La Wonder interview de Jinsei Kataoka et Kondo Kazuma !
La Japan Expo Sud s’est déroulée du 6 au 8 mars dernier au Parc Chanot à Marseille. Dans le programme de cette convention, un duo de mangaka a retenu l’attention de notre équipe : Jinsei KATAOKA et Kazuma KONDO, les auteurs du célèbre Deadman Wonderland édité chez les éditions Kana en 13 tomes. L’occasion pour nous – et pour vous surtout, chers lecteurs – d’en apprendre plus sur ce tandem d’artistes.
La première œuvre connue de ce duo est l’adaptation en manga de l’anime Eureka Seven (studio Bones, 2005/2006) en parallèle de sa diffusion. Ce tremplin leur permet de renouer avec le succès à nouveau sur Deadman Wonderland (2007/2013), qui aura même droit à son anime produit par Manglobe (Samourai Champloo, Que sa volonté soit faite). Ils publiaient un one-shot en 2011 (Kamisama☆Permanent) et Jinsei KATAOKA travaillait sur le scénario de Livingstone depuis 2009, achevé en février dernier.
Journal du Japon : Quand avez-vous su que vous vouliez travailler dans le milieu du manga ?
Jinsei KATAOKA : Dès l’âge de 3 ans, j’ai su que je voudrai faire plus tard un travail en rapport avec le dessin. Plusieurs professions m’ont effleuré l’esprit : des métiers liés à l’artistique comme peintre, pour ne citer que cet exemple. Il fallait cependant que je puisse en vivre et c’est la raison pour laquelle je me suis tournée vers le monde du manga. Ce n’était pas un choix par défaut, mais un choix pour vivre plus rentablement.
Kazuma KONDO : Pour ma part et comme beaucoup d’enfants, je m’ennuyais à l’école. Je passais donc le temps en dessinant… J’ai toujours su que je voulais être illustrateur et étant un grand lecteur de manga, je connaissais la démarche à suivre afin d’en faire mon métier. A ma majorité, j’ai tout simplement participé à des concours pour jeunes auteurs.
Quels sont les mangas qui ont marqué votre jeunesse ?
K.K. : Je peux affirmer que les œuvres qui sortaient dans le Shônen Jump lorsque j’étais à l’école primaire m’ont grandement influencé. Pour ma part il s’agit de Muscle Man, Hokuto No Ken, Captain Tsubasa ou encore Dragon Ball.
J.K. : En ce qui me concerne, il ya un shôjo qui m’a particulièrement marquée : Pataliro Saiyuki. C’était une parodie du voyage en occident de San Goku, publiée chez Hakusensha. Je pense cependant que j’ai aussi été influencée par les œuvres estampillées JUMP. Mon grand frère de 4 ans mon aîné l’achetait chaque semaine et je le lisais après lui.
Quelles sont vos sources d’inspirations principales aujourd’hui ?
K.K. : J’aime beaucoup l’univers cyberpunk de Masamune SHIROW que l’on retrouve dans Apple seed ou encore Ghost in the shell. J’admire aussi le travail de Fujita KAZUHIRO sur Ushio To tora. Il y a aussi des artistes de l’univers vidéoludique qui font partie de mes inspirations : Kinu NISHIMURA (illustrateur sur Street Of Fighter 2, Rival School) et Shūyō MURATA (Zone of the enders, Metal Gear Solid).
J.K. : Pour ma part, il m’est presque impossible de vous répondre tant il y en a ! Mais j’ai à peu près les mêmes sources d’inspirations que M. KONDO . Si je devais citer une œuvre, cela serait Spriggan de Hiroshi TAKASHIGE au scénario et Ryôji MINAGAWA au dessin (1996 à 1998 dans le Shônen Sunday).
Comment vous-êtes vous rencontré tous les deux ?
K.K. : Nous étions tous les deux des assistants à l’époque où nous nous sommes rencontrés. Des soirées entre assistants de mangaka étaient parfois organisées. C’est à l’occasion de l’une de ces soirées « rencontres » que nous avons tous les deux faits connaissance avec l’autre.
Artistiquement, qu’est-ce que vous appréciez l’un chez l’autre ?
J.K. : Je suis impressionnée par la qualité du design général chez KONDO. Que ce soit en termes de technicité, de sens du design pur ou encore de l’équilibre dans son dessin, je lui laisse carte blanche. Je lui fais une confiance inébranlable concernant cet aspect de notre travail d’équipe.
K.K. : Je suis subjugué par la qualité de ses scénarios, mais ce qui me laisse sans voix, c’est sa conception de la mise en scène. Elle a un niveau colossal qui lui permet de prendre en considération la façon dont sera perçue chacune de ses planches. C’est une génie du storyboard.
J.K. : Cela ne t’empêche pas de me faire des remarques sur mon travail de temps en temps (rires).
K.K. : Mais toi non plus tu ne te gênes pas pour en faire de même ! (Rires)
Pourquoi avoir choisi le milieu de la prison comme théâtre des aventures de Ganta ?
J.K. : Les établissements pénitenciers sont synonymes de privation de la liberté. L’un des principaux thèmes de Deadman Wonderland consistait à démontrer qu’à travers un élément privatif (ici la prison), le fait de se battre pouvait amener la liberté, permettait de lever l’entrave de ces chaînes. C’est la raison pour laquelle nous avons choisi la prison, car ce lieu donnait un sens encore plus profond à la liberté.
La folie est un sujet peu exploitée dans l’univers du manga, n’étais-ce pas un pari risqué que de miser là-dessus ?
J.K. : Nous ne trouvons pas que la folie est un sujet peu exploité dans l’univers du manga. En réalité, nous avons même la sensation que cela devient une mode ! Nous avons justement misé sur cet aspect, car cela se vend vraiment bien. On pourrait presque dire que cette thématique est avant tout commerciale, plus qu’intrinsèquement liée à l’histoire.
Voir un manga comme Deadman adapté en anime c’est quelque chose d’habituel. C’est beaucoup moins le cas dans l’autre sens, comment vous avez construit le manga d’Eureka Seven, qu’est-ce que vous vouliez apporter par à rapport à l’anime ? Quel rôle a joué le studio Bones dans ce processus, quels sont les conseils ou directives qu’ils vous ont données ?
J.K. : Le studio d’animation Bones nous a confié un concept à suivre sur lequel nous nous sommes basés pour construire l’ensemble du récit. Mais une divergence s’est créée avec l’anime, qui se basait énormément sur les attentes de ses téléspectateurs. En réalité, nous n’avons fait que suivre des directives que l’on nous a fourni au départ et, faute d’avoir eu une suite du scénario, nous avons-nous-même tentés de rester cohérent avec notre matériau d’origine.
Après 6 ans de publication sur Deadman, quel a été votre ressenti après avoir achevé votre œuvre ? Avez-vous le sentiment d’avoir pu tout explorer ?
J.K. : Nous avions en tête le début et la fin de Deadman Wonderland dès le départ de notre publication. Nous sommes parvenus à suivre un récit cohérent par rapport à ce que nous avions imaginé. Nous avons en effet le sentiment d’avoir tout exploré et avons ressenti, à la sorti du dernier chapitre, une immense satisfaction, ce fut un véritable accomplissement.
Avez-vous une anecdote amusante ou marquante sur ces 6 années ?
K.K. : Grâce à la maternité de Jinsei KATAOKA, nous avons eu droit à des vacances ! C’est survenu d’un seul coup et nous en avons été ravis, nous en avons bien profité ! (Rires)
Envisagez-vous une nouvelle future collaboration ensemble et si oui, pouvez-vous nous en dire plus ?
J.K. : Bien sûr, nous allons continuer à travailler ensemble. Notre prochain projet est actuellement en cours de gestation et il nous est impossible de vous préciser de quoi il retourne… Car c’est encore un peu confus pour nous aussi. Nous savons ce que nous voulons faire, mais pas vraiment de quoi il s’agira exactement… même si cela peut avoir l’air paradoxal !
K.K. : Les mangakas ne sont jamais pressés tant que les éditeurs ne leurs mettent pas la pression avec une deadline ! (Rires).
Une fois la pause achevée, on vous retrouvera avec plaisir ! Merci !
Pour plus de renseignements sur les auteurs et leurs séries, vous pouvez vous rendre sur le site des éditions Kana.
Remerciements à Jinsei KATAOKA et Kazuma KONDO pour leurs réponses et leur temps, ainsi qu’à Florent DAUTRICHE pour la mise en place de l’interview et le traducteur et agent Emmanuel Bochew.
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