[Itw & Live Report] Le jour où LOKA s’arrêtera de tourner…
La 15ème Impact de Japan Expo fut l’occasion pour Journal du Japon de retrouver LOKA, ce quatuor japonais dont l’univers est en pleine expansion actuellement.
Kihiro nous l’avait dit, LOKA signifie « le monde », « l’univers » dans le langage Sanskrit. Et le groupe nous a prouvé qu’ils ne s’étaient pas trompés en choisissant ce nom.
Avec deux tournées européenne en une année, Kihiro (chant), Katsumi (basse), KEN’ICHI (batterie), et Sin (guitare), sont bien décidés à ne pas rester des fantômes dans l’industrie musicale. Aujourd’hui, ils se lèvent pour montrer au monde que leur travail est semblable au labyrinthe de Dédale : Une fois que l’on est tombé dans leur musique, on n’en sort pas.
Depuis le jardin d’Eden
Nous avions rencontré le groupe au Covent Garden l’année passée, alors qu’ils entamaient leur première tournée européenne. Les garçons ont fait un bout de chemin depuis ce temps, et se sont même laissés tenter par un second tour sur le continent.
« Après l’Europe, nous avons enchaîné avec une tournée japonaise, avant de revenir ici. Nous avons aussi fait de nouvelles chansons, enregistré notre nouvel album … On peut dire que beaucoup de choses ont changé depuis que nous nous sommes vus, la dernière fois. » nous explique Kihiro, le chanteur.
« Je ne peux pas expliquer pourquoi nous réussissons, ni comment ! (rires) Nous allons aux mêmes endroits que l’année dernière, mais cette fois nous avons beaucoup plus de monde présent. Nous ne nous y attendions pas, mais je suppose que nous réussissons. Ou plutôt, disons que Demented Show a fait du vraiment bon travail ! » poursuit-il.
« Nous avons dû faire face à beaucoup de difficultés pendant cette tournée, physiquement, surtout. (rires). Mais nous sommes là donc ça va, je suppose ! Ne vous en faites pas. »
Des ailes leur ont poussé
Le dernier clip du quatuor, Tsubasa Trigger, a été réalisé sous la coupe de Michael Laburt, ainsi que du directeur artistique Frank Nitty. Ces derniers ont notamment travaillé sur l’animation de films tels que Narnia : une collaboration impliquant de grands talents, dont Kihiro est particulièrement fier et admiratif.
« Ah, Mike ! Nous avons été présentés par l’un de mes amis. Il fait un travail extraordinaire. Ce gars est vraiment un artiste, c’est incroyable. Il a de vraiment bonnes idées. Nous n’arrivons pas toujours à suivre tout ce à quoi il pense, mais c’est très intéressant et enrichissant. Au final, pour cette vidéo, tout flashe de partout, et lorsque l’on regarde le résultat final, c’est vraiment cool. »
Le chanteur commente ensuite la façon non-conventionnelle de tourner ce clip : « Nous avons mis 24 … ou 36 caméras autour de nous. Et nous avions un véritable avion qui devait se placer derrière nous lorsque nous tournions. Il est d’ailleurs possible de le voir dans le fond. La vidéo a été filmée dans l’entrepôt de l’aéroport d’Haneda. Le directeur a été obligé de faire une demande spéciale au pays pour avoir l’autorisation de filmer. C’était beaucoup de travail, mais ça valait le coup : un entrepôt, des avions … Il fallait le faire, c’était vraiment cool ! » avant de poursuivre : « D’ailleurs, nous avons tourné un second clip sous la direction de Franck, au même endroit. Ce sera pour la chanson DAEDALUS de notre nouvel album QUATTRO. Nous l’avons filmé sur un fond vert, et tout sera en animation, ça va rendre vraiment bien. Il devrait sortir ce mois, ou bientôt en tous cas ! »
Profitant du sujet des collaborations, nous leur avons demandé avec quels autres artistes ils aimeraient travailler, ce à quoi ils nous ont répondu Skrillex et David Guetta à notre plus grand étonnement. Face à notre perplexité, Kihiro explique : « Ils sont différents de notre musique, et c’est ce qui est bien : mixer le tout ensemble. J’apprécie beaucoup les DJs. J’aime particulièrement lorsqu’ils y insèrent du métal. Mélanger de la Dance music, Ray Charles, de la House, du Hip-Hop, des sons plus ghetto, etc. voilà ce qui est intéressant ! ».
Le sujet s’y prêtant, le groupe nous explique pourquoi ils s’intéressent à l’Europe et aiment jouer ici. C’est en réalité une question d’attitude et d’osmose du public avec le groupe. « Nous aimons beaucoup leur comportement. Plus que nous, c’est vraiment les fans qui rendent les shows meilleurs. Le message que nous voulons faire passer à nos fans est là : nous aimons les filles qui retirent leurs T-shirts, qui sont en bikini, les fans qui dansent de façon bizarre. C’est cette liberté qui est importante. Nous ne savons pas si nous sommes du visual-kei, ou quoi que ce soit d’autre, peut-être que nous le sommes, mais nous ne le disons pas. Ce qui est sûr, c’est que nous avons des fans qui font du cosplay, d’autres qui sont fans de visual kei, certains sont même headbangers. Nous avons de tout, et c’est très bien. C’est bien que les gens fassent ce qu’ils veulent, s’ils sont libres. Secouez votre tête si vous le souhaitez. Vous voulez sauter ? C’est une bonne chose. Faites ce que vous voulez ! C’est une sorte d’atmosphère que tout le monde créé ensemble. Ce n’est pas seulement le groupe, mais quelque chose que le groupe et les fans font. »
Sans pour autant couper les racines.
LOKA n’est pas sorti du néant. Les membres ont déjà un certain parcours derrière eux, puisque Katsumi, le bassiste, a débuté à 20 ans comme membre de Clayfish, KEN’ICHI a rejoint SEX MACHINEGUNS à 21 ans, Kihiro, ex. SUPE et UNDIVIDE, parcourait les Etats-Unis il y a quelques années. Quant à SIN, dernier arrivé et cadet du groupe, il appartenait à WIZARD avant de les rejoindre.
Les garçons sont bien conscients de l’apport de cette expérience, sans laquelle LOKA ne serait pas.
KEN’ICHI le rappelle d’ailleurs très bien : « J’ai intégré les SEX MACHINEGUNS lorsque j’avais 21 ans seulement, j’étais très jeune et ne savais presque encore rien faire. Ils m’ont bâti en tant que batteur et m’ont tout apporté. Sans eux, je ne serais pas là. »
Ils savent d’où ils viennent, et ne souhaitent pas l’oublier. Les symboles qu’ils utilisent sont directement liés à leur personnalité et leur histoire. « Les différents emblèmes, ceux dans des cercles, représentent chaque membres du groupe. Nous y avions mis ce que nous aimons. Pour QUATTRO, c’est un peu différent, c’est une référence au Japon lui-même. Le métal au Japon, plus précisément. Lorsque nous regardons la pochette, c’est l’image de Bouddha. Plus exactement, c’est un endroit à Kyoto où il y a des centaines de Bouddha alignés. Nous y avons ensuite ajouté un circuit imprimé de musique, dessus. C’est une façon de montrer l’histoire du Japon, avec Bouddha, en même temps que son côté artistique. Nous avions le souhait de mélanger ces notions. »
Mais les mesures prises pour ne pas abandonner leurs origines ne se limitent pas à l’esthétique. Souvent qualifiés de groupe « américain », ils s’en défendent avec une anecdote concernant la composition de QUATTRO : « Dans la musique également, nous avons essayé de nouvelles choses. Pour la batterie, par exemple, nous avons enregistré les pistes entièrement en son analogique, c’est-à-dire tel que vous l’entendez dans son état naturel. Aujourd’hui, tout le monde enregistre la vraie batterie puis ajoute de la batterie par ordinateur dessus et ça sonne très bien, c’est cool. Mais pour cet album, nous nous sommes dit qu’il en était hors de question. Nous voulions quelque chose de cru, de vrai. Dans un style un peu « Akihabara », très japonais. ». Au sujet de l’utilisation de l’anglais, le chanteur explique : « Cependant, je pense encore que l’anglais convient mieux à ma musique, pour exprimer ce que je souhaite. J’ai mis un peu de Japonais dans cet album, mais c’est plutôt un challenge. C’est aussi pour remercier les fans japonais, et que les gens hors du Japon puissent s’intéresser à la langue japonaise. »
Le tour du monde en 80 jours
Pour ce qui est des projets de l’année dernière, le groupe n’a toujours pas eu son Grammy Award, ni joué à Woodstock ! Peut-être que la sortie de QUATTRO leur offrira cette opportunité ? Ou peut-être pas… « À vrai dire, après notre tournée européenne, nous avons 45 concerts au Japon … Je ne pense donc pas que nous aurons le temps d’aller au Mexique et au Maroc avant un moment, comme nous vous l’avions annoncé la fois précédente. Nous allons nous concentrer sur le Japon et l’Europe dorénavant. D’autant plus que pendant ce tour, nous préparons une pré-production pour de nouvelles musiques. D’expérience, je sais que lorsque j’écris d’endroits différents, c’est très enrichissant, ça change vraiment tout : de nouvelles vibrations, de nouvelles idées, un nouvel environnement. Il y a probablement trois chansons que nous enregistrerons pendant notre tournée au Japon, et cela aboutira sans doute à une sortie l’année prochaine. C’est même sûr. » se console Kihiro.
Ce qui est certain, c’est que LOKA est prêt à conquérir l’univers, armés d’un slogan auquel vous ne résisterez pas : « Si vous voulez tellement vous amusez que vous en retirerez votre T-shirt, venez à notre concert. Et les gars, si vous voulez voir ça, venez au concert. C’est la meilleure raison ! ».
Everybody Rock’N Roll
LOKA, c’est une affaire qui roule… lorsque le van ne tombe pas en panne. Ou un groupe qui marche… si l’on ne prend pas en compte la jambe cassée de Ken’ichi.
Des Japonais à qui le succès sourit ? À moins que le sujet de la souris ne soit à éviter pour ne pas leur rappeler la morsure de Katsumi.
Malgré les déboires du groupe durant leurs tournées, ils ont su garder la tête haute et assurer un show impeccable à Japan Expo.
En novembre, Kihiro nous confiait :
« L’année prochaine nous sortirons le prochain album, donc il est probable que notre développement commence à partir de là ». Aujourd’hui, le groupe semble s’être trouvé, et les propos du californien lors du showcase paraissaient le confirmer : « Où étiez-vous tous ? Nous avons regardé partout autour du monde pour vous voir enfin ici. Je vous ai trouvé, vous m’avez trouvé. Vous nous avez trouvé. Ne nous quittez plus jamais des yeux. Gardez les yeux sur LOKA ! » Ils ont parcouru la planète et se sont trouvés, ont trouvé le monde. Mais pour continuer d’exister, il ne faut pas que le monde détourne les yeux.
Plus encore, le conseil formulé par Kihiro à ses fans semblait étrangement faire écho à la scène qui se déroulait face à nous : « Si vous ne pouvez pas parler de vos rêves, ils ne deviendront jamais réalité. Parlez toujours, autant que possible. » C’est en s’ouvrant à d’autres que l’existence est possible. C’est par le partage qui s’opère entre le groupe et les fans que LOKA est.
Ils se livrent entier sur scène, honorant leur titre Naked to My Soul. C’est ainsi que de façon accidentellement symbolique, Sin retire son T-shirt, comme pour montrer que leurs émotions sont à nu, ou encore Kihiro qui, se jetant dans le public à deux reprises, ne fait plus qu’un avec eux. Katsumi s’exécutera au même rituel à sa suite. C’est un partage, une fusion, parce que LOKA est le monde.
Parce que derrière l’apparence provocante se cache une sensibilité écorchée vive, pareille à la voix du chanteur. Car derrière les rires se cachent des blessures, comme la perte d’un meilleur ami que nous confie le chanteur avant de jouer, plein d’émotions, la chanson qu’il lui dédie.
Ils connaissent la valeur du monde, celui au nom duquel ils chantent. Kihiro l’a dit, il veut rendre à son public plus que ce pourquoi il est venu. C’est pourquoi, une fois en concert, ils offrent bien plus que de la simple musique : ils offrent au monde son reflet.
« We are world, we are LOKA » (littéralement : « nous sommes le monde, nous sommes LOKA »), n’aura jamais eu autant de sens que ce jour-là, dans la Live House.
Finalement, le jour où LOKA s’arrêtera de tourner… n’est pas arrivé de si tôt.
Pour plus d’informations sur le groupe, vous pouvez consulter leur page officielle, ou les suivre sur Twitter ou Facebook, sans oublier de vous abonner à leur chaîne YouTube.
Rendez-vous également sur la page officielle de Demented Show, ainsi que sur leur page Facebook.
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Un grand merci au groupe, à Demented Show pour leur professionnalisme ainsi que leur gentillesse, mais aussi à JaMe France de sa participation à l’interview.
Crédit photo : ©Lōlu Photography