (Altered Beast, Shinobi…), l’un des systèmes arcade les plus réputés de la firme.
Pas de rues mal famées et de punks ici
Le royaume de Yuria est en proie à la désolation. Le roi et la princesse ont été enlevés par Death Adder, un guerrier maléfique vêtu d’une armure et d’un casque noirs menaçants. Il est à la recherche de la Golden Axe, l’arme légendaire qui prodigue à son utilisateur une puissance phénoménale. Alors qu’un jeune homme accourt vers son village pour annoncer que le roi a été kidnappé, il se fait tuer devant les yeux du personnage choisi par le joueur. Ce dernier décide donc de partir le venger, et ainsi de secourir ses souverains.
Ce beat’em-up permet d’incarner trois personnages au choix : Ax Battler, le guerrier musculeux qui se sert d’une épée à deux mains ; Tyris Flare, une amazone utilisant une arme plus légère mais capable de mieux maîtriser la magie ; et Gilius Thunderhead, un nain maniant une hache et dont la force est le plus grand atout. Ils devront parcourir le royaume jusqu’à trouver Death Adder.
Un gameplay simple mais fonctionnel
Golden Axe se joue avec trois boutons : attaque, magie et saut. On peut se déplacer dans les huit directions habituelles et courir, chose courante de nos jours mais encore très rare dans le domaine à l’époque (certains beat’em-ups de Capcom comme Captain Commando ou Cadillacs and Dinosaurs, sortis en 1991 et 1993, le permettaient aussi, mais Final Fight, sorti en décembre 1989, non)
Si les attaques sont assez similaires de personnage en personnage et s’effectuent normalement, ceux-ci peuvent également courir vers un ennemi et le charger. Cette attaque, qui fait partie des plus puissantes disponibles, sera d’une grande aide pour faire un peu de place si l’on se retrouve encerclé. Les personnages peuvent également attraper leurs adversaires et les jeter un peu plus loin – voire dans le vide s’il y en a. Bien sûr, puisque les trois héros peuvent sauter, ils pourront aussi faire des attaques en l’air et, en les couplant à une course, ils effectueront un saut en piqué sur un monstre, ce qui lui occasionnera de gros dégâts.
Chacun des trois personnages peut utiliser de la magie : foudre pour Giliuos, feu pour Tyris et terre pour Ax. Entre chaque niveau, le jeu est coupé par une phase de « bivouac » dans laquelle des lutins viennent tourner autour du personnage. Le joueur devra les frapper pour qu’ils laissent s’échapper une fiole. Chaque fiole récupérée augmente le niveau de magie. Forcément, plus le joueur en récupèrera, plus il pourra lancer de sorts, dont le niveau de puissance augmente selon le nombre récupéré. Tyris maitrise plus la magie et son niveau peut aller jusqu’à cinq, par exemple, alors que Gilius restera bloqué à trois. Même si l’on en récupère régulièrement sur le chemin, il faudra veiller à ne pas tout utiliser pour rien tant elles pourront être utiles (elles font également office de « nettoyage d’écran », comme faire intervenir la voiture de police qui vide la zone de tout adversaire dans Bare Knuckle).
Golden Axe dispose également d’une fonctionnalité singulière : les montures. On peut trouver à plusieurs reprises dans les niveaux des créatures sur lesquelles grimper. Souvent déjà utilisées par des ennemis, il faut frapper ces derniers pour les en éjecter et prendre possession de la bestiole (mais ils peuvent également en faire de même). Tous ont une attaque différente : le Chicken Leg (monstre repris d’Altered Beast) se retourne en mettant un coup de queue pour balayer les ennemis, un premier type de dragon crachera du feu devant lui et le second projettera une boule de feu qui traverse l’écran. Garder sa monture le plus longtemps possible est un challenge en soi, car un seul coup reçu éjectera le personnage et la bestiole s’enfuira après plusieurs fois.
Une production honorable, mais sans éclat
Golden Axe dispose de graphismes très corrects pour son époque. Bien qu’il soit sorti sur un hardware vieillissant (la carte System 16 est sortie en 1985), la taille des sprites est correcte et ils sont bien modélisés. Les magies sont impressionnantes pour un tel système et ne font même pas ralentir le jeu. Les décors ne sont pas toujours très fouillés mais offrent une identité propre au jeu – on sent que l’on voyage. Malgré des couleurs peut-être un peu ternes, Golden Axe reste loin d’être déplaisant à regarder. Certes, il fait un peu pâle figure à coté d’un Final Fight, mais le système utilisé n’est pas le même non plus…
Si les personnages réagissent et bougent bien, les hitboxes sont parfois un peu traîtres et on ratera de temps en temps un ennemi alors qu’on pensait le toucher (la consolation est que cela vaut aussi pour eux…). Cela n’arrive heureusement pas à tous les coups, mais rater sa charge en passant à coté sera toujours agaçant… surtout si l’on se trouvait près d’un gouffre ou que cela fait atterrir le personnage au beau milieu d’un groupe d’ennemis. Ces trous, en tous cas, pourront être d’une grande aide, même s’ils sont assez peu nombreux. Les ennemis ne font pas toujours les choix les plus judicieux et disposent d’un path finding assez sommaire. Il suffira parfois uniquement de se placer en contrebas d’un trou pour qu’ils viennent eux-mêmes se jeter dedans, leur ligne de conduite se résumant malheureusement à « prendre le chemin le plus court jusqu’au joueur ».
Le jeu n’est pas excessivement long, ni même difficile et s’il y a un pic de difficulté dans les deux derniers niveaux, le reste est très abordable. Jouer à deux n’est donc pas nécessaire pour en voir le bout, bien que cela augmente son intérêt. Seul, le jeu risquera de finir par être un peu ennuyeux à force, selon le personnage choisi, mais combattre aux cotés de quelqu’un est tout aussi agréable. Le jeu en devient même plus amusant : se battre pour être le possesseur d’une monture (il y a un friendly fire dans le jeu, qui permet de frapper son camarade), ou faire la course à celui qui récupérera le plus de fioles lors des niveaux bonus est bon enfant et renforce le plaisir d’être accompagné (sauf si l’on joue avec quelqu’un de mauvaise foi, mais ceci est une autre histoire).
La bande-son, composée par You TAKADA (Flash Point, Gain Ground), prend un tour heroic fantasy qui colle bien avec le jeu : on sent que la situation est critique dans le royaume de Yuria. Les morceaux ne sont pas nombreux, mais ils ne lassent pas – ils restent même en tête, en particulier celui du premier niveau. Les personnages et gnomes ont une voix, pas particulièrement intéressantes mais qui ont le mérite d’être tout de même présentes.
La légende de la hache d’or ne meurt jamais
Si Golden Axe n’est pas un jeu exempt de défauts, il a aussi ses qualités et reste un précurseur. Tout d’abord, il sort du concept « habituel » des rues mal famées et syndicats du crime si présents dans les beat’em-ups, et Tyris est sans doute la première héroïne dans un jeu du genre (jusqu’à présent, les personnages féminins étaient soit des ennemis, comme dans Nekketsu Kôha Kunio-kun ou Double Dragon, soit le personnage à sauver). Le système de personnages complémentaires à capacités différentes, bien qu’il soit en marge de celui de Final Fight ou Bare Knuckle, était encore très rare, voire inexploité avant Golden Axe.
Golden Axe a eu droit à un nombre impressionnant de portages : si le plus connu – et peut-être le plus réussi aussi – est celui sorti sur Mega Drive, on peut aussi en compter plus d’une dizaine. Master System, MegaCD, PC Engine CD-Rom², WonderSwan, Amiga, Amstrad CPC, Atari ST, Commodore 64, IBM PC ou encore ZX Spectrum, au final seule la Famicom de Nintendo n’y a pas eu le droit, parmi toutes ces ces machines populaires (et encore, qu’un jeu SEGA finisse chez Nintendo, était inimaginable à cette époque). Plus tard, le jeu s’est vu porté dans les diverses compilations Mega Drive (PlayStation 2, 3, Xbox 360, PSP, et il y a fort à parier qu’il sera aussi sur celle prévue pour PS4 et Xbox One) et a fait partie de la série SEGA Ages 2500, qui consistait en un grand nombre de remakes de jeux d’époque. Et encore maintenant, Golden Axe fait parler de lui ! En juin 2017, SEGA a mis en place un service en ligne appelé « Sega Forever » sur lequel sont jouables un certain nombre de jeux de la firme. Golden Axe s’y trouve, lui faisant accéder aux smartphones Android et iOS à leur tour.
Le jeu a eu plusieurs suites et spin-offs : Golden Axe II (en arcade et sur Mega Drive, qui sont d’ailleurs deux jeux totalement différents), Golden Axe III, Gaiden, The Revenge of Death Adder, The Duel, ou encore Beast Rider, pour le plus récent (PS3 et X360, 2008).
Les apparitions de Golden Axe ou de ses personnages ne s’arrêtent pas là. Dans Alien Storm, un autre beat’em-up assez original de SEGA, on peut retrouver un écran d’évaluation de notre performance en fin de jeu : Gilius fait partie des juges. Segagaga, un RPG sorti en 2001 sur Dreamcast, mélangeait plusieurs univers de la firme et on pouvait y retrouver des ennemis de notre titre du mois. Une course lui est dédiée dans la série Sonic & SEGA All-Stars Racing, où Gilius est également jouable. Le nain semble désormais être la mascotte de la série, puisqu’il apparait dans d’autres épisodes où il n’est même pas jouable. Mais plus encore, il fait apparition dans la série animée Hi sCoool ! SeHa Girls qui propose un épisode dédié au jeu. Gilius y reviendra plusieurs fois… dans un rôle assez comique.
Au final, on peut dire sans trop exagérer que Golden Axe est un jeu culte ; joué par beaucoup, il était même vendu directement avec l’une des versions de la Mega Drive à l’époque. Si la série s’est un peu perdue par la suite, elle a quand même offert une excellente suite, aussi réussie sur la 16 bits que dans sa version arcade impressionnante. Notre époque est propice à la « résurrection », avec cette mode des remakes et portages HD… l’illustre Double Dragon a même eu des suites ces dernières années, alors qui sait si la légende de la hache d’or ne reviendra pas l’an prochain, pour ses trente ans ?
Captures d’écran prises par JDJ. Crédits des autres visuels : Tous droits réservés ©SEGA/
Moi j’y jouais sur master system à l’époque, dans une version vraiment pas top en regardant a posteriori, ce qui ne m’empêchait pas de m’éclater (et de me faire éclater). Par contre, il y a bel et bien eu des jeux Sega sur famicom. Pas golden Axe en effet mais After burner ou Fantasy Zone par exemple, portés par sunsoft.
Ah, alors les jeux Sega sur console Nintendo ne sont pas une légende!
Enfin, je le savais déjà du fait que je possède Sakura Wars GB (donc SEGA sur GameBoy Color), mais je ne pensais pas que ça marchait avec des licences plus connues.
La version MS de Golden Axe n’est pas bien géniale, en effet… mais bon, l’intention est louable.
Tout à fait, et à l’époque je n’avais pas de point de comparaison, la Méga Drive n’était pas sortie, ou en tout cas je ne l’avais pas et je ne connaissais pas le jeu en arcade (ni certainement l’arcade en général d’ailleurs), donc sans point de comparaison, il me semblait très bien. Mais clairement les meilleurs jeux master system étaient les jeux développés pour la console et pas les portages. Mais bon, j’ai aimé (et aime toujours!) des jeux inavouables sur cette console… Tu sais, cette époque où tu avais un jeu par trimestre, bah obligatoirement, tu le faisais quand même, et des fois même tu l’aimais 🙂