[Japanime] Handa Kun : l’anti-Barakamon ?
Vous l’avez sans doute remarqué, chez JDJ on a un petit faible pour les séries de type tranche de vie, qui apportent du réconfort comme Amaama to Inazuma ou une bonne humeur immédiate dans Flying Witch. L’excellent Barakamon, de Satsuki YOSHINO, est une référence du genre. Alors forcément, son spin-off Handa-Kun – disponible chez ADN – était très attendu au sein de la rédaction…
Sauf que ce prequel s’est vite révélé bien différent de Barakamon ! Cette nouvelle série nous raconte les années lycée du jeune Handa, quelques années avant qu’il ne se fasse appeler sensei. Autant vous le dire tout de suite, le changement d’ambiance est radical : l’humour bon enfant a laissé place à un gag manga délirant. De quoi déstabiliser les fans de la première heure. Décryptage !
La jeunesse troublée d’un génie de la calligraphie
Souvenez-vous, dans Barakamon, Seishû Handa est un jeune maître de la calligraphie promis à un brillant avenir. Jusqu’au jour où il frappe le directeur d’une exposition qui qualifie son oeuvre de « formatée et sans saveur »…
Pour lui remettre les idées en place, son père l’envoie se mettre au vert sur une île perdue de l’archipel de Goto, au large du pacifique. Isolé dans cette campagne, il compte bien se consacrer à son art. Mais c’est sans compter sur les habitants du village (et surtout la bande d’enfants très agités qui y vit) qui ne vont pas lui laisser un moment de répit. On découvre alors un héros touchant et maladroit qui essaye de bien faire mais qui a des vrais problèmes de communication. Car derrière son caractère passionné et très direct, il cache un profond manque de confiance en lui.
Imaginez-vous maintenant la jeunesse de ce même Handa, qui dès le plus jeune âge a révélé ses talents de calligraphie. Une passion qui lui a sans doute valu jalousie et moquerie. On l’imagine sans mal être la risée du lycée et avoir des difficultés à se faire des amis… Sauf que la série Handa-Kun nous propose la situation exactement inverse !
Handa est en fait la star de son lycée, un élève admiré de tous, pour son talent de calligraphe justement. Néanmoins, de son côté, Handa se méprend complètement sur la situation, et reste persuadé que toute le monde le déteste. Avec son caractère méfiant et pessimiste, il prend toute l’attention et l’admiration qu’on lui porte pour du harcèlement, s’imaginant sans cesse être la cible des moqueries de ses camarades…
Plus gag manga que tranche de vie
Toute la série est basée sur ce quiproquo absurde.
Persuadé que ses camarades le détestent, il n’adresse la parole à personne et a même développé une technique spéciale, dites du “Handa wall” : une barrière mentale qui le protège des menaces et insultes. Il pousse même le vice jusqu’à éviter de parler en public à son seul ami, pour éviter qu’il ne soit victime des brimades à son tour. Tout ceci a pour effet de renforcer l’image que les élèves ont de lui : ce petit génie de calligraphie est mis sur un piédestal, il devient une figure distante et mystérieuse que l’on n’ose à peine déranger.
Résultat : le moindre contact avec l’un de ses camarades donnent lieu à des malentendus pas possibles. Une simple lettre d’amour est interprétée en invitation à un lynchage public. Lorsque ses camarades décident de le choisir comme délégué de la classe, il le voit comme une sournoise blague. Et à l’inverse, toutes les tentatives maladroites d’Handa de communiquer sont librement interprétées par ses camarades de manière totalement positive. Lorsqu’il repousse les avances d’une fille, celle-ci s’imagine que c’est pour son propre bien. C’est simple, plus il tente de se débarrasser de ses bourreaux, plus il se retrouve avec de nouveaux admirateurs dans les pattes.
Et, pour ne rien simplifier, à ce ressort scénaristique vient s’ajouter une galerie de personnages plus délirants et plus clichés les uns que les autres. Le beau gosse mannequin après les cours, l’ancienne victime devenu un gros caïd, la jeune fille kawai amie avec la moche, le fanboy d’Handa qui se croit plus Handa que le vrai, la stalkeuse qui élimine toutes les rivales amoureuses d’Handa, le club des otaku…
Bref, Handa n’est plus qu’un prétexte propice à une immense parodie loufoque des shônens et shôjos : les amourettes de lycée, les luttes de pouvoir et de popularité, les bagarres entre gangs de lycéen et, bien sûr, les incontournables voyages scolaires et festivals de fin d’année. Tous les sempiternels classiques du genre y passent.
Vous l’aurez compris, on nage donc en plein gag manga. Les personnages attachants de Barakamon, qui petit à petit étaient parvenus à mettre Handa à l’aise dans leur campagne paumée ont été remplacés par des élèves complètement dérangés. Exit l’humour bon enfant ou plein de bons sentiments, place désormais à la parodie et au what the fuck ! Les nouveaux personnages vont même, au nom de l’absurde, jusqu’à voler la vedette à Handa : c’est donc la Handa Force qui entre en scène, composée de quatre camarades de classe que notre héros a transformé sans le savoir en ses loyaux défenseurs, et devient le véritable groupe de personnages principaux de l’histoire. Leur apparition, dès la scène d’ouverture de la série, est déjà culte !
L’art du Spin-off
Comme vous le savez, tout l’art d’un spin-off réussi réside dans l’équilibre délicat entre faire la filiation avec la série d’origine et le fait d’exister en tant qu’entité indépendante. D’un côté, il faut faire plaisir aux fans à grand renfort de clins d’œil, réapparitions de personnages et autres références à la première série. De l’autre, il faut pouvoir capter l’attention d’un nouveau public, en créant une série différente de la première.
Sur ces deux points, Handa-Kun est un succès. La série est d’autant plus amusante lorsqu’on a vu Barakamon : redécouvrir Handa (qui n’a visiblement pas changé de coupe de cheveux) en lycéen torturé est vraiment drôle et on apprécie les apparitions remarquées de sa mère et de son ami Kawafuji (qui a d’ailleurs un rôle essentiel dans la série). Mais surtout, le studio Diomedea est parvenu à créer une oeuvre complètement détachée de Barakamon. Plus coloré, plus dynamique, Handa-Kun impose dès le premier épisode son univers totalement absurde. On est loin du rythme et des décors apaisants de la série initiale, et l’on finit par tout simplement oublier qu’il s’agit d’un prequel.
Côté réalisation, si la série ne se démarque pas par la qualité de son animation et de ses graphismes – qui restent néanmoins agréables à regarder – l’ambiance sonore, les doublages et les génériques sont vraiment réussis. L’équipe de production s’est vraiment lâchée sur le générique d’ouverture qui, sur fond de j-rock énervé, part dans un délire parodique des séries d’actions. Le générique de fin, plus sur la retenue, parvient lui à renforcer l’identité graphique colorée sur une chanson pop très prenante. Il s’offre même le luxe d’évoluer au fil des épisodes, intégrant la galerie complète des personnages.
Au final, certes, Handa kun n’est peut-être pas la série tranche de vie qu’on attendait mais ne boudons pas notre plaisir. L’équipe Diomedera a réussi à créer une série à l’univers qui lui est propre et d’éviter de tomber dans un Barakamon-like de second choix. Et si le scénario peut paraître un peu répétitif, il a le mérite de maintenir l’équilibre parfait entre le fou rire et la frustration d’une situation incroyable qui perdure, et qui tient en haleine un spectateur qui ne cessera de se demander : “Mais pourquoi, oui, pourquoi Handa ne voit-il pas qu’on l’aime ? Quand finira-t-il par ouvrir les yeux ? Et ses camarades comprendront-ils un jour les véritables sentiments du pauvre petit Handa ?”
Réponse dans 12 épisodes !