Uzumasa Limelight : combat de sabres et voie du chanbara
Lors de Japan Expo, en juillet dernier, nous avons eu la chance d’assister à l’un des nombreux spectacles d’une troupe d’acteurs spécialisés en chanbara, la Toei Tsurugikai, et de rencontrer en tête-à-tête leur président pour une entrevue aussi instructive que passionnante !
Point d’orgue du festival : l’avant-première du film Uzumasa Limelight, qui mettait en avant ces acteurs spécialisés dans les combats au sabre, au travers d’une histoire pleine d’émotion. Retour sur tous ces évènements !
Vous ne connaissez peut-être pas encore le terme chanbara, pourtant si vous aimez les films d’action asiatiques, vous avez forcément sans le savoir eu l’occasion d’admirer cette discipline ! En effet, le mot, qui vient d’une contraction des onomatopées chan-chan bara-bara rappelant le bruit de la lame tranchant la chair, désigne tout simplement les films japonais avec des combats au sabre. On retrouve fréquemment ce genre cinématographique dans les jidai-geki, les films historiques.
Venus présenter leur travail pendant les quatre jours du festival, la troupe Toei Tsurugikai s’est ainsi illustrée durant plusieurs représentations libres sur la scène de la ville de Kyôto.
Extrait du spectacle de la troupe sur la scène de la ville de Kyôto, capté par l’équipe des Editions Kana
L’art du chanbara et des samouraïs
Pour notre part, c’est sur la scène Sakura le samedi en fin d’après-midi, que nous avons pu les découvrir, avec une présentation sur l’art du chanbara et des samouraïs. Pour débuter, le producteur et scénariste Hiroyuki ONO nous a parlé en quelques mots de la genèse du film Uzumasa Limelight.
Il s’agit d’un film de chanbara, qui donc désigne les films de cape et d’épée, tourné à Kyôto, surnommé le Hollywood du Japon. Il met sur le devant de la scène les kirareyakus, ces figurants qui se font sabrer (tuer à coup de sabre) et ne connaissent pas la gloire des feux de la rampe. Uzumasa Limelight est en effet un hommage au célèbre film de Charlie CHAPLIN, Limelight.
« L’éclat des feux de la rampe, que doit quitter la vieillesse quand la jeunesse entre en scène.» (Charlie CHAPLIN)
Le genre était autrefois populaire, mais M. ONO regrette qu’il y ait de moins en moins de films comme ça aujourd’hui. Son objectif était donc d’établir en quelque sorte une synthèse entre l’Orient et l’Occident au travers de cette performance, et de remettre en lumière le genre avec des acteurs de l’ancienne comme de la nouvelle génération, l’occasion justement d’introduire les artistes de la Toei Tsurugikai.
En effet, après ces quelques mots sur le film, les acteurs se sont lancés dans une démonstration de combat au sabre. Pendant ce premier « tableau », nous avions affaire à un samouraï, protégeant une princesse et sa servante, tandis que deux rônins les attaquent. Un moment dépassé par les assauts simultanés des deux vilains, le samouraï put heureusement compter sur une jeune ninja venue à sa rescousse…
Dans une seconde partie avec d’autres acteurs, nous découvrions un samouraï attaqué par plusieurs hommes armés. Malgré sa position délicate, ce héros sortait toujours vainqueur de ses combats malgré ses blessures, car il avait quelque chose à protéger ! L’occasion d’admirer encore une fois, au-delà de la prouesse technique des cascades, un jeu d’acteur très convaincant, jusque dans les regards des personnages.
Par la suite, l’acteur qui jouait le rôle du samouraï nous a montré comment porter le sabre, en avant, puis en garde droite, gauche, haute et basse. Ensuite, avec ses collègues, il nous a expliqué comment sabrer et se faire sabrer, d’abord au ralenti, puis en vitesse réelle, en nous présentant quatre techniques différentes : une démonstration impressionnante de précision et de synchronisation !
Enfin, pour terminer le show, les acteurs nous ont joué une scène mêlant ces quatre techniques à vitesse réelle, avec un enchaînement digne des interprétations que l’on peut voir dans les meilleurs films de chanbara. De quoi bluffer les spectateurs présents !
Hiroshi TAKAHASHI : une vie en chanbara…
Journal du Japon a pu rencontrer le président de la Toei Tsurugikai, Hiroshi TAKAHASHI, l’occasion de découvrir plus avant les secrets des acteurs spécialisés dans le chanbara, ces combats au sabre si spectaculaires dans les films d’action japonais : rendez-vous pour une entrevue aussi intéressante qu’enrichissante !
Journal du Japon: Bonjour monsieur TAKAHASHI… Pour commencer, est-ce que vous pourriez nous présenter votre troupe ?
Hiroshi TAKAHASHI : La Toei Tsurugikai existe depuis à peu près soixante ans maintenant. Quant au premier film de chanbara, il a été tourné dans la ville de Kyôto, il y a peut-être une centaine d’années. A ce moment-là, il s’agissait encore de films muets, et qui marchaient vraiment bien ! Par conséquent, il y avait beaucoup d’acteurs qui connaissaient les techniques du chanbara, que l’on appelle tate en japonais. On comptait peut-être entre 600 et 800 acteurs spécialisés dans cette discipline, ils étaient très nombreux à l’époque. Puis malheureusement, au fur et à mesure du temps, on trouvait de moins en moins de successeurs pour préserver ce genre de techniques. C’est à cette époque que l’on a rassemblé des experts dans ce domaine, il s’agissait à peu près d’une centaine de personnes, destinées à être les gardiens de ces techniques spécifiques, afin de protéger notre culture du tate : c’est comme cela que la Tsurugikai a été lancée.
Est-ce qu’il faut s’entraîner tous les jours pour pratiquer le chanbara ? Comment font les acteurs pour garder la forme ?
Honnêtement, on ne peut pas dire que ce ce soit une question d’années d’entraînement, que plus on travaille et mieux on jouera. C’est vraiment difficile parce que tout dépend du talent. Il doit y avoir une vraie sensibilité chez quelqu’un qui, juste en écoutant quelques conseils, comprend tout de suite ce que l’on attend de lui et parvient à réaliser le bon mouvement, là où peut-être une autre personne s’entraînerait tous les jours pendant des années, mais n’y arriverait pas. Par conséquent, on ne peut pas dire que s’entraîner pendant des années suffira – même si, quand même, je peux dire que pour atteindre un certain niveau il faut au moins dix ans d’entraînement.
Par contre, au sein du studio, en temps qu’acteur on commence toujours par jouer le rôle des cadavres. Donc pendant des années et des années, on se contente de s’allonger par terre et de jouer le rôle de cadavres, et là, évidemment, ça ne nous plaît pas beaucoup ! Alors forcément on s’entraîne à fond pour pouvoir obtenir un rôle, c’est pour cela que l’on pratique tant !
Et comme on passe beaucoup d’années à faire le cadavre, qu’est-ce qui fait un bon cadavre ? (Rires)
Ah, c’est une expérience que je connais bien… Un jour, alors que je jouais ce genre de rôle, après m’être fait sabrer je me suis allongé par terre. C’est alors que l’acteur qui faisait le samouraï, mais qui n’était pas forcément bon, a reculé tout en jouant, et soudainement, m’a écrasé la tête ! A ce moment-là, je me suis dit : « ah, peut-être que ma vie en tant qu’acteur est finie et que je ne pourrai jamais gravir les échelons de ce métier… »
Ça vous a motivé à sortir de ces rôles de cadavre ?
Oui tout à fait ! […] Mais en ce temps-là, nous n’étions pas salariés, donc s’il n’y avait pas de rôles, on gagnait vraiment très peu d’argent. Donc c’était difficile à vivre, surtout de faire toujours des cadavres dans les films de samouraïs. Et malheureusement, aujourd’hui il y a de moins en moins de films de ce genre, si bien que les jeunes générations laissent tomber, en se disant : « si on ne peut pas gagner sa vie avec, j’arrête », ou bien ils ne se montrent plus. Mais personnellement, je pense que c’est très important d’essayer de garder notre culture du tate, même si malgré tout, il est difficile d’en vivre. C’est vraiment un comportement très important en tant qu’acteur de jidaigeki.
Est-ce que ça vous arrive souvent de vous blesser sur les répétitions ou sur les tournages ? Parce que ça a l’air assez dangereux comme métier !
En fait, il y a deux types de personnages, et la plupart du temps, le rôle principal est bien entendu tenu par une star. Mais malheureusement ils sont souvent plutôt mauvais acteurs, bien sûr je veux dire mauvais dans le sens d’acteurs de tate. De ce fait, nous on doit anticiper et calculer deux fois plus que le héros, c’est-à-dire que lorsqu’il est en position d’attente, et que le méchant doit commencer à l’attaquer, à ce moment-là on doit faire très attention à cette personne qui est en face, en se disant « peut-être que si j’attaque comme ceci, il peut recevoir mon sabre plus facilement, que si je sabre ainsi, il pourra plus facilement bouger, etc ». Dans ces scènes-là, on grimace et on fait des têtes de super-méchant, mais en fait, c’est fait derrière avec une telle gentillesse, une telle prévenance, vraiment c’en est presque de l’amour… mais ça ne se voit pas à notre tête ! (rires) Mais en fin de compte on calcule vraiment beaucoup.
Justement, nous avons vu hier votre démonstration et c’était impressionnant parce qu’il y a un vrai jeu d’acteur dans votre regard quand vous combattez, c’est assez saisissant quand on est dans le public de voir ça. Suivez-vous une formation spécifique en ce qui concerne le jeu d’acteur, au-delà des cascades et des combats ?
En fin de compte, c’est vrai que cette partie-là est très difficile à maîtriser parce que nous sommes tous acteurs bien sûr, mais que chacun a un passé, un vécu différent; ainsi, certains ont pu étudier dans telle école, d’aucuns dans telle autre agence… Si bien que chaque situation est différente. Au final, notre manière de penser et de raisonner par rapport au jeu d’acteur peut beaucoup varier. Ce genre de choses est difficile à gérer. Par exemple, cette fois-ci, comme on fait des spectacles sur une scène devant du public, c’est à moi en tant que leader de concentrer une espèce de tension électrique pour imprimer une intention dans la scène. Je dois avoir ça en moi, sinon chez les autres, la tension retomberait à plat. L’état d’esprit est primordial pour jouer ce genre de rôle, et c’est d’autant plus important quand on travaille en équipe.
Comment décririez-vous l’esthétique du kirareyaku ? Est-ce que le réalisateur vous guide ou y-a-t-il une part d’improvisation quand vous jouez ? Tout est-il chorégraphié à l’avance, ou bien certaines choses sont-elles rajoutées en cours de tournage ?
Pour les films d’action tournés à Kyôto c’est un peu particulier en fait, parce qu’en plus du director (réalisateur), il y a aussi un action director qui dirige tout ce qui concerne les scènes d’action. Donc c’est plutôt lui qui gère les combats, et non le réalisateur du film.
Quand on travaille avec les équipes de Toei, on ne fait pas de répétitions ou de chorégraphies avant le tournage, on n’en a pas besoin, parce qu’on sent tout de suite, sur place, comment jouer : si quelqu’un bouge comme cela, moi je comprends tout de suite que je dois aller à tel endroit ou réaliser tel mouvement. On communique tout de suite entre nous – c’est presque de la télépathie.
Mais parfois, dans un même casting, il peut y avoir un acteur de la Toei et une personne d’ailleurs, et là ça change tout, on doit alors bien calculer, bien discuter avant le tournage, sinon ce sera très très difficile.
C’est assez incroyable, ce travail si instinctif… Vous avez l’habitude de travailler toujours ensemble depuis plusieurs années en fait ?
Oui, pour comprendre le timing lorsque telle personne va bouger, et savoir ce que moi je devrai faire ensuite. Si on ne comprenait pas ce genre de choses, on ne pourrait pas avoir de rôles, que ce soit en tant que kirareyaku ou en tant que rôle principal. En tout cas pour rentrer à la Tsurugikai n’est pas possible si on ne comprend pas ce genre de choses tout de suite. C’est pourquoi on s’entraîne beaucoup, on doit bien regarder, savoir observer, afin d’entrer dans la Tsurugikai pour s’entraîner à la technique spécifique du tate.
Si l’on prend un senpai qui a environ 70 ans par exemple, ce senpai là, il ne pense pas au futur de Tsurugikai, il se dit que lui a bien joué, a fini sa carrière, et est prêt à s’en aller. Mais moi, je dois vraiment penser à l’avenir de Tsurugikai pour justement garder cette culture. C’est ainsi que cette année, pour la première fois, nous avons accepté une fille. Il s’agit de Chihiro YAMAMOTO qui joue le premier rôle féminin dans Uzumasa Limelight, celui de cette jeune fille qui veut apprendre le chanbara.
En fait, Chihiro YAMAMOTO a gagné un championnat d’arts martiaux en bujutsu taikyokuken. Elle avait l’habitude de travailler seule cet art, en exécutant différentes positions. Parce qu’elle pratiquait beaucoup seule, et qu’elle était parvenue au sommet de sa discipline en remportant ce championnat, elle ne savait plus quoi faire ensuite, et s’est donc intéressée au techniques du tate. Et alors qu’elle venait de Kobe, et jonglait avec son université à Tôkyô, elle a commencé à venir jusqu’à Kyôto, pour apprendre et suivre les cours dans notre dôjô. Là, lors des entraînements avec les membres de la troupe, pour la première fois elle s’est faite sabrer par quelqu’un d’autre, et à ce moment-là elle a été choquée, en se demandant ce qu’elle pourrait bien faire face à ce genre de mouvement. C’est alors qu’elle s’est intéressée passionnément au tate. Sa passion m’a vraiment touché, et on a décidé de la prendre – et c’est très important de continuer ce genre de choses à l’avenir.
Performance de Chihiro YAMAMOTO en 2013
L’avant-première du film Uzumasa Limelight vient juste de se terminer et on en sort très ému parce que, quelque part, il donne un autre regard sur les kirareyaku. Comme le film a été acclamé par la critique et que Seizo FUKUMOTO a reçu un prix pour son rôle, est-ce que cela peut permettre de remettre en lumière le chanbara et le kirareyaku dans le cinéma nippon ?
Avec ce film, on parle beaucoup de kirareyaku, mais en tant qu’acteur, j’avoue que je n’aime pas trop que les kirareyakus attirent plus l’attention qu’ils ne le devraient, parce que c’est juste un des aspects du métier d’acteur finalement. Par exemple, vous parlez de M. FUKUMOTO, c’est vrai qu’il joue les kirareyakus mais il peut aussi aussi juste faire un extra, un figurant qui passe devant la caméra, ou encore jouer bien d’autres rôles. C’est juste que cette fois-ci, dans ce film-là, il est kirareyaku, mais c’est avant tout un acteur, tout comme moi. Et je suis fier d’être un acteur avant tout.
Pour que nos lecteurs se fassent une petite idée, comme le chanbara est moins populaire maintenant qu’à une époque, est-ce qu’il y a encore beaucoup de troupes spécialisées au Japon ? Et toutes ces troupes-là sont en concurrence pour environ combien de films de chanbara par an ?
A vrai dire il n’y a pas de conflits entre les troupes, parce que leurs niveaux sont complètement différents. Par exemple Toei Tsurugikai figure parmi les plus chevronnées, ensuite viennent des troupes qui pratiquent plus du théâtre populaire en quelque sorte, c’est un peu différent. En plus, pour réaliser les films de chanbara comme je vous le disais tout à l’heure, c’est le director action qui choisit quels acteurs jouent dans le film, donc la plupart du temps il n’y a pas de problème. Et d’ailleurs, le tate, la base, c’est pour tout le monde pareil. Si l’on parle d’arts martiaux chinois, là oui, ce serait complètement différent, mais si on parle de tate, c’est une technique de base que tout le monde connaît. Donc il n’y a pas beaucoup de soucis finalement.
(NDLR: Concernant le nombre de films de ce genre, pour avoir un ordre d’idée, le réalisateur Ken OCHIAI nous apprend qu’à l’époque où le jidaigeki était populaire, on comptait 400 films par an contre seulement 4 ou 5 de nos jours.)
Une dernière question, pour quelle raison êtes-vous venus à Japan Expo, quel message avez-vous envie de faire passer au public français ?
D’abord, pour expliquer le spectacle que nous avons préparé : il y a trois parties différentes. La première s’appelle tamura, la seconde iaï, et la troisième nous présente le chanbara à vitesse réelle, donc plus rapide. En ce qui concerne le tamura, c’est une référence au premier shôgun, Sakanoue no Tamuramaro, de l’époque Heian. On dit qu’avant de partir à la guerre, il a dansé sur une musique très douce en avançant très lentement, sur le plateau du temple Kiyomizudera, pour se concentrer et préparer son esprit. On utilise ce mot là, tamura, pour désigner une partie un peu plus lente, une espèce de danse. La deuxième partie, iaï, est ensuite plus rapide, jusqu’à la troisième partie, jouée à vitesse réelle.
Et en fait, ce que je voulais montrer à Japan Expo auprès des français, c’est l’esprit du bushido. Ainsi, le samouraï ne se bat pas pour lui-même, mais toujours parce qu’il a quelque chose à protéger. C’est à cela qu’il consacre et sacrifie sa vie, donc même s’il a été sabré une fois, deux fois, trois fois; il continue d’avancer et ne renonce jamais, parce qu’il se bat pour protéger sa famille peut-être, ou son amour, etc. C’est ce genre d’esprit.
J’ai l’impression personnellement que les jeunes générations vivent dans l’individualisme finalement, en se disant que ce sont eux les plus importants et qu’on se moque des autres, mais moi je n’aime pas vraiment ce genre de choses et je trouve dommage de laisser tomber l’esprit du samouraï et du bushido.
Au début il y en a beaucoup qui craquent et qui abandonnent dans ceux qui essaient ?
Exactement. Donc en tant que Tsurugikai, moi je voulais présenter ce genre d’esprit du bushido, qu’il s’agit vraiment de travailler pour les autres, en pensant aux autres, ce genre d’esprit. Voilà ce que j’aimerais présenter auprès des français cette fois-ci.
On l’a ressenti ! Tout comme la complicité aussi entre les acteurs, et le sens derrière votre démonstration…
Pour terminer, je voulais vous expliquer pourquoi nous sommes venus en France plutôt que dans une autre pays. Nous l’avons choisi parce que, depuis des siècles, vous essayez de bien connaître le Japon, notre culture traditionnelle, l’histoire des samouraïs, etc. C’est pour cela que l’on espérait que, peut-être, on puisse transmettre notre message auprès des Français. J’espérais que cela marcherait mais je n’en étais pas sûr non plus !
Mais en arrivant à l’aéroport, alors que l’on passait les contrôles, à ce moment-là le monsieur qui était à la douane a trouvé nos sabres. Et il s’est écrié qu’il voulait les regarder, en nous demandant si on pouvait ouvrir les boîtes. Il nous a alors dit que lui aussi était un « samouraï », qu’il apprenait le karaté et les arts martiaux, et que ça l’intéressait ! A ce moment-là, cela s’est confirmé que nous étions bien accueillis par la France, aussi nous sommes vraiment très heureux d’être venus ici !
Uzumasa Limelight : retour sur l’avant première
Uzumasa (Kyôto) est un peu la Hollywood du Japon et a produit beaucoup de films de jidaigeki, des drames d’époque avec des combats au sabre, un genre particulièrement aimé des Japonais et acclamé partout dans le monde. Ces films ne seraient pas ce qu’ils sont sans les kirareyakus, des acteurs destinés à se faire tuer par le premier rôle. Des hommes se faisant tuer sans jamais voir la lumières des projecteurs (limelight en anglais)…
L’histoire d’Uzumasa Limelight est celle de ces hommes, les héros oubliés des grands classiques du genre jidaigeki. Ils aimaient et respectaient leur art, même quand la production des films de jidaigeki a commencé à décliner. Utilisant le film de Charlie CHAPLIN, Limelight, en filigrane, l’histoire extraordinaire de ces hommes devant faire face à une nouvelle génération et au déclin de leur art se révèle avec mélancolie et passion.
« Si tu fais de ton mieux, quelqu’un, quelque part, le remarquera. » (Seizo FUKUMOTO)
Il fallait bien explorer le programme de Japan Expo pour ne pas manquer cet évènement, avec la diffusion en avant-première d’Uzumasa Limelight le dimanche matin sur la scène Yuzu, avec un sous-titrage en français pour l’occasion.
Quoi qu’il en soit, difficile de ne pas sortir ému à la fin de cette projection !
L’histoire, magistralement écrite, nous dépeint le quotidien solitaire, paisible et studieux d’un acteur de chanbara en fin de carrière, qui passe ses journées à répéter inlassablement les bases de son art, tout en guettant les petits rôles qu’on veut bien encore lui attribuer. Alors que la production de films jidaigeki décline, que ses collègues partent à la retraite, et que le poids des années commence à jouer des tours à Kamiyama, il va être bousculé dans ses habitudes par sa rencontre avec la jeune et jolie Satsuki, désireuse de découvrir ce « métier d’hommes », et les secrets de cet art aujourd’hui si facilement remplacé par les effets spéciaux…
Sous la houlette de Ken OCHIAI, le jeu des acteurs est éblouissant, et on est vite touché par la fraîcheur et la grâce de Chihiro YAMAMOTO, tout en se perdant dans les mille émotions reflétées sur le visage parcheminé de Seizo FUKUMOTO. Avec force violons et percussions, la musique de Nobuko TODA souligne discrètement mais efficacement la force d’une intrigue qui reprend des thèmes finalement universels, de la modernité qui chasse les traditions aux jeunes qui prennent la place de leurs aînés, de la solitude qui s’installe quand chacun continue son chemin de son côté à l’amitié pleine de respect qui peut se nouer à travers un enseignement partagé…
Aussi charismatique que le personnage qu’il interprète, comme on peut le remarquer après une rapide revue de presse de ses multiples interviews, Seizo FUKUMOTO aura, au final, eu une carrière peu banale. Connu (sans être reconnu) pour les 50.000 morts (ou presque) qu’il aurait interprété à l’écran, ce monsieur septuagénaire a pour la première fois interpellé le public via son rôle dans Le Dernier Samouraï aux côtés de Tom CRUISE. Fervent admirateur de Charlie CHAPLIN, qui lui a inspiré sa fameuse manière de chuter (tombant en arrière, le dos tendu comme un arc, avant de s’effondrer), le voilà à son tour sous les feux des projecteurs, puisque c’est bel et bien sa propre histoire qui a inspiré le film (même s’il n’est pas aussi taciturne et solitaire que son personnage).
Uzumasa Limelight nous touche très sincèrement par la simplicité et la beauté de ses images, et des messages qu’il parvient à faire passer en se passant pourtant parfois de mots, une manière de se trouver une identité propre tout en restant un bel hommage aux Feux de la rampe.
Et d’ailleurs, quand on sait que Hiroyuki ONO est le président de la Chaplin Society of Japan, on ne s’étonne pas d’apercevoir un guest de marque à la fin de la projection du film, puisque le petit-fils de l’artiste avait fait le déplacement à Japan Expo !
Il ne nous reste plus qu’à guetter une éventuelle sortie physique ou en salles de ce film dans nos contrées, pour pouvoir le découvrir ou le revoir ! En attendant vous pourrez que vous rabattre sur le DVD sorti au Japon ou le télécharger légalement ici, à moins que vous n’ayez eu la chance d’assister à cette avant-première.
Site officiel : http://www.uzumasalimelight.com/
Page Facebook : https://www.facebook.com/uzumasalimelightthemovie
Remerciements à M. Hiroshi TAKAHASHI pour sa gentillesse et sa disponibilité et à notre interprète, Keiko MIYAUCHI. Merci aussi à Sarah Marcade et Japan Expo pour la mise en place de cette interview.
Photos Sarah MALIS et D. Gueugnot pour ©journaldujapon.com – Tous droits réservés
Belles mise en scène. Dommage que pour un pratiquant de Kendo, kenjutsu, naginata et chambara il y ai autant d’erreurs techniques dans les positions (attaques-défenses) lors des combats. Surtout en position Jodan no kamae et qu’il n’y ai pas de version française. Si non, félicitations. On s’y croirait.