Pèlerinage des 88 temples de Shikoku : deux témoignages qui donnent envie de partir !
Journal du Japon vous emmène sur l’île de Shikoku. Avec ses 88 temples, c’est un circuit de pèlerinage très prisé par les japonais. Deux français ont vécu cette expérience, qu’ils livrent dans deux récits stimulants. Mettez vos chaussures de rando, c’est parti !
Le pèlerinage de Shikoku est un long chemin de 1200 kilomètres qui comprend 88 temples. La figure centrale de ce pèlerinage est Kûkai, moine fondateur du bouddhisme Shingon (que certains connaissent peut-être sous le nom de Kôbô-Daishi porté après sa mort). Très connu des japonais, il est encore peu connu en occident. Et si les Japonais font souvent ce pèlerinage en version « raccourcie » (les temples principaux) et en voiture ou en bus de tourisme, les deux français dont il est question ici ont fait ce pèlerinage à pied, à l’automne 2006 pour Léo Gantelet, et à l’été 2013 pour Marie-Edith Laval : une prouesse qui a fortement impressionné les habitants !
Les deux livres sont deux tranches de vie, deux récits personnels d’un même circuit (la même structure chronologique et circulaire). Chacun avec sa sensibilité, son vécu, livre au lecteur son quotidien, son bonheur, sa douleur, ses sensations, ses petits et grands plaisirs, petits et grands tracas. Deux visions différentes mais au final un même bonheur d’avoir vécu une expérience qui les a durablement marqués et profondément changés.
Les deux pèlerins ont un point commun : avoir fait le pèlerinage de Compostelle avant de se lancer dans celui de Shikoku. Léo Gantelet a d’ailleurs fait un livre de son expérience de Compostelle (En si bon chemin … vers Compostelle). Dans Shikoku les 88 temples de la Sagesse, il raconte son idée un peu folle de partir pour Shikoku, ne connaissant ni le pays, ni la langue japonaise. Sa motivation lui est venue en lisant l’article d’un médecin ayant fait ce pèlerinage : il a été immédiatement captivé. Cet ancien homme d’affaires est atypique : en 1984, à l’âge de 44 ans, il change de vie, ouvre une galerie d’art et commence à écrire. C’est donc à plus de soixante ans qu’il se lance donc dans ce pèlerinage de Shikoku, et le lecteur ne peut qu’être impressionné par sa prouesse physique et sa ténacité.
Le livre démarre sur l’explication du pourquoi, mais aussi sur les préparatifs (tenter d’apprendre le japonais avec une méthode, et avec une amie), préparer le nécessaire (bonnes chaussures, dictaphone, téléphone). Il se poursuit sur la découverte de l’univers du pèlerin, de ses rituels (encens, calligraphie, obole), des auberges souvent tenues par des femmes seules et où il se délecte de succulents repas le soir après une longue journée de marche. Le pèlerinage se « découpe » en quatre paries : l’Eveil avec les 23 premiers temples (il livre ses rencontres, la bienveillance des personnes croisées, la fatigue, les paysages variés qui se succèdent entre zones agricoles et forêts séculaires, les montées et les descentes qui sollicitent tout le corps) ; l’Ascèse des temples 24 à 39 est marquée par la pluie, la route nationale pas du tout poétique et l’océan magique ; avec l’Illumination des temples 40 à 65, c’est la succession montagnes/rivières/routes qui semble parfois interminable ; arrive enfin le Nirvana avec les temples 66 à 88. La boucle est bouclée, le voyage s’achevant ensuite par une visite au mausolée de Kôbô Daishi.
Dans cet ouvrage, Léo Gantelet livre ses impressions au jour le jour, ses coups de cœur, ses petits et gros coups de gueule, ses agacements face à ce qui le déroute (barrière de la langue, changer tout le temps de chaussons dans les auberges et autres petites choses japonaises qu’il a du mal à comprendre). C’est direct, franc, sans langue de bois. Le lecteur est dans sa tête, dans son corps. Et Léo livre chaque jour sa « pensée du moment ». Des pensées qui, mises bout à bout, donnent une philosophie, une vision de la vie. Entre autres : « Tout écouter et n’en faire qu’à sa tête … », « Si on progresse, on ne regrette pas le passé, car la dégénérescence du corps est plus que compensée par le progrès de l’esprit ».
Le livre de Marie-Edith Laval suit la même construction : préparation, arrivée et découverte des rituels, succession de temples. Cette jeune femme est orthophoniste et enseigne la méditation de pleine conscience aux enfants et aux adolescents, sa perception de ce pèlerinage est donc différente mais tout aussi passionnante. Au départ, le lecteur découvre une femme à l’étroit dans son quotidien parisien, lassée, presque agacée, qui a envie de redonner du souffle à sa vie. C’est aussi une femme très lettrée, qui accompagne son récit de citations d’écrivains voyageurs, de philosophes. Son envie de partir prend un ton lyrique. Puis les pas se succèdent, l’esprit et le cœur se libèrent, se donnent totalement aux autres, à la nouveauté, à la gentillesse, au partage. Son mantra qui ponctue le livre est : « Toi et moi, nous ne sommes qu’un ». Et c’est ce partage qui est flagrant tout au long de la lecture : malgré la barrière de la langue, qui pour elle tombe, elle rencontre des personnes magnifiques, elle partage des moments hors du temps, des sourires, des silences. Le tout est ponctué des bruits de la marche : « Pied droit, pied gauche, tchac, gling » (elle a revêtu la tenue traditionnelle du pèlerin et est accompagné de son bâton à clochette).
Malgré quelques difficultés (chemins glissants, montagnes à grimper), l’émerveillement est partout, le lecteur sent un véritable éblouissement. La lecture est vivifiante, cette béatitude devient contagieuse et une furieuse envie de partir risque d’envahir chaque lecteur. Ce livre est un livre sur la rencontre (le proverbe japonais « Ichigo ichie » : une chance, une rencontre, est particulièrement parlant), sur le partage, sur le moment présent dont il faut profiter pleinement (le « arigato time » lors duquel la narratrice remercie le monde de lui offrir la poésie du quotidien).
Ce pèlerinage sera pour Marie-Edith Laval une véritable lame de fond qui fera d’elle un être neuf, changé.
A noter que la fin du livre donne de précieux renseignements pour ceux qui voudraient se lancer dans l’aventure : Shikoku pratique, les rituels à faire à chaque temple, le sutra du cœur, l’équipement du pèlerin, l’hébergement, l’alimentation, le tout accompagné de contacts utiles et de sites à consulter.
Gageons que vous ne resterez pas indifférents à ces deux récits et que cette petite île deviendra peut-être votre prochaine destination de voyage !
Compléments d’information :
Le site de l’éditeur de Marie-Edith Laval
Premières impressions sur le « CHEMIN DES 88 TEMPLES DE SHIKOKU »
Le compostelle Japonais
Konnichiwa Bonjour à tous.
Le 3 novembre 2015 , après 54 jours sur l’île de Shikoku au japon , je suis de retour de ce périple des 88 temples .Le décalage horaire a été laborieux dans sa phase de récupération (je pense que l’age y est pour quelque chose!).
Globalement, tout s’est bien passé.
Sur cette île de Shikoku le dépaysement fut total .La langue et l’écriture, le comportement,la culture,les traditions de ce pays nous plongent dans un univers des plus surprenant.
Le Japonais vit « dans et avec » la religion bouddhiste de Kūkai, plus connu sous le nom de Kōbō-Daishi qui est le saint fondateur de l’école bouddhiste Shingon.
Ceci a fait émerger un raisonnement que je n’avais pas perçu lors de mes précédents voyages « exotiques » – En temps qu’individu on a des racines enfouies au fond de nous qui nous classent dans un type de société .Dans nos contrées , que nous soyons croyant fervent, athée ou simple citoyen … nous sommes des judéo-chrétiens ! C’est quelque chose d’enfoui dans nos gênes.
Je ne parle toujours pas japonais , ce qui ne m’a pas empêché d’avoir des contacts superbes avec la population qui est toujours dans le sourire,l’amabilité,le respect des autres et de leurs traditions .
Ces comportements m’ont enchanté.
J’ai d’ailleurs marché pendant un mois avec un Henro (nom du pèlerin japonais) très pratiquant , qui ne parlait que japonais et qui était dans son vingtième parcours des 88 temples .Je ne pouvais trouver mieux comme compagnon de marche .Il m’a fait découvrir des endroits réservés aux initiés et m’a mis très rapidement au fait des pratiques courantes de la vie au Japon.
Il n’y a pas eu une journée sans faire de nouvelles rencontres.
Ce chemin, avec ses longs parcours en milieu urbain, a été beaucoup plus rude que Compostelle car les quelques 30% de parties montagneuses sont des plus éprouvantes .J’ai perdu du poids, le peu de graisse superflu a fondu comme neige au soleil ! Mais je suis en pleine forme . Avec les temples secondaires et quelques détours que m’a fait découvrir mon compagnon, ce cheminement s’est étiré sur 1400kms.
Il faut compter de 40 à 45 jours pour faire les 1200kms du parcours pédestre des 88 temples.
La nourriture est à base de poisson,riz,légumes et udon (nouilles).Le poisson cru , tel qu’il est préparé au Japon, est une merveille visuelle et gustative.
L’utilisation des baguettes est un passage obligé (je m’y suis fait assez rapidement).
Le thé vert est dégusté tout au long de la journée .Et il y a de très bonnes bières !
Bilan plutôt positif … mais physiquement , ce fut RUDE !! Mes chaussures , neuves au départ , n’ont plus de talons dignes de ce nom.
Il me reste des photos , des séquences vidéos .Il va y avoir du travail pour les exploiter.
Bien cher tous , recevez les amitiés d’Alain Poret.
total des dépenses 437800 yen / environ 3500euros soit 65euros par jour
Billet-avion JAL 787,43 euros
Le budget global est d’environ 4300 euros
Merci pour votre première impression,cela me conforte à préparer ce périple « en terre inconnue »