Momo et le message du Soleil : l’aventure et les rêves de Marie SASANO
Même s’il ne représente qu’une toute petite part du marché de la BD japonaise en France, le manga pour enfant, ou Kodomo manga, recèle de jolies aventures et de belles histoires, et tout autant de mangaka qui ont des rêves plein la tête et l’envie de les partager avec les tous petits.
Journal du Japon a donc enfilé son âme d’enfant à l’occasion du dernier Salon Livre Paris pour rencontrer Marie SASANO, l’adorable auteure de Momo et le messager du Soleil, publié aux éditions Ki-oon. En route pour une aventure faite de déceptions autant que de joies avec un manchot et sa créatrice, sous le signe du courage et des exploits !
« Mangaka, c’est difficile… Mais ça vaut le coup ! »
Biographie officielle : Marie SASANO est fascinée par le manga depuis son enfance. Elle a grandi avec Sailor Moon, Card Captor Sakura, Yu Yu Hakusho… Dès le lycée, elle entre dans un club dédié au manga, avant de se lancer dans une école spécialisée en dessin.
En parallèle de ses études, elle commence à travailler comme assistante pour des auteurs de shôjo. Elle a la chance de passer par les ateliers de grands noms du genre, dont Natsumi AIDA, auteur du best-seller Switch Girl, ou encore Yôko MAKI, son artiste préférée.
Cependant, avec la naissance de son fils en 2013, sa sensibilité évolue. À partir de 2015, en partenariat avec les éditions Ki-oon, elle monte un projet de manga d’aventure, qui peut être lu aussi bien par les parents que par les enfants : c’est la naissance de Momo et le messager du Soleil, une aventure extraordinaire dans un monde de fantasy tout en couleurs, aux héros plus mignons les uns que les autres !
Journal du Japon : Bonjour Marie SASANO, et merci pour votre temps…
Votre histoire avec le manga et l’animation a donc commencé avec Sailor Moon, est-ce que vous pouvez nous en dire plus ?
Marie SASANO : En fait Sailor Moon était l’anime populaire de cette époque donc c’est lui qui a été mon premier choc, ma première rencontre avec cet univers. J’aimais tout particulièrement Sailor V, aka Sailor Venus, car elle avait une longue chevelure et je trouvais ça troooop mignon. (Rires)
Pendant votre enfance vous passez votre temps à dessiner puis vous entrez dans un club de manga au lycée : est-ce que c’est là que vous avez le déclic et l’envie d’en faire votre métier ?
Au lycée je pensais à ce métier de mangaka mais de manière assez vague, je n’envoyais rien aux éditeurs à l’époque. Mais, au moment du choix de l’orientation pour l’après lycée, j’ai pris le parti de m’inscrire dans une école spécialisée et d’y travailler sérieusement. C’est là que je m’y suis mise pour de bon.
Et pour quelles raisons avoir franchi le pas justement ? Vous ne vous voyiez pas faire autre chose à l’époque ?
En fait… (elle réfléchit)
Je crois que je n’ai jamais envisagé une autre carrière. J’ai certes fait des petits boulots, à droite à gauche, mais je n’ai jamais envisagé d’autres projets que celui de devenir mangaka. Une fois je suis même allée à un séminaire d’entreprises, où ces dernières venaient rencontrer et embaucher des étudiants, mais j’ai compris que cet univers n’était vraiment pas fait pour moi.
Donc au final, il n’y a pas vraiment eu déclic, je me suis toujours imaginée en tant que mangaka dans ma vie d’adulte.
Vous avez commencé votre carrière en tant qu’assistante de mangakas spécialisées dans les shôjos. Qu’est-ce que vous ont appris vos sensei pendant cette période ?
Il y a d’abord la technique elle-même, car j’ai pu observer de près des planches finalisées de professionnels pendant toutes ces années. Puis j’ai pu me rendre compte de l’importance des dates butoirs, de s’organiser dans son travail pour le rendre dans les temps et d’optimiser la production d’une planche pour y parvenir.
Puis il y avait tous les échanges avec les assistants qui est une composante importante du quotidien de mangaka, et j’ai gardé quelques astuces de cette époque dans les interactions que j’ai aujourd’hui avec mes propres assistants, pour leur faire plaisir et garder une bonne ambiance de travail.
Vous avez des assistants, donc ?
Oui j’ai une dizaine d’assistants, que je fais tourner régulièrement. Ils ne viennent jamais tous en même temps mais ils peuvent être un, deux ou trois à travailler avec moi, selon les besoins.
Je leur demande surtout de m’aider pour les décors et pour la couleur. L’assistante qui m’a fabriqué la peluche de Momo est très douée pour faire la couleur sur les éléments floutés et gérer les effets de lumière, ce qui me permet d’utiliser moins de trames d’ailleurs, qui n’apportent pas toujours grand chose aux planches et qui sont surtout utiles pour les planches en noir et blanc. Enfin, mon mari aussi m’a parfois aidée, pour tracer les lignes de vitesse.
En parallèle de votre métier d’assistant vous avez envoyé des projets de manga aux éditeurs. Quels genres d’histoires étaient-ce ?
Je n’envoyais que des shôjos de romance à des magazines comme Reboon ou Margaret de chez Shueisha ou Bessatsu Friend chez Kodansha. Je les préparais avec des éditeurs mais malheureusement, et sans que je ne sache vraiment pourquoi, je n’arrivais pas à franchir les étapes de sélection qui m’aurait permis d’avoir une histoire publiée.
Cela dit vos efforts ont finalement payé puisque c’est en étant sélectionnée au World Manga Contest pour un shôjo que vous avez pu croiser le chemin, à la soirée de remise des prix, des éditions Ki-oon. Néanmoins, mangaka reste un métier où il est difficile de percer. Est-ce que vos parents vous ont soutenu dans cette voie dès le départ, ou est-ce qu’il a fallu du temps pour les convaincre ?
Marie SASANO : Je n’ai jamais eu à faire face à une opposition quelconque de leur part, sans doute parce que ma mère, à un moment de sa vie, a voulue être mangaka elle aussi. Je ne peux pas dire qu’ils m’ont pour autant poussée dans cette voie, mais il ne s’y sont jamais opposés.
Ahmed Agne, directeur éditorial des éditions Ki-oon : J’ai posé la question à son père hier pendant qu’elle était en train de faire des dédicaces et il m’a dit que sa première réaction a été de dire : « Daijôbu kana ?« , c’est à dire en substance : « Est-ce que ça va pouvoir le faire ?« . De son point de vue, dans le monde du manga, il n’y a qu’une toute petite poignée d’élus et il est difficile d’en faire partie même si l’on a beaucoup de talent. Mais maintenant il est rassuré et très content qu’elle ait réussi.
Avec des parents mangakas (le mari de madame SASANO est lui aussi un auteur de manga), il est normal que votre fils de 4 ans dessine. Mais s’il vient dans dix ans vous dire qu’il veut en faire son métier, que lui direz-vous ?
Prend une voix sérieuse, avec un air de défi… « Vas-y, essaye pour voir ! » (Rires)
En fait je l’encouragerai car j’ai vraiment à cœur qu’il fasse ce qu’il a envie de faire et qu’il réussisse. Je lui dirais donc de s’accrocher… car c’est vraiment difficile, mais ça vaut le coup !
Momo, le miracle kodomo de Marie SASANO
Résumé officiel : Dans un monde où humains et animaux vivent en harmonie, les enfants naissent sous forme d’œufs tombés du ciel ! Ils peuvent choisir la forme sous laquelle ils souhaitent éclore. Pour Momo, le choix est clair : il prendra la même apparence que le mystérieux manchot volant qui l’a sauvé d’une chute fatale quand il était encore bébé œuf !
Cependant, le jour de son éclosion, catastrophe… Momo découvre que les manchots ne volent pas ! Pour le consoler, l’ancien du village lui révèle un secret : il existerait, très loin de chez eux, un messager du Soleil capable d’exaucer n’importe quel souhait… Momo n’hésite pas une seconde. Accompagné de ses deux amis Noah et Lily, il décide de partir sur les traces de la créature de légende !
Momo est né à partir d’une émission télé pour enfant que vous regardiez avec votre fils. Est-ce que vous pouvez nous expliquer comment vous êtes passée de ces émissions à la création de votre manga ?
L’émission en question se nommait Okaasan to issho (« Avec maman »), un programme pour les tous petits que l’on peut regarder avec ses parents. (NDLR : extrait ci-dessous)
A l’époque il y avait des séquences où les présentateurs étaient déguisés en animaux et jouaient des pièces. L’une d’entre elles avaient trois personnages principaux dont un héros du nom de Muteki, l’invincible (un jeu de mot puisque Muteki veut déjà dire invincible) et il avait pour devise « Jamais je n’abandonnerai !« . On pouvait apprécier cette émission aussi bien en tant qu’enfant que parent et moi je trouvais la devise de Muteki assez classe.
J’ai voulu retranscrire cette atmosphère dans mon manga, pour créer une oeuvre qui peut être appréciée aussi bien par des enfants que par leurs parents mais aussi transmettre des messages comme la devise de Muteki.
Momo est un manchot rouge qui voudrait voler… Comment est-il né graphiquement ce petit personnage ?
Le rouge permet de l’identifier en tant que personnage principal, et lui permet de mieux ressortir dans les planches où il apparaît. Néanmoins, au départ, Momo était rose, de la couleur de la pêche qu’on appelle Momo au Japon. Mais c’est un personnage qui prime surtout par sa volonté et sa force d’âme et la meilleure façon de symboliser ça était de le faire en rouge.
Après pourquoi choisir un manchot… Je pense que tous les enfants sont conscients que les manchots ne volent pas donc cela permettait de le mettre de façon claire et simple face à un problème important, car il rêvait de voler, et a priori insurmontable qui sera justement l’objet de sa quête. En effet, comme le laisse penser sa couleur rouge, il n’est pas du genre à baisser les bras et va tenter de surmonter ce handicap.
Comment se sont déroulés les échanges avec les éditions Ki-oon pour passer de l’univers de shôjo à celui du Kodomo ?
Kim Bedenne, l’une des interprètes, est celle qui a noué le contact avec Marie SASANO au Japon : elle a commencé par me présenter ses œuvres shôjo, en toute logique, mais je lui ai expliqué que le marché du shôjo en France n’était pas très développé et que le shôjo de romance n’était pas la spécialité des éditions Ki-oon. Je lui ai donc proposé de réfléchir à un manga pour enfant.
Marie SASANO : au début je n’étais pas sûre de moi car je n’en avais jamais fait. Mais en regardant l’émission télé évoquée précédemment, j’étais super motivée et je n’ai finalement pas hésité bien longtemps avant de me lancer.
Le moins que l’on puisse dire c’est que l’aventure a pris forme puisque, pour votre premier manga, vous voilà publiée en France et invitée du Salon Livre Paris… Dans quel état d’esprit êtes-vous justement ?
Honnêtement, j’ai du mal à réaliser. Hier c’était ma première séance de dédicace et j’avais du mal à y croire. Je me suis vraiment demandée comment on avait bien pu en arriver là !! (Rires)
C’est une succession de petits hasards qui ont conduit à ce miracle. Mon mari travaille dans une école d’art et c’est uniquement grâce à ça que j’ai eu des informations sur le concours World Manga Contest, qui heureusement n’était pas ouvert qu’aux étudiants, et à la suite duquel il y a eu cette réception à laquelle, heureusement, Ki-oon a pu assister. De même si je n’avais pas eu d’enfants, cette idée de manga Kodomo ne m’aurait jamais paru réalisable… C’est la somme de tout ça qui a permis à Momo de naître pour que je me retrouve là aujourd’hui.
J’ai cru comprendre que vous êtes venue avec toute votre famille en France. Ils en disent quoi, eux, de ce qui vous arrive ?
Mon mari me soutient depuis longtemps et il sait ce que j’ai vécu et les efforts que j’ai du faire. Donc quand il est venu à l’inauguration et qu’il a pu voir le stand des éditions Ki-oon aux couleurs de Momo, il a versé quelques larmes d’émotions lui aussi. Hier, mon fils est venu et a fait la queue pour une dédicace, pour me demander de lui dessiner le héros du film Cars qu’il adore ! (Rires)
Ça m’a aussi beaucoup émue mais le plus touchant est venu après. Mon fils et ma famille sont partis faire un peu de tourisme dans Paris pendant que je continuais mes dédicaces et mon mari m’a envoyé un message, pour me raconter ce que mon fils lui avait dit : « Maman, elle fait plein de dessins pour tout le monde et elle travaille dur, elle est vraiment trop classe !«
Quand j’ai lu ça, quand j’étais dans le taxi pour les rejoindre, j’ai fondu en larmes.
Se souvenant de notre échange en amont de l’interview où elle a appris que notre rédacteur était jeune papa : le jour où votre fils vous dira ça, vous pleurerez vous aussi, c’est impossible de résister ! (Rires)
Ah c’est sûr que j’aurai du mal à ne pas verser une larme !
Et puis, enfin, il y a mon mari, qui m’a organisé une grosse fête surprise avant de partir pour la France. Nous avions déjà décidé, le jour où j’aurais un manga publié, de fêter ça en allant dîner dans un beau restaurant.
Mais, alors que nous étions tous les trois avec mon fils sur le point d’entrer dans le restaurant, je me suis aperçue qu’il y avait cinquante personnes qui m’attendaient pour fêter la sortie de mon manga. Rien qu’en voyant ça j’ai commencé à pleurer comme une madeleine. Mon mari ne m’avait jamais fait autant de cadeaux et de surprises, et je n’ai rien vu venir. Il m’a même offert une bague de fiançailles, car il n’avait pas pu le faire à l’époque où nous nous étions mariés, et à l’intérieur il a fait graver le titre Momo et le messager du Soleil.
Waouh !
Et je n’oublie pas non plus mes assistantes qui m’ont fabriqué plein de peluches de Momo… En fait, depuis la publication je passe mon temps à pleurer je crois ! (Rires)
Pour finir est-ce que vous pouvez nous dire ce qui attend Momo dans la suite de ses aventures ?
Il va continuer son voyage, découvrir d’autres villages et d’autres endroits du monde. Dans le volume 2, pour la première fois il va vraiment être en grand danger.
Je ne me suis pas encore totalement décidée pour la fin, j’en ai encore une idée assez vague et avec le temps elle peut évoluer mais il y a déjà beaucoup de point à explorer : le papa et la maman de Momo, savoir qui est le messager du Soleil et savoir si le rêve de Momo pourra se réaliser !
Toute une aventure qui vous attend alors, pour Momo et pour vous… Bon voyage !
Vous pouvez retrouver toutes les informations sur Momo, le messager du Soleil, sur le site des éditions Ki-oon, qui présente notamment un extrait et un trailer pour vous faire un avis. Rendez-vous le 07 juin en librairie pour le second tome de cette aventure !
Retrouvez également nos photos de l’édition 2018 de Livre Paris et nos autres interviews d’auteurs lors de l’événement !
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[…] et ça a l’air chou. Un manga parfait pour les plus jeunes, comme nous avions pu le constater en interviewant sa charmante auteure, ici ! Beyond the Clouds aussi à l’air aussi mignon que rempli d’aventures (et là encore, […]